Depuis plusieurs mois, les prix des carburants tournent autour de deux euros le litre. Un tarif qui, dans un contexte d’inflation générale, pèse de plus en plus sur le budget des ménages.
« Voilà, allégé de 120 euros ! », lance un homme à la sortie d’une station-service de la région ajaccienne. D’un pas lent, le septuagénaire regagne son véhicule, un utilitaire, et allume le moteur. Il n’en dira pas plus, assurant que le prix qu’il vient de débourser « vaut toutes les explications ».
L’établissement dans lequel il s’est arrêté affiche 1.93 euro le litre de sans-plomb et 1.88 le litre de diesel. Comme lui, la majorité de la population insulaire, dépendante à la voiture, regarde avec appréhension les fluctuations presque quotidiennes du prix de l’essence. « Je fais très attention. Maintenant, je m’arrête de faire le plein presque au dernier moment, même si je sais que ce n’est pas la meilleure solution, sourit Marie. J’ai un petit salaire et je pense que ces derniers mois, mon budget essence a dû doubler. »
La pompe claque. Signe que le plein est terminé. Sur le compteur, le chiffre affiche presque 70 euros. Marie ne fait aucun commentaire. Elle se contente d’un mouvement de tête vers le prix suivi d’un regard entendu. Un regard qui pourrait dire : « Vous voyez ? ». Avant d’entrer dans le petit bâtiment pour régler, elle explique : « C’est simple, avec l’augmentation d’absolument tout, je ne peux plus faire d’écart et je croise les doigts pour qu’il n’y ait pas d’imprévu. »
« Ces groupes font des bénéfices pharamineux »
Afin de pallier l’augmentation galopante des prix des carburants, le gouvernement a mis en place une ristourne à la pompe de 30 centimes par litre puis de 10 centimes. Une aide qui a pris fin le 31 décembre dernier pour être remplacée par un dispositif plus ciblé : une indemnité de 100 euros pour les 10 millions de foyers les plus modestes. Initialement prévu jusqu’au 28 février 2023, ce dernier a été prolongé jusqu’au 31 mars 2023.
Cette indemnité peut, pour certains, être complétée par le plafonnement à 1.99 euro le litre de sans-plomb et de diesel mis en place dans les stations-services Total. Active depuis le 1er mars, et jusqu’à la fin de l’année 2023, la mesure n’est, pour l’heure, pas appliquée en Corse.
Une fausse aide selon un chef d’entreprise s’alimentant dans une des stations-services du groupe. « Il faudrait que les prix soient en permanence contrôlés. Évidemment que je suis favorable à ces mesures, mais il faut aussi garder en tête que lorsque que les prix sont normaux, si on peut dire ça comme ça, ces groupes font des bénéfices pharamineux », estime-t-il.
« C’est de la perte sèche pour l’entreprise »
Spécialisé dans le bâtiment, il compte une flotte d’une dizaine de véhicules professionnels. « C’est énorme… Énorme. Plus le prix augmente et plus on prend sur notre marge. Mais au final, c’est de la perte sèche pour l’entreprise. Ce serait injustifié d’augmenter nos prix de déplacement de 10 euros pour nos clients, surtout que tout augmente aussi pour eux, donc vous ne pouvez pas augmenter comme ça », précise-t-il.
Ce matin-là, un de ses camions s’est rendu à Vico.« Pour arriver là-bas, il faut passer deux cols en partant d’Ajaccio. Donc, en plus du prix du carburant, la consommation est forcément plus élevée », continue-t-il.
Si pour l’heure, rien n’est à signaler dans l’île, les raffineries Total ont entamé leur quatrième jour de grève conte la réforme des retraites, ce vendredi 10 mars. Un mouvement qui laisse craindre de possibles pénuries, et ainsi des ruées dans les stations-services.