Publié en 1973 par Tomi Ungerer, le roman pour enfants "Pas de baiser pour maman" trouve une seconde jeunesse grâce à une bande-dessinée, proposée par Mathieu Sapin. Qui confie s'être attaqué à une œuvre du maître avec autant de pression que de plaisir.

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Dans les souvenirs d'enfance de Mathieu Sapin, le petit roman de Tomi Ungerer, "Pas de baiser pour maman" tient une place particulière : d'abord une façon de dessiner, en noir et blanc, pas très courant pour de la littérature jeunesse. Tout comme le ton employé, pas celui habituellement utilisé pour les récits pour enfants. 

"C'est l'un des trois livres de Tomi Ungerer que nous avions à la maison", raconte Mathieu Sapin, né à Dijon, mais d'une maman alsacienne. Et bibliothécaire, ce qui a son importance. Celle de Tomi Ungerer l'était aussi, ce qui a sans aucun doute forgé en partie la destinée de ces deux dessinateurs, à plusieurs décennies d'intervalle.

La relation mère/fils est d'ailleurs au cœur de "Pas de baiser pour maman" : l'histoire de Jo, le chat à l'air renfrogné qui ne supporte plus les mièvreries de l'amour maternel. On y retrouve  la malice et l'impertinence chères à l'auteur-illustrateur alsacien. Et son trait, "qui se serait parfaitement adapté à la BD et qui a sans aucun doute inspiré, même inconsciemment, toute une génération d'auteurs de bandes-dessinées. Son registre correspond bien", estime Mathieu Sapin.

Lui revendique la filiation avec beaucoup de respect. Il n'a d'ailleurs pas eu à travestir son style habituel de dessin pour qu'on y retrouve celui d'Ungerer. "Je n'ai pas cherché à imiter, mais nos façons de dessiner sont proches à la base".

Je n'aurais jamais osé m'y lancer de mon vivant

Mathieu Sapin, auteur de la bande-dessinée "Pas de baiser pour maman", d'après l'œuvre de Tomi Ungerer

Et pourtant, lorsque l'auteur de BD propose à son éditeur, rue de Sèvres (affilié à l'école des loisirs, qui édite pour la France les ouvrages de Tomi Ungerer, NDLR), presque sur un coup de tête, et sans trop croire qu'elle va le convaincre, il a conscience de se lancer "dans un truc de fou. Tomi Ungerer, pour nous, c'est un maître. Je n'aurais jamais osé me lancer dans ce type de projet de son vivant. Et je suis d'ailleurs persuadé qu'il n'aurait pas aimé. La BD n'était pas sa tasse de thé..."

En supplément, la genèse du projet

Il s'y lance avec enthousiasme. Fonce à Strasbourg comme il aime le faire régulièrement, lui qui a passé "dans cette ville pas comme les autres" ses années d'étudiant aux arts déco. Direction le musée Ungerer, où la directrice Thérèse Willer, lui ouvre les portes des réserves pour lui permettre d'accéder aux originaux du roman. "Un moment très émouvant... Les dessins sont fragiles, très fins, sur papier calque, au crayon papier. J'ai eu beaucoup de chance d'avoir eu cet accueil..." 

Une étape importante de son projet, qu'il raconte, un peu comme une aventure, dans un supplément : 16 pages additionnelles que l'on retrouve dans une édition de luxe de son livre.

L'auteur reçoit aussi l'aval des ayants-droits de Tomi Ungerer. Il rencontre sa fille Aria, qui voit d'un bon œil son travail. "Je suis assez surpris, mais aujourd'hui son œuvre est de moins en moins connu des plus jeunes... Il n'a étonnamment pas le même rayonnement que Sempé par exemple, alors que pour moi, il est de la même trempe. Alors si ma BD peut servir à la transmission, j'en suis heureux..."

Une BD qu'il aura l'occasion de présenter aux lecteurs alsaciens du salon du livre de Colmar puisqu'il y sera en dédicaces ce samedi 26 novembre. Une exposition de ses planches est également proposée tout le mois de décembre dans une galerie parisienne, "Un jour, une illustration". Une manière de prolonger son aventure avec le grand Tomi, avant de tourner la page : il n'a pas prévu d'adapter d'autres ouvrages de l'Alsacien, mais vient de se lancer dans un livre pour enfants tiré d'un roman de Daniel Pennac.

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