Ces tags et bombages politiques de plus en plus nombreux qui coûtent cher aux communes comme à leurs auteurs

Sur la route, dans les rues, sur les murs des bâtiments publics ou même sur les vitrines commerçantes, les tags et bombages à caractère politique sont depuis quelques années de plus en plus nombreux dans les grandes villes de Corse. Une pratique pourtant réprimandée par la loi, et au risque de sanctions pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement.

"Terra corsa a i Corsi", "è fora a Francia", "Attenti a voi", "Libertà per i nostri", "LLN", "AFF" ou encore "Français de merde"... Que risque-t-on à taguer des surfaces publiques et/ou privées ?

Le 9 avril, aux toutes petites heures du matin, trois militants indépendantistes étaient interpellés en pleine séance de bombage sur les murs de la mairie de Bastia. Le bâtiment public n'était pas le seul visé : comme lui, ce sont plusieurs établissements bancaires bastiais, la Banque de France et une agence immobilière qui ont également été "décorés".

Placés en garde à vue dans le cadre d'une enquête ouverte par le parquet de Haute-Corse, les trois jeunes hommes ont depuis été remis en liberté sous contrôle judiciaire en l'attente de leur renvoi devant le tribunal correctionnel de Bastia, le 21 mai, pour "dégradations aggravées".

Jusqu'à 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende

Si pour les auteurs, il s'agissait là d'une forme de militantisme, en France, ces faits sont judiciairement qualifiés de vandalisme, ou le fait de porter atteinte volontairement aux biens privés ou publics sans motif légitime. Une infraction qui peut coûter cher à la personne qui en est reconnue coupable.

Ainsi, indique le procureur de la République de Bastia, Jean-Philippe Navarre, "le délit de dégradation ou détérioration légère par l’apposition d’inscriptions, quel qu’en soit le motif, est puni d’une peine de 3.750 euros d’amende."

Dès lors que cette infraction "aura porté sur un bien d’utilité publique ou aura été commise en réunion, la peine d’amende est portée à la somme maximum de 15.000 euros", continue le parquet.

La gravité des dégradations rentre également en compte dans l'appréciation de la peine : dans l’hypothèse de dégradations graves, - et en tenant compte du fait que le critère de gravité relève de l’appréciation souveraine des juridictions -, des peines d'emprisonnement peuvent être prononcées : 2 ans et une peine d'amende de 30.000 euros, "voire 5 années d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende lorsque les faits ont été commis en réunion ou aux dépens de biens d’utilité publique."

"Dans tous les cas, ces peines peuvent être accompagnées de peines complémentaires et notamment celles d’interdiction professionnelle, de porter une arme, d’exercer une fonction publique ou une activité sociale et/ou de privation des droits civiques et de famille", conclut le procureur de Bastia.

Reste désormais à savoir ce qu'il en sera, et notamment quel degré de gravité sera retenu, pour les trois personnes interpellées dans le cadre de la campagne de bombage à Bastia. Réponse dans cinq semaines.

Des tags de plus en plus nombreux

Cet événement et ces tags ne sont pas isolés : les inscriptions et autres graffitis, qu'ils soient à revendication politique ou non, fleurissent sur les murs de Bastia. Si le phénomène a toujours existé, il semble néanmoins prendre depuis quelques années une ampleur nouvelle.

Dans le centre-ville, sur le quai des martyrs, dans les rues annexes au Vieux Port, à l'entrée du tunnel... Des bombages de plus en plus nombreux, qui pour certains viennent même au fil du temps à se superposer les uns sur les autres, et renvoient plus souvent à des revendications sociales et politiques plutôt qu'à l'expression créative d'aficionado d'art urbain.

Pour la majorité, ces graffitis ont tendance à apparaître plus vite qu'ils ne disparaissent. Certains, présents depuis plusieurs mois voire années - à l'agacement, parfois, des riverains ou commerçants - en viennent même presque à se fondre dans le paysage.

D'ailleurs, une semaine après leur découverte, les tags de la nuit du 8 au 9 avril n'ont toujours pas été effacés, ni des murs de la mairie de Bastia, ni de ceux des établissements bancaires...

Des travaux de nettoyage coûteux

Contactée à ce sujet, la municipalité indique qu'ils seront enlevés des murs de la mairie avant la fin de la semaine. Une opération qui a un coût : à l'année, le budget nettoyage des tags pour la commune de Bastia varie entre 40.000 et 60.000 euros.

"Les tags sont effacés systématiquement et régulièrement lorsqu’ils sont réalisés sur des murs ou bâtiments communaux", assure la municipalité, qui précise se heurter néanmoins à une problématique : "Les plus visibles sont malheureusement souvent sur des copropriétés privées, sur lesquelles nous ne pouvons intervenir."

À noter que Bastia est loin d'être la seule commune insulaire confrontée au problème d'inscription sur ses murs : toujours en région bastiaise, la mairie de Ville di Pietrabugno déplorait récemment des bombages "Français de merde" et "FLNC"  découverts sur le site patrimonial de Campu Canicciu, en cours d'aménagement. La municipalité annonçait à cet égard l'examen des bandes de vidéosurveillance et le dépôt d'une plainte.

En janvier dernier, des tags avaient également été retrouvés sur la façade du musée patrimonial de Saint-Florent. Il s'agissait cette fois des inscriptions "Terra corsa a i corsi", "IFF", "FLNC", "Attenti a voi", mais également "A droga fora". Une plainte avait été, là aussi, déposée par le syndicat mixte du grand site gestionnaire de la structure.

Plus généralement, des tags et inscriptions similaires sont régulièrement découverts sur les panneaux des villes ou les murs de Corse. Un phénomène artistique qui a donc ses adeptes... aux risques de devoir payer une amende salée.

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