Presque neuf mois après l'incendie qui avait ravagé le data center d'OVHcloud à Strasbourg, vingt entreprises ont lancé un recours collectif contre l'hébergeur de données. Parmi elles, trois entreprises alsaciennes. D'autres devraient suivre.
C'était dans la nuit du 9 au 10 mars 2021. Dans le quartier du Port du Rhin, à Strasbourg, une partie du data center d'OVHcloud s'embrasait. L'entreprise héberge les données de milliers de sites internet, devenus inaccessibles pendant plusieurs jours.
Depuis début novembre, vingt entreprises, dont trois alsaciennes, se sont réunies pour lancer un recours collectif contre OVHcloud. Elles réclament le versement d'indemnités de la part de l'entreprise afin de couvrir les préjudices causés par l'incendie sur leurs sites web. L'objectif annoncé est de trouver un accord à l'amiable et d'éviter que le conflit soit amené devant le tribunal de commerce.
Pour Jocelyn Ziegler, avocat au cabinet Ziegler & Associés, qui représente les vingt entreprises, les propositions de dédommagement de l'hébergeur informatique sont beaucoup trop faibles : "Les entreprises se sentent moquées. OVH leur propose la gratuité de leur services pendant trois ou six mois, ce qui représente un geste de 900€ tout au plus. Mais les préjudices estimés vont de 10.000 à 200.000€."
"Des entreprises ont perdu beaucoup de places dans la concurrence, alors que pour certaines, elles étaient 'number one' dans leur secteur. Le préjudice moral lié à l'image est très important."
Jocelyn ZieglerAvocat au cabinet Ziegler & Associés
Pour atteindre ces préjudices à six chiffres, les entreprises ont comparé leurs chiffres d'affaires avant et après l'incendie, le temps de travail nécessaire pour récupérer les données perdues, ou encore l'impact de leurs pertes de clients suite à l'incident : "Des entreprises ont perdu beaucoup de places dans la concurrence, alors que pour certaines, elles étaient 'number one' dans leur secteur. Le préjudice moral lié à l'image est très important. Elles ont perdu la confiance de beaucoup de clients", ajoute Jocelyn Ziegler.
30 à 40 entreprises devraient s'ajouter au recours
L'avocat précise que la constitution du dossier prendra plusieurs semaines, et que les entreprises touchées peuvent encore rejoindre le recours : "La procédure sera lancée quand le dossier juridique sera bien monté. Et nous attendons encore du monde. Tous les jours, trois ou quatre entreprises m'appellent pour nous rejoindre. D'ici la fin décembre, nous devrions être à 30 ou 40 entreprises."
Le cœur du problème réside dans les back ups, qui permettent de récupérer des données perdues : "La plupart des entreprises avaient souscrit à cette sauvegarde, et s'attendaient à ce que ces données soient récupérables. Sauf qu'elles étaient stockées dans un autre bâtiment de Strasbourg, qui a aussi pris feu. À quoi est-ce que ça sert?", s'interroge Jocelyn Ziegler, alors qu'OVHcloud possède 30 data centers à travers le monde.
Le bâtiment n'était pas équipé d'extincteurs automatiques
Pour sa défense, OVHcloud invoque le cas de force majeure pour caractériser l'incendie. Un argument non recevable pour l'avocat : "Contrairement à ce que dit OVH, l'incendie était prévisible. Le bâtiment aurait pu être mieux conçu, surtout que les étagères de serveurs sont souvent en surchauffe. Par exemple, il n'y avait pas d'extincteurs automatiques."
Jocelyn Ziegler annonce que d'autres entreprises alsaciennes rejoindront le recours collectif dans les prochaines semaines. D'ici là, les vingt entreprises restent inconnues. La procédure sera officiellement lancée en mars 2022.