Lourde amende contre un viticulteur jugé pour pillage archéologique

Un viticulteur de la Marne a été condamné à une amende douanière de 197.235 euros pour avoir dérobé des centaines d'objets anciens sur des sites archéologiques, des milliers de pièces de monnaie et des centaines d’outils agricoles mais aussi des objets ornementaux de la vie quotidienne. 

Le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne) a reconnu cet homme âgé de 60 ans coupable d'exécution de fouilles sans autorisation, de vente du produit de ces fouilles et de détention d'objets archéologiques.

Il a également été condamné à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis.


J'ai toujours fait ça, je ne pensais pas être un bandit de grand chemin

Jugé pour avoir fouillé illégalement des sites archéologiques, un viticulteur de 60 ans a contesté ce mardi toute volonté de pillage, assurant avoir agi par "amour" des pièces anciennes. En cause : des fouilles réalisées sans autorisation sur des sites archéologiques de la Marne, de l'Aube et de la Seine-et-Marne, à l'origine de dommages "irréversibles" pour le patrimoine, selon le parquet de Meaux.

"J'aurais aimé être archéologue. Je n'ai pas pu", a raconté devant le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne) le prévenu, teint buriné et cheveux poivre et sel, précisant n'avoir pour tout diplôme qu'un "certificat d'études". "Cette passion, je la tiens de mon grand-père. Il m'emmenait le week-end dans
les champs, on ramassait des pièces
", a ajouté le sexagénaire, producteur de champagne dans la Marne. "Je pensais être dans la légalité".

"Le prévenu a privé les archéologues de leurs outils de travail", a dénoncé le procureur. "Il savait parfaitement ce qu'il faisait. Il savait que ce qu'il faisait était contraire à la loi", a ajouté la magistrate, rappelant qu'un article de presse sur les "ravages" du pillage archéologique avait été retrouvé au domicile du vigneron.

La représentante du ministère public a réclamé quatre mois de prison avec sursis contre l'agriculteur et 5.000 euros d'amende avec sursis contre son épouse, poursuivie pour "recel". Des réquisitions qui s'additionnent à une amende de près de 200.000 euros réclamée par les douanes. Le tribunal a mis son jugement en délibéré au vendredi 8 août.

2.300 objets anciens

Le vigneron avait été interpellé le 5 février 2012 en Seine-et-Marne lors d'un contrôle routier réalisé par les douaniers. A bord du véhicule se trouvaient des bouteilles de champagne, en règle, mais aussi 112 pièces anciennes d'époque gallo-romaine. A la demande du parquet de Meaux, une perquisition avait été menée au domicile du vigneron, où les douaniers avaient trouvé un véritable petit musée : 2.300 objets anciens, parmi lesquels des pièces de monnaie, des poteries, des bagues et des colliers.
La collection, dont la valeur est estimée à plusieurs dizaines de milliers d'euros, a été confisquée par les douanes, qui se sont constituées partie civile dans ce dossier, en compagnie du ministère de la Culture.

L'ensemble de ces fouilles sauvages constitue un vrai problème. C'est une catastrophe pour la science assure au tribunal Marc Drouet, sous-directeur de l'archéologie au ministère. "Il ne faut pas que l'archéologie soit victime de son succès. L'archéologie, c'est l'affaire de professionnels". Accusé d'avoir ciblé en connaissance de cause les meilleurs sites historiques de la région, en effectuant notamment un repérage en avion, le prévenu a tenté de minimiser la portée de ses recherches, réalisées "avec l'accord des propriétaires" des terrains concernés. "Je cherchais à la surface de la terre. Les objets étaient là, il n'y avait qu'à les ramasser", a assuré, lunettes en main, le sexagénaire, qui consignait dans un petit carnet l'ensemble de ses découvertes. "Ce sont des monnaies très courantes, qu'on trouve partout", a ajouté le vigneron, qui se rendait régulièrement dans des salons numismatiques pour vendre ou échanger ses biens. "C'était une passion extrêmement forte (...) Ces pièces, je les traitais avec amour".

Revoir notre enquête sur le pillage des sites archéologiques

C'est un véritable fléau depuis quelques années : de très nombreux chantiers de fouilles sont victimes de pillages. Sur ces sites, des pièces de grande valeur historique sont dérobés afin d'être revendus, principalement sur internet. Diffusée dans le 19/20 du dimanche 1er juin 2014.

Selon l'association Halte au pillage du patrimoine archéologique et historique (Happah), au moins 520.000 objets sont pillés chaque année en France. Ces vols, qui concernent principalement des objets de l'époque gauloise, antique et médiévale, comme les pièces de monnaie, sont le fait d'environ 45.000 prospecteurs munis de détecteurs de métaux. "Parmi eux, il y a des trafiquants de grande envergure", a assuré en marge de l'audience Jean-David Desforges, président de l'Happah. "A cause d'eux, il y a toute une part de notre histoire nationale qui nous échappe".
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