Depuis 2004, l'huile d'olive corse dispose de la distinction AOC, ou appellation d'origine contrôlée. A Corbara, la coopérative oléicole de Balagne rassemble plus de 100 coopérateurs. Et si cette année la récolte est bonne, les producteurs regrettent l'annulation du salon de l'agriculture.
Il est 9h, ce mardi matin, et à la coopérative oléicole de Balagne, les machines tournent déjà à plein régime. Après une année 2020 décevante, les récoltes pour 2021 sont plus fournies, grâce, notamment, à un hiver pluvieux. "On a ouvert le 15 octobre dernier, et on travaille sans arrêt, jour et nuit depuis", raconte Thierry Cervoni, président de la coopérative.
"Cette année, nous avons de bons volumes, nous sommes déjà à 500 tonnes d’olives triturées. On espère atteindre 750 tonnes d’ici la fin de la saison, contre 20 tonnes en tout l’an passé."
On espère atteindre 750 tonnes d’ici la fin de la saison, contre 20 tonnes en tout l’an passé.
Créée en 1983, la coopérative oléicole de Balagne regroupe une centaine de coopérateurs. Des producteurs pour la majorité de Balagne, mais également de toute la Corse "comme d’Ajaccio ou de Porto", cultivant essentiellement des variétés comme la Sabina ou la Germaine, issues pour certaines d’oliviers multi-centenaires.
Depuis le début de la saison, ils se succèdent dans les locaux de la coopérative. Ce matin-là, c’est Philippe Catrouillet, producteur dans le Nebbiu, qui est venu déposer ses cagettes d’olives : 100 kilos au total, le minimum demandé par la coopérative afin de procéder à leur pressage. "Sur toute la saison, j’espère obtenir autour de 150 litres d’huile d’olive. Après, j’en garde une partie pour moi, et je donne le reste à des amis, des connaissances."
Philippe Catrouillet est un "petit" coopérateur : il y a six ans, il a décidé de racheter une oliveraie de 350 oliviers. Après plusieurs années de remise en état, il effectue cette année sa deuxième récolte d’olive.
La moitié sera triturée et pressée à la coopérative oléicole de Balagne, qui dispose d’appareils derniers cris, et la seconde partie dans un vieux moulin. "Les deux méthodes donnent des huiles très différentes. Ici, c’est plus parfumé, et à l’ancienne, cela donne une huile avec un goût de noisette", indique-t-il.
"L’or de Balagne"
Une fois les olives réceptionnées par la coopérative, elles sont pesées, nettoyées, effeuillées, puis malaxées. Pour 500 kilos, il faut compter entre une heure et quart et une heure et demie de travail minutieux des machines avant d’obtenir "l’or de Balagne" : une huile couleur jaune, signe de sa douceur.
La pâte d’olive restante extraite du "jus" est mise à sécher pendant deux ans afin d’en faire un engrais.
"En moyenne, on est sur un rendement de 12% d’huile en octobre [pour 100 kilos d’olives, on obtient 12 litres d’huile, ndlr]. En ce moment, on est autour de 25%, et en fin de récolte ça peut monter jusqu’à 40%", précise Thierry Cervoni.
Le nectar est ensuite mis en bouteille - dont l’étiquette est restée similaire depuis la date de création de la coopérative - ou conservé en cuve. La coopérative de Balagne en possède 10, pouvant contenir autour de 1000 litres d’huile chacune. L’huile fait par la suite l’objet d’analyses chimiques, qui permettent de déterminer la qualité de cette dernière : vierge ou extra vierge.
Une huile qui a le moindre défaut ne peut pas être vierge extra. Donc on redouble d’attention aux conditions de conservation et de température.
La distinction entre les deux se fait principalement avec le taux d’acidité de l’huile : la mention extra-vierge est donnée quand celle-ci ne dépasse pas 1%. Pour les huiles vierges, c’est en-dessous de 2%. Autre différence de taille : le prix, plus élevé au litre pour les huiles extra-vierges.
"D’une année à une autre, la même huile du même producteur peut être vierge, puis vierge extra, et à nouveau vierge. Une huile qui a le moindre défaut ne peut pas être vierge extra. Donc on redouble d’attention aux conditions de conservation et de température", glisse Thierry Cervoni.
Profession lève-tôt
De l’arrivée des olives à leur mise en bouteille, les diverses étapes du processus sont suivies de près par le maître-moulinier, Lionel Lepleux.
Employé au sein de la coopérative oléicole de Balagne depuis plus de 12 ans, il travaille sans casque ni bouchons d’oreille malgré le bruit incessant des machines. "Avec ce bruit, à force, j’en deviens sourd. Mais s’il y a un problème avec les machines, il faut que je sois en capacité de l’entendre, donc je ne mets pas de casque. Et puis ça me permet aussi d’entendre ce que disent les gens", sourit-il.
Autrefois salarié dans la restauration, Lionel Lepleux explique "beaucoup aimer" son métier, bien que les horaires soient parfois compliqués.
"Là, on est sur une grosse année, donc on a beaucoup de boulot. Ce matin, j’ai commencé à 4h. C’est comme ça depuis cinq mois, donc ça commence à faire un peu long, mais ça en vaut la peine. Quand le pressage sera terminé, on passera à la vente des produits, et on fera le tour de la Corse pour livrer les clients. C’est une étape qui me plaît beaucoup également."
Le salon de l’agriculture, une vitrine pour l'huile d'olive Corse
La coopérative oléicole de Balagne réserve habituellement sa place au salon de l’agriculture. Une vitrine idéale pour l’huile d’olive de Corse.
Ce n’est pas sur le salon que l’on fait nos plus grosses ventes, mais il nous permet surtout de rencontrer des futurs clients.
L’annulation de l’événement en 2021 faute à la pandémie de Covid-19 n’est de fait pas sans conséquences économiques. "Au salon de l’agriculture, c’est toute la Corse qui est représentée, les AOP aussi, détaille Thierry Cervoni. On fait quelques ventes sur place qui ne sont pas négligeables, mais on a surtout des prises de contact avec des restaurateurs, des propriétaires d’épicerie fine… Ce n’est pas sur le salon que l’on fait nos plus grosses ventes, mais il nous permet surtout de rencontrer des futurs clients."
Des prises de contact dont la coopérative devra cette fois se passer. Chaque année, elle vend la moitié de sa production, en premier lieu sur le Continent.
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