VIDEO. La fête se prépare au couvent

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Sujet Rund um en alsacien sous-titré ©France Télévisions

Le couvent Saint-Marc est niché en pleine forêt, au-dessus de Gueberschwihr. C'est le lieu de vie d'une quarantaine de religieuses. Et le 16 juillet prochain, une association de bénévoles y organise la traditionnelle fête d'été, qui permet de renflouer les caisses.

La petite route qui surplombe Gueberschwihr (Haut-Rhin) grimpe durant environ trois kilomètres. Celui qui l'emprunte pour la première fois a l'impression de s'enfoncer toujours plus avant dans la forêt, sans savoir où il arrivera. Et soudain, devant ses yeux, surgit un monumental mur d'enceinte d'où émergent plusieurs gros bâtiments. Un tableau inattendu, d'un véritable "village" en pleine nature.

Les 43 religieuses qui y vivent appartiennent à la communauté des Sœurs de Saint-Joseph, fondée en ce lieu en 1845 par un abbé de Turckheim, Pierre-Paul Blanck. Celui-ci avait racheté le site quelques décennies après la Révolution.

Aujourd'hui, parmi les sœurs les plus âgées, beaucoup sont alsaciennes. Les plus jeunes viennent d'Inde, de Madagascar et d'Ukraine, où la communauté s'étend actuellement, ainsi qu'en Italie et aux Philippines. 

Le quotidien des moniales se répartit entre prière et travail. "Nous sommes apostoliques à dominante contemplative" résume Sœur Danièle, supérieure de la Grande communauté. Certaines sœurs se relaient toute la journée dans la chapelle, pour l'adoration perpétuelle.

D'autres travaillent à l'infirmerie, ou accueillent des groupes venus pour des séminaires de formation, des personnes individuelles en quête de calme, et des pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle, dont le couvent marque une étape du chemin.

Aujourd'hui vieillissante, la communauté est secondée par une demi-douzaine de salariées, ainsi que par des bénévoles qui viennent prêter main-forte pour certains travaux. "On a un bon groupe d'une douzaine de personnes, principalement des hommes, qui aident au jardin et pour certaines réparations" explique Sœur Danièle. "Il y a beaucoup de choses qu'on ne pourrait plus faire seules."

En parallèle, depuis un quart de siècle, l'association des Amis du couvent Saint-Marc organise diverses manifestations pour faire entrer un peu d'argent. La plus attendue est la fête annuelle, qui se prépare pour ce 16 juillet. Au programme, un repas indien cuisiné par les soeurs, une tombola, de la musique, et de beaux échanges. 

Des lots de tombola fournis par les villages alentour

Mais qui dit tombola, dit lots à collecter. Depuis plusieurs semaines, les bénévoles de l'association ont donc pris leur bâton de pèlerin pour aller quémander des lots auprès des habitants de Gueberschwihr et d'autres communes du secteur.

Parmi les nombreuses personnes sollicitées, la viticultrice Véronique Humbrecht leur prépare spontanément deux bouteilles de vin. "Parfois les sœurs se déplacent elles-mêmes" sourit-elle. "Notre paroisse monte régulièrement dans leur église, donc on les soutient volontiers. Le lieu est beau, c'est toujours un plaisir d'y monter." 

"On est toujours bien accueillis" raconte Jeanne Vorburger, présidente de l'association. "Nous recevons beaucoup de vin, car ici, on se trouve en plein vignoble. Mais nous nous rendons aussi dans les magasins des alentours. Et beaucoup de gens qui nous téléphonent pour réserver le repas nous disent qu'ils apporteront les lots directement au couvent."

Pour la communauté, le bénéfice de ces fêtes est toujours le bienvenu. "C'est une grande aide" reconnaît Sœur Danièle. "Nous avons beaucoup moins de revenus que par le passé, car nous ne gérons plus de centres de soins à l'extérieur. A une certaine époque, nous en avions jusqu'à 120 dans toute l'Alsace." Aujourd'hui, "nous avons juste nos retraites. Notre communauté vit principalement de cela."

L'argent des manifestations orchestrées par l'association des Amis, "c'est avant tout pour les missions." Mais Jeanne Vorburger tient aussi à améliorer le quotidien de la communauté. "On finance ce qu'on peut" affirme-t-elle. "Des travaux, des rideaux, un congélateur, un aspirateur… Le 15 août, on vend aussi des épices venues d'Inde. Et on a déjà organisé un marché aux puces." 

Trois communautés en une

Les 43 sœurs qui vivent au couvent Saint-Marc font en réalité partie de trois communautés distinctes, qui relèvent toutes de l'ordre de Saint-Joseph. "L'une, c'est le provincialat" précise sœur Danièle. "C'est la direction de toutes nos communautés réparties en France. Il y a un provincialat dans chaque pays où nous sommes présentes. Ici il est composé d'une supérieure secondée par une secrétaire, une économe, une assistante et deux ou trois conseillères." 

A côté, la Grande communauté d'une trentaine de soeurs, qu'elle-même supervise. Plusieurs sont très âgées, et les plus jeunes travaillent principalement à l'infirmerie et à l'accueil. Et pour finir, les sœurs de la communauté Thérèse d'Avila, "qui accueillent les gens pour des sessions, ou quelques jours de calme et de prière."

"Ici, on parle l'allemand et le français mélangés dans une même phrase, mitonné d'un peu de haut-rhinois" s'amuse sœur Sophie, membre de Thérèse d'Avila, en train de servir le repas à un grand groupe venu pour une retraite. Originaire de Schleithal (Bas-Rhin), près de Wissembourg, elle-même s'épanouit par cet équilibre entre vie de prière et travail d'accueil. 

"L'adoration me dit qui je suis et qui je ne suis pas" explique-t-elle, rayonnante, en levant les yeux au ciel. "Lui, là-haut, est là et me tient." Puis elle ouvre les bras. "Et pour tous les autres, j'ai de longs bras. Mais ils sont trop courts pour les embrasser tous." 

Un lieu spirituel qui remonte au Moyen-Age

Durant la fête, les visiteurs pourront vraisemblablement découvrir certains endroits d'ordinaire fermés au public. Parmi eux, la splendide voûte de la salle du chapitre, dans le plus ancien bâtiment du couvent. Et, dessous, une vieille cave que des bénévoles ont dégagée des vieilleries qui l'encombraient.

Ces lieux à eux seuls témoignent d'une occupation bien plus ancienne que l'actuelle communauté. En effet, la vocation spirituelle du site serait attestée dès le VIIe siècle. Vers 676, Dagobert II, roi d'Austrasie, fait don d'une relique de Saint-Sigismond à un ermitage déjà présent à cet endroit, lequel prend donc le nom de "Sigismundzell" ("Cellule de Saint-Sigismond").  

En 1050, le pape alsacien Léon IX établit ici des moines bénédictins. "C'est lui qui a donné au couvent le nom de Saint-Marc" précise Sœur Danièle, "après avoir effectué un pèlerinage sur la tombe de Saint-Marc à Venise." Cinquante ans plus tard, une communauté de moniales s'installe à son tour. Mais suite à divers incendies et guerre, de 1368 à 1749, soit durant près de trois siècles, on ne trouve plus trace d'une communauté religieuse sur le site.

Au milieu du XVIIIe siècle, des moines bénédictins reprennent possession des lieux. Mais quarante ans plus tard éclate la Révolution, et en 1791, la propriété est proclamée bien national. Avant de connaître une belle renaissance suite à l'initiative de l'abbé Pierre-Paul Blanck.

Aujourd'hui, ce site à l'histoire mouvementée doit faire face à la lente, mais inexorable, décroissance de la communauté. Un nouveau risque, que Jeanne Vorburger veut contrer coûte que coûte. "Ce lieu me tient à cœur" reconnaît-elle. "Autrefois, quand j'étais petite, je venais toujours au couvent. Ma mère montait ici, mes sœurs également. Je nettoyais les chambres, les vitres. Aujourd'hui je ne peux plus le faire, c'est pour cela que j'ai accepté de présider l'association des Amis du couvent. Et tant que je pourrai, je continuerai."

Pour elle, il faut un engagement sans failles pour que le couvent continue à vivre et à rayonner : "Ce serait vraiment dommage qu'il finisse par fermer. Les sœurs ne sont plus très nombreuses, elles peuvent donc moins faire. C'est pourquoi nous, Gueberschwihrois, nous devons être là et aider."

Une aide très concrète. Ces prochains jours, il y aura à organiser la tombola, installer les tables, accueillir les musiciens et gérer les imprévus. Mais les membres de l'association se préparent aussi à passer d'innombrables heures à éplucher et couper les légumes pour le repas indien préparé par les sœurs. Un repas pour lequel 250 personnes se sont déjà inscrites.  

 

 

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