Va-t-on au-devant d'un risque de coupures de courant régulières cet été en Corse ? Avec la hausse des températures, la consommation en électricité sur l'île n'a jamais été aussi importante, indique EDF en Corse, provoquant une tension sur l'équilibre entre l'offre et la demande.
Le seuil d'alerte n'est pas encore dépassé, mais à en croire EDF, la Corse s'en approche dangereusement. Dans une lettre d'information envoyée hier, mercredi 20 juillet, aux maires de l'île, l'entreprise de production et fourniture d'électricité et de gaz prévient : alors que la demande en électricité que connaît actuellement la Corse "n’a jamais aussi été élevée en saison estivale", le système électrique corse "entre dans une situation tendue au vu des prévisions de température pour les semaines à venir".
Deux problématiques principales se distinguent ainsi, établit EDF. La hausse du mercure, d'abord, "très nettement au-dessus des moyennes de saison [+ de 4.6 degrés au-dessus des moyennes pour le mois de juin], et les prévisions confirment ce phénomène pour encore plusieurs semaines". Des fortes chaleurs conjuguées à un déficit de précipitations depuis le début de l'année, -41% par rapport aux normales sur la même période, plaçant la région toute entière en "vigilance sécheresse renforcée".
Dans les jours qui viennent, tous les records de demande puissance en période estivale devraient être dépassés.
La forte demande en électricité, ensuite, "bien au-delà des normales : on observe actuellement des points de puissances à 400 MW, soit 60 MW supérieures aux pointes à température normale." Une surconsommation qui s'explique notamment, à priori, par l'utilisation renforcée des climatiseurs et ventilateurs pour se rafraîchir. "Dans les jours qui viennent, tous les records de demande de puissance en période estivale devraient être dépassés", s'inquiète EDF.
Le risque de coupures régulières de courant
Au risque d'aller jusqu'à un scénario catastrophe, avec des coupures de courant à répétition cet été ? La commune de Saint-Florent a déjà expérimenté cette hypothèse au cours de la soirée de mardi 19 juillet, avec autour de deux heures sans électricité.
La faute à la panne d'une boîte de jonction souterraine, induite par les fortes chaleurs, indique le service communication d'EDF en Corse. "Ce sont des pannes qui sont connues avec les hausses des températures, il arrive que ces boîtes, à un moment donné, se mettent en défaut. Cela arrive assez communément, pas tous les jours, heureusement, et pas sur toutes les boîtes, puisque nous en avons des centaines sur le territoire. Mais c'est un risque."
En mai 2020, la direction d'EDF en Corse indiquait pourtant être prête à affronter la situation : "Nous mettons en œuvre toutes les mesures envisageables, nous entretenons nos moyens de production, nous entretenons nos réseaux et nous gérons nos stocks, donc nos retenues avec un niveau très élevé", détaillait ainsi Amandine Bono, cheffe de service du système électrique d'EDF Corse. "Les plus grands barrages sont au niveau maximum malgré la sécheresse. Nous avons anticipé depuis plusieurs mois déjà, nous avons géré nos stocks avec prudence et parcimonie, et les taux de remplissage sont au maximum." Elle précisait également que des méga watts d'unité mobile de réserve avaient été acheminés, et pourraient servir dans les scénarios les plus défavorables.
Il faut creuser le sol, identifier l'endroit où la boîte fait défaut... Ce n'est pas quelque chose que l'on peut réparer dans l'instant.
Mais à défaut d'une amélioration des conditions climatiques, ces pannes, comme celle survenue en début de semaine à Saint-Florent, devraient à priori être amenées à se répéter au cours de l'été, en Corse comme sur le continent. Si le risque est connu et peut-être traité une fois avéré, "cela nous pose quand même problème, car il faut creuser le sol, identifier l'endroit où la boîte fait défaut... Ce n'est pas quelque chose que l'on peut réparer dans l'instant", souffle-t-on dorénavant au sein d'EDF.
Pour l'heure, et pour anticiper cette situation, "les moyens hydrauliques sont gérés depuis plusieurs mois avec une préservation maximale de la ressource en eau au vu du déficit de précipitations que l'île connaît." Une gestion qui "préserve les usages de l'eau, mais limite le potentiel de production d'énergie électrique", souligne l'entreprise. "En parallèle, la disponibilité des moyens de production thermique est renforcée. Enfin, des groupes de réserve ont été installés en différents points du territoire pour participer à la sécurisation de l'alimentation, notamment en cas de défaillance sur les moyens de production."
Appel à la modération énergétique
Reste que, selon EDF, la Corse va enregistrer pendant plusieurs semaines "une demande en électricité encore jamais atteinte, pendant que les moyens de production pour y répondre sont optimisés, mais limités. Les marges de sécurité pour garantir la sécurité d’approvisionnement de l’île sont donc réduites."
Une tension sur l’équilibre entre l’offre et demande en électricité qui invite à "utiliser l’énergie électrique avec sobriété", conclut EDF, qui liste ainsi aux municipalités insulaires "quelques gestes simples", qui participent, sans nuire au "confort des clients qui souhaitent s’y associer", à savoir : le décalage de certains usages en dehors des heures de pointe de consommation, 18-23h (lave-linge, lave-vaisselle, recharge de véhicule électrique…), l’adaptation de la température de la climatisation, l’usage de la climatisation avec les portes et fenêtres bien fermées.
Un courrier qui devrait bientôt s’accompagner d’une nouvelle communication, plus générale, de l’entreprise, pour appeler les clients insulaires à la modération énergétique. "Le problème n’est pas exclusif à la Corse, mais concerne tout le territoire national", souligne le service de communication d’EDF Corse. Et auquel il faudra vraisemblablement s’habituer pour les prochaines années, avec la hausse globale des températures.