Sauf changement technique de dernière minute et avant la fin de l'année, la Loi sera définitivement adoptée et notre région fusionnera dans quelques mois avec ses deux voisines. La capitale administrative en sera Strasbourg, qui accueillera sans doute également la Préfecture de Région.
L'Assemblée nationale a voté mardi en seconde lecture la loi sur le découpage des régions lors d'un scrutin nettement plus serré qu'en première lecture, en raison principalement d'un durcissement des écologistes et des centristes qui ont basculé de l'abstention à un vote hostile.
Les députés ont adopté le texte, par 277 voix pour, 253 contre et 33 abstentions, alors qu'à la première lecture, en juillet, ils l'avaient voté par 261 pour, 205 contre et 85 abstentions. Jamais, depuis le début du quinquennat de François Hollande, on n'avait compté autant de votes contre.
Le projet de loi crée 13 grandes régions métropolitaines, au lieu de 22 actuellement, alors que le Sénat en proposait 15.
Il fusionne l'Alsace avec la Lorraine et Champagne-Ardenne, le Nord-Pas-de-Calais avec la Picardie, et Midi-Pyrénées avec Languedoc-Roussillon, trois fusions vivement contestées.
Les autres regroupements sont moins polémiques: Poitou-Charentes avec Limousin et Aquitaine, les deux Normandie, Bourgogne et Franche-Comté, Rhône-Alpes avec Auvergne.
Un des rares changements introduits par la deuxième lecture fait de Strasbourg la capitale de la future région du grand Est, dans l'espoir de calmer les élus locaux alsaciens.
Peine perdue: une centaine d'entre eux, ceints de leur écharpe tricolore, ont accroché mardi sur les grilles de l'Assemblée nationale le dessin d'une Alsacienne en colère avec le slogan "Touche pas à l'Alsace".
Les députés ont refusé d'assouplir, par rapport à la version votée en juillet, le droit d'option permettant à un département de changer de région, très important aux yeux des élus bretons pour "récupérer" la Loire-Atlantique.
Après une tentative de conciliation avec les sénateurs, jeudi, et une ultime navette, l'Assemblée devrait adopter définitivement le texte d'ici à la fin de l'année.
Un vote difficile
Si, comme en juillet, une dizaine de députés socialistes ont voté contre, les députés PS ont été plus nombreux à voter pour, et moins à s'abstenir sur un texte qui, selon le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, "prouve qu'on peut faire des réformes dans ce pays à condition d'avoir une ambition".Ainsi, la quasi-totalité des députés du Nord-Pas de Calais ou proches de Martine Aubry qui avaient alors exprimé leur hostilité à la fusion avec la Picardie, ont cette fois voté pour.
Comme en première lecture, la majorité des députés UMP, qui ne pardonnent pas au gouvernement d'avoir abrogé la création du conseiller territorial (commun aux départements et aux régions) votée sous Nicolas Sarkozy, se sont prononcés contre la réforme. De même pour la totalité du Front de gauche, qui refuse "la mise en concurrence des territoires et l'éclatement à terme de la République".
Les radicaux de gauche, regrettant "la précipitation" et "le manque de concertation" avec lesquels la nouvelle carte a été élaborée, se sont une fois de plus divisés entre pour et contre.
Evolutions des écologistes et des centristes
"Le contexte général de la réforme territoriale nous semble évoluer de façon très négative", a déclaré à la presse le co-président du groupe écologiste, François de Rugy. "Nous avions émis des doutes et des craintes quant à l'émergence de méga régions et nous y sommes", a-t-il ajouté.Pour le chef de file des députés PS, Bruno Le Roux, "les écologistes prennent une décision sur la base de considérations qui ne sont pas le fond du texte".
De fait, la dégradation des rapports entre EELV et le gouvernement depuis la mort de Rémi Fraisse sur le site du barrage de Sivens le 26 octobre a tendu le débat, avec une vive attaque jeudi dernier de Bernard Cazeneuve contre François de Rugy, à qui il reprochait d'avoir "de la haine et de l'insulte à la commissure des lèvres".
Pour sa part, les députés UDI ont ressenti une "immense déception" devant ce texte qui "devait être la mère des réformes", selon leur chef de file, Philippe Vigier. Celui-ci a expliqué le durcissement de son groupe par la confusion sur les compétences des différents niveaux de collectivités territoriales, point au coeur du deuxième projet de loi sur la réforme territoriale, discuté au Sénat à partir de décembre.