Valéry Giscard d'Estaing et l'Alsace, une longue histoire d'amour

Communément surnommé Giscard ou simplement par ses initiales VGE, Valéry Giscard d’Estaing, président de la République française entre 1974 et 1981 est mort ce mercredi 2 décembre à l'âge de 94 ans. L'homme politique avait eu une relation privilégiée avec l'Alsace. Souvenirs.
 

Familièrement surnommé VGE ou Giscard, Valéry Giscard d’Estaing, président de la République française entre 1974 et 1981, est mort ce mercredi 2 décembre des suites du Covid-19. Il s'est éteint dans sa maison familiale du Loir-et-Cher à l'âge de 94 ans. Né en 1926 à Coblence en Allemagne, Valéry René Marie Georges Giscard d’Estaing a eu des liens privilégiés avec l’Alsace, dès sa candidature à l'élection présidentielle. En 1974, les Alsaciens ont voté pour lui à 66 % des voix, face à François Mitterrand, candidat de l’union de la gauche. Un village du Val-de-Moder, Ringeldorf, a même voté à 100% pour lui au second tour de l’élection présidentielle.


De nombreux passages en Alsace pendant son septennat

La première visite du président Valéry Giscard d'Estaing remonte au 20 mai 1975. Le président de la République, élu un an plus tôt, est venu à Ringeldorf dans le Val-de-Moder (Bas-Rhin) pour remercier ses électeurs d'avoir voté massivement pour lui. Il y aurait bien eu l'un ou l'autre bulletin blanc ou nul, mais tous les votes exprimés étaient en faveur du candidat de l'UDF, Union pour la démocratie française


En compagnie de son épouse Anne-Aymone, le chef de l'Etat a eu droit à véritable bain de foule, composé d'admirateurs et d'électeurs conquis. S'en est suivi, ce 20 mai 1975, une soirée d'exception pour les villageois. Le fils des propriétaires du restaurant où s'est déroulé le repas se souvient parfaitement : "J'avais 19 ans, mes parents Alphonse et Antoinette Muckensturm ont mis à disposition une salle de leur restaurant, qui était déjà fermé à l'époque " explique Jean-Paul Muckensturm. "C'était un événement car on n'a pas un président de la République tous les jours dans son village."
 


"Toutes les personnes inscrites sur les listes électorales ont été invitées ce soir-là" se souvient Jean-Paul Muckensturm. "D'abord pour un apéritif dans une grange voisine, puis pour un dîner au restaurant à "La belle-vue" chez mes parents. Moi je n'avais pas voté en 1974, parce que à l'époque on votait seulement à partir de 21 ans, mais comme Giscard a abaissé l'âge du vote à 18 ans, j'étais fraichement inscrit sur les listes électorales en 1975, quand il est venu chez nous. Donc j'étais invité aussi".
 

"C'était le tumulte à son arrivée, on n'a pas tous les jours un président de la République dans son village."

-Jean-Paul Muckensturm, citoyen de Ringeldorf



"C’était le tumulte avant son arrivée" se souvient celui qui avait 19 ans à l'époque. "La gendarmerie a commencé à tout surveiller deux jours avant. Le convoi est arrivé le vendredi 20 mai 1975 en fin d'après-midi. Après l'apéro dans la grange d'en face, il y a eu le dîner. C'était à la bonne franquette, loin de ce que l’on peut imaginer aujourd’hui pour un déplacement de président. Niveau sécurité, ça n’avait rien à voir."
 


"Lors du repas, il était normal, il a mangé comme tout le monde, il a discuté avec tout le monde. Il faut bien distinguer l'homme public sous les projecteurs et celui que nous avons côtoyé au restaurant ce soir-là. Il était naturel, humain, il ne jouait pas, c'était un moment cool. Et pourtant, pas loin, il y avait une sécurité permanente et quelqu'un de la préfecture qui était en lien direct avec l'armée. On le savait, la malette avec la force de frappe nucléaire était à portée de sa main...Il est reparti vers 23 heures, nous on a continué à faire la fête dans le village jusqu'à 2 ou 3 heures du matin et on est rentré. Le lendemain, c'était fini, on a tout rangé et le restaurant a été refermé. On est passé à autre chose, mais c'est un chouette souvenir. Le commun des mortels n'est pas souvent convié à la table d'un chef d'Etat." 
 

Une rue Valéry Giscard d’Estaing à Ringeldorf

La visite du président venu remercier ses électeurs était un événement qui a, à son tour, marqué l'histoire du village. Depuis cette visite, la rue la plus longue -qui traverse tout le village- porte son nom. Des deux plaques, fixées sur des murs de maisons individuelles à chaque extrémité du village,  l'une a disparue au début de ce mois de septembre, suite à des travaux de peinture. Mais à l'autre bout de la rue elle est toujours là.
 


Blaesheim dans le Bas-Rhin est un autre village alsacien à avoir tenu une place de choix pendant le septennat de Valéry Giscard d'Estaing. Il a même été un village-clé dans la construction de l'amitié franco-allemande. Giscard y a rencontré à deux reprises le chancelier allemand Helmut Schmidt, au restaurant Au boeuf, faisant de l'enseigne le siège de sommets informels. Des dîners devenus symboles de l'amitié franco-allemande. Mais d'autres importantes rencontres ont également eu lieu dans ce restaurant alsacien, entre VGE et le ministre des Affaires étrangères de Grèce, un représentant de Chypre, de Finlande, un ambassadeur des Etats arabes etc. Le livre d'or de l'enseigne regorge de ces signatures illustres.


En 1976, le président de la République a inauguré le tunnel routier, auparavant ferroviaire, entre l'Alsace et les Vosges, en affirmant : "La route est un outil de votre développement et l'objectif de la politique de l'Etat est de servir le développement économique et social de vos régions.
 

1977 : nouvelle visite dans le Bas-Rhin pour Valéry Giscard d'Estaing qui inaugure l'autoroute Paris-Strasbourg. On se souvient d'un chef d'Etat au volant, image d'un président moderne et proche des Français.

L'année 1979 a été celle du plus long voyage de VGE dans les départements alsaciens. Selon ses propos, il est venu "à la rencontre de l'Alsace profonde". Entre Saint-Louis, dans le sud à la frontière suisse et Wissembourg, à l'extrémité nord de l'Alsace, il a tenu quinze discours. L'un d'entre-eux s'est révélé particulièrement touchant pour les Alsaciens, puisqu'il y a soutenu l’idée de la création d’un musée national de l’automobile à Mulhouse : "La collection Schlumpf ne doit pas être dispersée et elle doit rester à Mulhouse."

L'Europe, le combat de sa vie

Né en Allemagne, il aura été, tout au long de sa carrière, un ardent défenseur de l'Europe. En 1957, tout jeune député, il signe un discours marquant à l'Assemblée sur la défense du Traité de Rome. Dès 1977, il assure au maire de Strasbourg de l'époque, Pierre Pfimlin, le soutien de l'Etat à la capitale régionale, futur siège d'un parlement européen élu au suffrage universel direct.

Il sera lui-même député européen entre 1989 et 1993. En 2001, il préside la Convention sur l'avenir sur l'Europe avec, pour objectif, d'établir une "constitution" pour l'Union. Adoptée par le traité de Rome le 29 octobre 2004, elle n'entrera jamais en vigueur en France, sanctionnée par le refus des électeurs lors du réfenrendum du 29 mai 2005.

Cet échec a un goût amer. Il lui rappellera sans doute la défaite de 1981. 1981 : alors que la France bascule à gauche avec l'élection de François Mitterrand, l'Alsace, avec 63% des voix en faveur de l'ancien président, restera fidèle à Valéry Giscard d'Estaing.



 
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