Annulations des feux d'artifice du 14 juillet pour risque d'incendie: "je vais dire à mes salariés que je ne peux pas les garder"

Depuis la forte incitation de la préfecture faite aux maires du Bas-Rhin à ne pas maintenir leurs feux d’artifice du 14 juillet, pour risque d'incendie lié à la sécheresse, les annulations s'enchaînent. La période est pourtant cruciale pour les artificiers, qui ne cachent pas leur inquiétude.

Le 5 juillet 2023, la Ville de Strasbourg annonçait l'annulation de son traditionnel feu d'artifice de la fête nationale, suivant l'intense recommandation de la préfecture. Depuis, de nombreuses communes alsaciennes ont pris la même décision, entraînant les professionnels dans le flou.

"Je ne peux que vous recommander vivement d'annuler l'ensemble de vos spectacles pyrotechniques [...] notamment à l'occasion des festivités du week-end du 14 juillet", indique Josiane Chevalier aux maires du Bas-Rhin dans un courrier daté du 4 juillet. La préfète invoque comme raison la forte mobilisation des pompiers en raison des risques de départs de feux de végétation et de forêt.

"Depuis ce courrier, c'est l'hécatombe, témoigne Christian Trapon, gérant de la société Pyragric Nord-Est, spécialisée dans les spectacles pyrotechniques. Sur le Bas-Rhin, on est déjà à 80% d'annulations. Des maires me disent qu'ils ne peuvent pas assurer leur spectacle parce que les pompiers ne seront pas disponibles."

On a beaucoup de feux d'artifice qui ne seront pas tirés, et il faut bien les stocker quelque part.

Christian Trapon

Gérant de Pyagric Nord-Est

De quoi rendre les élus quelque peu désemparés. "La préfète a annoncé que le SIS (service de secours et d'incendie, ndlr) ne pourra pas assurer la sécurité de tous les feux d’artifice. C'est donc au maire de faire leur boulot, avec quelques agents communaux. Avoir un pompier, ça rassurerait tout le monde..."

Certaines communes ont purement et simplement annulé leurs feux, tandis que d'autres les ont décalés. "Mais le résultat est le même : on a beaucoup de feux d'artifice qui ne seront pas tirés et il faut bien les stocker quelque part ! Ça demande de faire venir un camion sécurisé qui doit ensuite ramener tout cela à la plateforme de stockage qui se trouve dans l'Ain." Christian Trapon estime une hausse de ses charges de stockage à 15 000 euros par mois.

100 000 euros de pertes directes

Au total, les annulations en chaîne des feux de la fête nationale entraînent une perte directe de 100 000 euros pour son entreprise. "Elle sera compensée parce que les communes paieront quand même plus de la moitié des frais engagés. Mais ce n'est qu'une compensation directe des charges. On ne fera plus de marges, plus rien", s'alarme le gérant.

Toutes ces annulations viennent casser un engrenage qui était huilé depuis des mois. "J'avais pourtant prévenu mi-juin. J'avais appelé des maires en leur disant de faire attention, que l'on entrait dans la phase finale et qu'ils ne pouvaient plus revenir en arrière parce que leurs frais étaient engagés. Certains avaient déjà jeté l'éponge."

Toute une profession dans l'inquiétude

"Mais là, tout est fait dans l'urgence, le site de stockage est limité et il ne faut pas faire n'importe quoi ! Ça reste de l'explosif, on ne transporte pas des chaussures. Un accident peut vite arriver si les choses sont faites dans la précipitation", prévient Christian Trapon.

Le nombre d'artificiers ne fait que descendre, encore plus cet été

Christian Trapon

Gérant de Pyragric Nord-Est

Le gérant se dit très inquiet pour l'avenir de sa profession. "Le nombre d'artificiers ne fait que descendre, encore plus cet été. Imaginons que l'année prochaine il n'y ait plus de sécheresse, je ne pourrai même pas faire tous les feux parce qu'il n'y aura plus assez de monde pour les tirer ! On devra alors choisir entre les communes."

Alexandre, vendeur d'engins pyrotechniques pour les particuliers dans le Haut-Rhin, partage le sentiment de Christian Trapon. "L'État fait tout pour tuer notre activité. En nous interdisant de tout vendre, même des produits qui ne sont pas dangereux comme les claques-doigts, c'est comme si l'on nous fermait administrativement. Pourtant, c'est LA période où il faut vendre !"

Le carnet de commandes se vide

Le gérant de Pyragric Nord-Est estime que les 13 et 14 juillet représentent chaque année 80% de son chiffre d'affaires annuel. "Sauf que là, je n'ai plus un appel, plus une commande. D'ici le 15 août, il n'y aura plus de feu."

La voix serrée, Christian Trapon va devoir faire des choix difficiles pour son entreprise. "Je vais devoir réunir mes trois salariés pour leur dire que je ne peux pas les garder. Ça va être radical mais je n'ai pas le choix." Le gérant anticipe des décisions encore plus drastiques sur les usines du groupe.

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