Yvan Colonna, un an après : "cet élan de mobilisation a transcendé la jeunesse, et marqué les esprits"

Le 2 mars 2022, Yvan Colonna était agressé mortellement à la maison centrale d'Arles. La Corse, durant de longues semaines, va descendre dans la rue pour exprimer son courroux, de manière plus ou moins pacifique. Huit jeunes qui ont pris part aux manifestations se souviennent.

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Ils, et elles, ont entre 18 et 29 ans. Etudiants à Corte, commerçant à Ponte Leccia, ou contrôleuse aérienne à Ajaccio. Nos témoins ont des profils différents. 

Ils ne sont pas pour autant représentatifs de toute la jeunesse corse, mais ils étaient dans la rue, il y a un an, pour dénoncer l'agression mortelle d'Yvan Colonna à la maison centrale d'Arles. Et ils ont accepté de témoigner. 

Mobilisation

Le soir du 2 mars, Pierre-Joseph, 19 ans, s'est rendu sur la place de l'Ile-Rousse. Jules, 18 ans, était à Corte, où son père l'avait emmené. Floriant, 20 ans, était, lui, à Ajaccio. Justine, 22 ans, Lisa, 26 ans, Mathieu, 22 ans, Maria Lucia, 29 ans, Pierre-Jean, 27 ans, aussi, avaient ressenti le besoin de sortir pour manifester leur colère. 

Floriant se souvient : "ça a été la stupéfaction. Personne ne s'attendait à un truc pareil. Je n'avais pas mesuré la gravité de l'état dans lequel il était. Et puis un peu plus tard, alors que je travaillais, je reçois une notification qui m'append qu'il était dans un état grave. Comme beaucoup d'autres personnes en Corse, j'ai ressenti de la colère, de l'incompréhension..."   

Mathieu confirme : "on ne s'est même pas posé la question, on devait être présents, pour montrer notre solidarité à la famille, à l'homme, mais également au symbole qu'il représentait pour les militants nationalistes"

Lisa raconte qu'elle a été "profondément choquée. J'ai ressenti beaucoup d'injustice, et je me suis sentie concernée au premier plan par ce qui est arrivé à cet homme, en tant que Corse".  

Je me suis dit que la mobilisation ne leur ramènerait pas leur fils, leur frère ou leur père, mais que ça les aiderait à avancer

Floriant, 20 ans

Colère, injustice... Ce sont les termes qui reviennent le plus souvent dans les propos de nos interlocuteurs. Pierre-Joseph résume : "si le droit avait été respecté, peut-être qu'Yvan Colonna ne serait pas mort, et si l'individu qui l'a tué avait été correctement surveillé par l'administration pénitentiaire, cela ne serait pas arrivé".

Floriant se souvient de ces longues heures, dans les cortèges, à réclamer "la vérité, pour la famille. Je me suis dit que ça ne leur ramènerait pas leur fils, leur frère ou leur père, mais ça les aiderait à avancer. Je pense que c'est nécessaire".  

Quand on demande à Mathieu ce qui l'a le plus marqué, il répond sans même réfléchir : "c'est la mobilisation. La force populaire. Je me suis dit, oui, le peuple corse existe, même si l'Etat ne veut pas le reconnaître. Cet élan a transcendé la jeunesse et marqué les esprits. Ca m'a touché, ému, de voir toutes les générations réunies dans la rue, avec un message de justice, de vérité. Et de révolte".

Violences

Une révolte qui s'est parfois traduite par des débordements, et de fréquents heurts entre une partie des manifestants et les forces de l'ordre. Justine se rappelle de "forces de l'ordre très violentes, face à la fraternité du peuple corse". "Je n'ai pas trouvé ça normal, l'Etat doit nous entendre, et répondre à nos questions"

Lisa, elle, se remémore "les cocktails molotov, les débordements, qui étaient dus à ce que l'on a tous ressenti".  

Certains abus, qui ont eu lieu, et qui ont eu tendance à décrédibiliser un peu la cause

Pierre-Jean, 27 ans

Floriant reconnaît qu'il y a pu y avoir de la violence également du côté de certains manifestants, mais ce n'est pas ce qu'il retient en premier de cette période : "lors d'une manifestation à Ajaccio, il y a eu des échauffourées au niveau du commissariat, et la police a commencé à gazer celles et ceux qui étaient venus manifester pacifiquement, au lieu de s'en prendre à ceux qui étaient violents. J'ai vu des pères de famille, des personnes âgées se réfugier dans la rue Fesch pour fuir les attaques".  

Pierre-Jean, enfin, dénonce néanmoins "certains abus, qui ont eu lieu, et qui ont eu tendance à décrédibiliser un peu la cause. Je pense notamment à cette agression d'un journaliste corse qui avait été frappé".  

Et maintenant ?

Un an après, Pierre-Joseph attend "l'autonomie, qui est voulue par les Corses qui ont voté à 68 % pour les nationalistes aux dernières territoriales"

Lisa estime que cette mobilisation "a permis de faire appliquer le droit, après de longues années de lutte, en matière de rapprochement des prisonniers. Mais s'il avait été appliqué plus tôt Yvan Colonna ne serait peut-être pas mort". 

Nous sommes un peuple qui aspire à la paix, à la vie, et au respect de la démocratie

Mathieu, 22 ans

Mathieu attend beaucoup de la commission parlementaire, qui enquête sur les conditions de la mort d'Yvan Colonna : "il faudra faire toute la lumière sur cette affaire, et rendre justice à tout un peuple qui aspire à la paix, à la vie, et au respect de la démocratie".

Justine y voit "beaucoup d'enfumage. Peu de choses ont été faites. On doit continuer à se mobiliser". 

Pierre-Jean, lui, "attend des réponses claires". Il est plutôt dubitatif, mais prône l'apaisement. "Je pense savoir pourquoi on ne les a pas, mais je peux me tromper. En tout cas, il faut attendre, avoir de la patience. C'est surtout la famille qui attend des réponses. On doit faire preuve de respect, et ne pas engager la moindre nouvelle action sans leur en parler".  

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