Insolite : tricot et fromage font bon ménage au Domaine des bufflonnes d'Uhrwiller

Rund Um. Des passionnées du tricot s'installent un samedi sur deux dans le magasin fermier du Domaine des bufflonnes à Uhrwiller (Bas-Rhin). Assises juste à côté du stand de fromage, elles font sensation. Et trouvent parfois de nouvelles recrues parmi les clients.

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Depuis l'été dernier, la ferme du Domaine des bufflonnes d'Uhrwiller s'est dotée d'un magasin à l'extérieur du village, près des étables. Les clients y trouvent diverses sortes de fromage, dont une mozzarella 100% alsacienne, du saucisson et, selon les périodes, de la viande de buffle. Dans ce nouvel espace de vente, il est aussi possible de s'asseoir pour boire un verre, avant d'aller observer les animaux.

Mais deux samedis après-midis par mois, ce coin détente est envahi par une joyeuse bande de tricoteuses. De 14h à 16h30, elles s'y installent avec leurs ouvrages. Intrigués, les clients, et surtout les clientes, se rapprochent pour discuter. Et certaines reviennent deux semaines plus tard, avec leur propre ouvrage à réaliser. 

Un après-midi de tricot, pas un cours

Près de la caisse du magasin, on parle fromage à croûte fleurie, tomme et faisselle. Dix mètres plus loin, autour des tables du petit café, on discute emmanchures, qualité de laine et complexité des points. Les langues s'agitent encore plus vite que les aiguilles, et chacun y trouve son compte.

Les tricoteuses les plus expérimentées aiment partager leur savoir-faire. "Mais c'est un après-midi tricot, pas un cours" précise Céline Zyto, l'organisatrice. "Certaines d'entre nous tricotent depuis longtemps, d'autres ne l'ont jamais fait, ou veulent en savoir davantage. Mais on se retrouve surtout pour être ensemble et passer un chouette moment." 

L'idée de se retrouver dans ce lieu insolite surgit en avril 2022. Céline Zyto, comptable de formation et cliente fidèle du Domaine des bufflonnes, apprend par l'agricultrice, Sophie Christmann, qu'elle envisage "d'ouvrir un magasin avec un espace pour s'asseoir." Un espace également destiné à accueillir quelques animations, à la bonne franquette.  

Ni une ni deux. Passionnée de tricot, Céline Zyto lance donc des invitations via les réseaux sociaux. Et rapidement, la mayonnaise prend. "On a commencé fin août, on était quatre. Et là, voyez" s'enthousiasme-t-elle. Selon les samedis, le groupe oscille entre douze et vingt participantes, dont certaines font une trentaine de kilomètres pour venir.

Sophie Christmann, elle, est ravie de cette compagnie. "De toute façon, le samedi après-midi, je suis là" explique-t-elle. "Les clients qui s'arrêtent boire un café et regarder nos buffles ne restent jamais très longtemps, on a donc suffisamment de place. Et c'est un beau moment d'échange. Un samedi sur deux, je me réjouis en les attendant. Ça crée du lien social." 

Un partage de connaissances

Dans le groupe, les tricoteuses déjà retraitées sont une minorité. "Nous sommes une équipe jeune" sourit Céline Zyto. "Et au final, on arrive à apprendre aux plus âgées à faire des points qu'elles ne connaissaient pas." Ce que confirme la doyenne, Fabienne Fichter, de Niefern : "J'ai toujours cru que je savais tricoter. Mais depuis que je vois les autres, je dis que j'apprends."

Dès la première rencontre, elle a aussi découvert qu'il y avait mieux que ses traditionnelles aiguilles droites : "Toutes travaillaient avec des aiguilles circulaires. Le même soir, je suis allée sur internet pour m'en commander." Et Céline Zyto approuve : "Le tricot circulaire, c'est mieux pour les poignets, car il repose sur les genoux."

Chacune profite de l'expérience des autres. "Moi j'utilise YouTube si je ne comprends pas les explications sur le papier" précise la voisine de Fabienne Fichter. "Je cherche des vidéos pour voir comment faire." Martine Litt, de Betschdorf, présente les innombrables petits colifichets, mini-cadenas en plastique pastel ou chaînettes agrémentées de figurines mignonnes, "renard" ou "écureuil", qui facilitent leur travail. "Ce sont nos aides, nos "bijoux" précise-t-elle.

"Ces marqueurs, par exemple, si on tricote un point en dentelle, on les place toutes les dix mailles, pour nous aider à compter. Ainsi, en cas d'erreur, on défait seulement dix mailles, et pas toute la rangée. Il y a aussi les compte-rangs… Ils sont jolis, ça ajoute de la fantaisie. C'est du chichi, mais ça nous plaît." 

Un autre club de tricot participe

Un autre groupe de tricot se réunit deux fois par semaine, depuis dix ans, à une trentaine de kilomètres de là : l'Amicale des aiguilles et du fil. Trois de ses membres rejoignent régulièrement le groupe d'Uhrwiller. "On vient pour rencontrer d'autres tricoteuses" précise l'une d'elles, Madeleine Kleiber. "Pour nous ouvrir à d'autres nouveautés. C'est le côté social du tricot : sortir, s'informer, apprendre de nouveaux modèles. On était déjà à des festivals à Metz et à Lyon."

Pour fêter ses dix ans d'existence, leur amicale vient d'organiser, mi-avril, un véritable festival de la laine, Bretz'Laine, dans la salle des fêtes de Rittershoffen. Avec une trentaine d'exposants, dont des tricoteuses et des teinturières de laine de renom.

Les clientes sont conquises

Pour la pause-café, Louise, la fille de Sophie Christmann, sert une boisson à ces dames, qui coupent les gâteaux apportés par l'une d'elles. Mais les aiguilles ne s'arrêtent pas, et les clients continuent de défiler. Certains restent concentrés sur leurs achats, d'autres, amusés, lancent des vannes : "C'est fait avec de la laine de bufflonnes ?" Céline Zyto jubile : "On est un peu l'attraction."

Une cliente vient regarder les ouvrages de près, et tout en hésitant parce qu'elle "ne sait pas tricoter", promet de revenir après son déménagement. Une très jeune femme, "venue boire une limonade" avec des membres de sa famille, prend rendez-vous pour le prochain samedi : "Ces dames sont adorables et moi je fais du crochet" explique-t-elle. "Elles m'ont proposé de venir les rejoindre, et je trouve ça intéressant."    

Longtemps perçu comme ringard, le tricot retrouve actuellement ses lettres de noblesse. "Les gens ne tricotaient plus, ils avaient honte. Mais ça explose depuis 4 ou 5 ans" résume Céline Zyto. Elle-même pratique ce hobby depuis 17 ans, et "adore ça. On peut se faire des choses qu'on ne trouve pas dans le commerce. Et quand vous avez terminé, vous pouvez le porter, l'offrir, ça dure dans le temps, et ça peut servir au quotidien."

Selon elle, il s'agirait même d'une activité thérapeutique, qu'elle a commencée lors d'un arrêt maladie, pour "penser à autre chose. C'est comme une méditation. Comme du yoga. On l'utilise pour les problèmes nerveux, les maladies de Parkinson ou d'Alzheimer… Les médecins remarquent que tricoter fait du bien."

En fin d'après-midi, aiguilles et laine retournent dans les sacs. Les dames tricoteuses ne repartent pas, bien entendu, sans avoir fait leurs emplettes. Et certaines font encore un tour à l'étable, histoire de câliner les petits buffles et leurs mamans. Qui ignorent que leurs produits laitiers sont désormais associés à des pulls, des écharpes et des chaussettes. Et, surtout, à beaucoup de convivialité.

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