Alban Préaubert est un ancien patineur artistique de haut-niveau. Devant les premières réactions de Didier Gailhaguet, ancien président de la Fédération des sports de glace, le Carolo a démissionné de son poste au sein de la fédération ce mardi 4 février.
Du haut des gradins de la patinoire Elena Issatchenko de Charleville-Mézières, un grand brun regarde le spectacle avec attention. Ses yeux suivent avec la rigueur du haut-niveau les adolescentes qui glissent sur la glace, venues ce samedi 8 février disputer les championnats de France junior de patinage. Les gestes sont précis, parfois hésitants. Alban Préaubert n'est plus là en tant que cadre de la Fédération française des sports de glace (FFSG). Il a quitté l'institution mardi 4 février, face à l'entêtement de son ancien patron, Didier Gailhaguet. "Je suis là uniquement en amateur de patinage", glisse-t-il. "J'ai déjà vu de très belles choses ici. J'espère qu'on va continuer à voir de belles choses et parler à nouveau de sport", commente dans un hochement de tête celui qui a grandi sur la glace de cette patinoire.
Voilà dix jours que le patinage fait parler de lui. Mais pas "pour la bonne cause", comme le disent les spectateurs venus en nombre. L'ancienne patineuse artistique Sarah Abitbol accuse son ancien entraîneur de viol et d'agressions sexuelles. D'autres patineuses se sont jointes à ses dénonciations et très vite, l'inaction d'un homme est pointée du doigt. Celle du président de la fédération française des sports de glace (FFSG). Ce samedi 8 février, le numéro 1 du patinage présente sa démission, au plus grand soulagement d'Alban Préaubert, ancien cadre de "la fédé", comme on la surnomme.
France 3 Champagne-Ardenne : Comment accueillez-vous la démission de Didier Gailhaguet ce samedi 8 février ?
Alban Préaubert : Je salue évidemment sa démission. Je faisais partie de ceux qui, dans le bureau exécutif de la Fédération, dès mardi soir, avaient émis le souhait qu'il démissionne au plus vite. Il fallait qu'il puisse se défendre sans mêler les sports de glace. Évidemment, vu le contexte et la situation extrêmement tristes auxquels nous avons été confrontés, mes premiers mots vont vers les victimes. J'ai une pensée pour elles, et surtout pour Sarah (Abitbol) que je connais bien. J'étais évidemment très peiné et très touché d'apprendre tout cela. Il faut condamner les coupables et surtout s'assurer que plus jamais de tels faits ne se reproduisent dans des patinoires.
Comment pensez-vous y remédier ?
A.P : Il faut très vite mettre en place des plans d'action. Il faut des cellules d'écoute, continuer à encourager à ce que la parole soit libérée. Démissionnaire depuis mardi, ce n'est pas moi que serai dans l'action. Maintenant, il faut agir le plus vite possible, il y a vraiment urgence. Ces derniers jours, la situation était vraiment très complexe pour les sports de glace. Il fallait absolument que Didier Gailhaguet démissionne.
Vous avez démissionné mardi soir de votre poste de cadre à la FFSG. Pourquoi avoir pris une telle décision ?
A. P : Je ne pouvais pas cautionner le maintien de Didier Gailhaguet à la fédération, même si lui reconnaît des erreurs mais pas des fautes. Aujourd'hui, une enquête va être menée, ce n'est pas à moi de le juger. Il est suffisamment attaqué, je n'ai pas envie de jeter la pierre à quelqu'un qui est déjà à terre. Il a des qualités et des défauts, comme tout le monde. Mais dans le contexte actuel, c'est plus sain qu'il démissionne.
Maintenant qu'il a démissionné, rejoindriez-vous la nouvelle équipe dirigeante ?
A. P : On m'a sollicité mais je n'ai pour le moment aucune ambition électoraliste. J'ai un métier qui me passionne et qui me prend beaucoup de temps. Je suis gérant de portefeuille à Paris, c'est très chronophage et c'est totalement incompatible avec la présidence de la Fédération française des sports de glace.
Il va falloir très rapidement prendre des mesures et repartir sur des bases plus solides et plus saines, plus bienveillantes. Aujourd'hui, j'ai démissionné et j'ai besoin de prendre un petit peu de recul.
Si ce n'est pas pour la présidence, accepteriez-vous un poste équivalent à celui que vous occupiez ?
A.P : J'ai besoin de temps. Il y a encore beaucoup d'incertitudes. La démission de Didier Gailhaguet vient d'être annoncée. Il y a encore peu de visibilité sur ce qu'il va se passer. J'ai besoin de temps pour souffler. Ça a été une semaine très éprouvante pour l'ensemble du milieu, pour tous les gens qui aiment ce sport. Ça a été très douloureux de lire des choses aussi atroces.
On a beaucoup pointé du doigt les choses négatives, mais il y a également beaucoup de positif. Il y a beaucoup de structures saines, de clubs sains, des entraîneurs sains. J'ai eu la chance de grandir, m'entraîner et me développer en tant qu'homme auprès d'entraîneurs extrêmement équilibrés et bienveillants. Je peux citer Elena Issatchenko ici, à Charleville-Mézières, Annick Ancelet en tant que présidente de ce club, Philippe Pélissier, Annick Dumont à Champigny.J'appelle à une union sacrée. J'aimerais que le monde du patinage ne se tire pas dans pattes.
Il ne faut pas tirer à boulet rouge ce qui est existant, mais pointer du doigt toutes les problématiques pour que la parole soit libérée jusqu'au bout.
Vous revenez donc à Charleville pour prendre du recul sur cette affaire ?
A.P : Effectivement, ça fait du bien de rentrer chez soi dans un contexte qui a été aussi lourd cette semaine. Pouvoir dîner avec mes parents vendredi soir, voir des têtes qui me sont familières et bienveillantes. Je pense aussi à mes amis de longue date que j'ai ici à Charleville.
Maintenant que Didier Gailhaguet a démissionné, dans un souci d'apaisement, j'espère qu'on va pouvoir parler sport à nouveau et mettre en place des plans d'action pour se relever.