Leur contrat s'est terminé fin décembre mais ils n'ont toujours pas pu regagner leur domicile : conséquence de la fermeture des frontières entre la France et le Maroc, 300 travailleurs agricoles saisonniers marocains sont empêchés de rentrer chez eux. Une situation suivie de très près par la préfecture.
En octobre dernier, c'est par le biais d'un protocole exceptionnel que plus d'un millier d'ouvriers agricoles marocains avaient été acheminés en Corse pour épauler la filière agrumicole - en premier lieu les exploitants de clémentines - pour la récolte. Leur contrat saisonnier s'est terminé fin décembre, et ils sont désormais autour de 300 à ne plus pouvoir rentrer chez eux.
En cause, la suspension de tout vol à destination ou en provenance de la France par les autorités marocaines, actée depuis le 29 novembre. Une décision que justifie le Royaume par la recrudescence des cas de Covid-19 - notamment la circulation du variant Omicron -, et qui fait également suite à des tensions diplomatiques recensées au cours des derniers mois entre les deux pays, sur fond de soupçons d'espionnage d'Emmanuel Macron et de son gouvernement par les services marocains.
"Ils sont plus qu'abattus"
La fermeture des frontières, plusieurs fois prolongée, est maintenue au minimum jusqu'au 31 janvier. Un calvaire pour ces ressortissants marocains, sans emploi, sans revenus, et sans perspectives claires de retour au domicile. "Ils sont plus qu'abattus, ils souhaitent regagner leur famille" , témoigne Ange Maestrini, producteur de clémentines à Antisanti.
Lui accueille chaque année plusieurs dizaines d'ouvriers agricoles marocains, pour des contrats s'étalant de deux à six mois. Aujourd'hui, ils sont 19 sur son exploitation à être "bloqués en Corse". "Ils sont un peu en colère, surtout contre les autorités marocaines, parce qu'ils voient bien que nous, de notre côté, on fait tout notre possible pour essayer de les ramener chez eux", soupire le producteur.
Une situation "transitoire" plutôt qu'irrégulière
À la préfecture de Haute-Corse, on l'assure : le dossier est suivi et étudié très sérieusement. "Nous avions prévu deux vols pour les acheminer : un premier le 11 janvier, qui n'a pas pu partir, et un second le 19 janvier", qui n'est pas encore assuré, indique François Ravier, préfet de Haute-Corse.
En l'attente, presse donc la question du statut juridique de ces personnes. Le représentant de l'Etat est catégorique : leur situation est "transitoire" et non pas irrégulière : "dès que nous avons appris que le premier vol ne serait pas possible, une procédure nationale a été travaillée et concertée, pour que ces saisonniers qui ne peuvent pas rentrer chez eux puissent bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour (APS)."
Une autorisation qui pourra, au cas par cas, être assortie d'une autorisation de travail, après étude des besoins remontés par les filières, indique le préfet.
L'hébergement assuré par les producteurs
Reste la question, centrale, de l'hébergement de ces ouvriers. "Aujourd'hui, les producteurs ne sont plus dans l'obligation d'héberger ces personnes. Mais selon les échanges que j'ai pu avoir avec eux, ils vont continuer à le faire en attendant que l'on trouve une solution", assure François Ravier.
"C'est la moindre des choses, abonde Ange Maestrini. Au sein de son exploitation, les 19 ouvriers en attente de retour sont logés "dans les mêmes conditions que pendant leur période de travail. Nous prenons tout en charge : l'eau, l'électricité, le chauffage. Et en ce qui concerne la nourriture, si on s'aperçoit que la situation dure encore un peu trop longtemps, nous allons être obligés de leur donner une prime exceptionnelle, de manière à ce que cela n'impacte pas le salaire", récolté au cours de leur contrat.
Ouvriers, producteurs et préfecture espèrent tous une résolution rapide de la situation. Sollicité, le consulat du Maroc n'a pas pu être contacté. La question du départ effectif de l'avion à destination du Maroc, pour acheminer une partie des travailleurs saisonniers, demain, 19 janvier, reste, elle, à cette heure en suspens.