La sécheresse 2023 s’annonce encore pire que celle de 2022. Des mesures de restrictions d’eau seront certainement prises dans de nombreux départements. L’an dernier, elles avaient conduit à la fermeture de 40% des stations de lavage. Selon l’entreprise alsacienne Eléphant Bleu (Hypromat), cela pousse les particuliers à laver à domicile. Voilà pourquoi c’est une vraie fausse bonne idée.
Ne pas laver sa voiture en période de sécheresse : une idée très répandue, et qui semble issue du bon sens. Même le PDG d’Eléphant Bleu le reconnait : "Quand on passe devant une station de lavage et qu’on voit de l’eau partout, je comprends qu’on se dise « Quel gâchis ! » Mais en fait, on a totalement tort."
Selon Yves Brouchet, laver sa voiture à domicile est beaucoup plus consommateur en eau. 360 litres en moyenne en sortant le tuyau d’arrosage dans le jardin, contre 130 litres dans une station de lavage. Surtout c’est interdit ! (art L1331-10 du code de la santé publique et art. L210-1 et L216-6 du code de l’environnement). Une interdiction destinée à protéger l’environnement, en évitant que les polluants présents sur les véhicules ne se retrouvent dans les sols.
"Dans nos stations de lavage, nous avons un processus de récupération des polluants méconnu des utilisateurs" poursuit Yves Brouchet. "Après un épisode de décantation, les eaux sont déshuilées, « nettoyées » pour en retirer polluants et métaux lourds (arsenic, mercure, plomb)". Pour chaque véhicule, nous récupérons 360 gammes de matière toxique, l’équivalent d’un petit pot de confiture." 95% de l’eau traitée est ensuite renvoyée dans le circuit des eaux usées. "Ce qui veut dire qu’il n’y a pas de perte. Après être restituée au système des eaux usées, elle retournera dans les rivières, dans le Rhin. Quand vous faites la même chose à domicile, non seulement elle est perdue, mais en plus vous polluez".
Des mesures de restriction qui entretiennent la confusion
L’an dernier, au plus fort de l’épisode de sécheresse, le 23 août, 93% des départements de France étaient concernés par des mesures de restriction d’eau. Celles-ci interdisaient aussi bien le lavage des voitures en centre de lavage qu’à domicile. Une aberration pour le patron d’Eléphant Bleu, qui rappelle que les autorités font mine de ne pas savoir que c’est interdit : "Surtout quand on regarde les chiffres, on est totalement effrayé ! L’an dernier, les lavages à domicile ont augmenté de 12% ! Ce n’était pas arrivé depuis 15 ans."
Ne pas laver sa voiture : mauvaise idée
Selon une idée très répandue, ne pas laver sa voiture en période de sécheresse serait une bonne chose. "C’est contre-intuitif" soupire Yves Brouchet. "En réalité, la voiture se lave toute seule. D’abord les polluants qui s’accumulent sur les véhicules tombent sur la chaussée et ne sont pas traités. Et puis en cas d’orage, la pluie va lessiver les véhicules et toutes les matières toxiques se retrouveront dans les sols."
Les mesures de restrictions d’eau ont lourdement impacté la filière en 2022. Alors que les lavages à domicile augmentaient de 12%, ceux en stations diminuaient de 20%. En moyenne, les centres ont subi près de deux mois de fermeture. Et pas seulement dans le sud de la France. "En Alsace l’été a été dramatique dans la vallée de la Bruche avec des arrêts de stations de plusieurs mois", témoigne Yves Brouchet.
L’enseigne demande la révision du Guide sécheresse mis au point l’an dernier. Elle aimerait aussi que la filière (qui représente 24.500 emplois) soit reconnue pour sa fonction de dépollution. Cela permettrait d’envisager de meilleures indemnisations pour les pertes d’activité. Ce vendredi après-midi, une réunion avec plusieurs élus alsaciens a ainsi vocation à faire porter leur voix.