Une vidéo d’un jeune garçon en train d’être frappé par un groupe de jeunes gens, diffusée sur les réseaux sociaux Snapchat et Twitter, a fait l’objet d’un signalement auprès de la police ce jeudi 2 janvier. Des interpellations ont eu lieu à Charleville-Mézières.
La vidéo est à l’image des faits, odieuse et insupportable. Pendant 45 secondes, on y voit un jeune adolescent en survêtement et blouson se faire harceler puis frapper au visage par des jeunes vêtus de sweats à capuches. Cette vidéo est tournée de nuit, dans une ruelle : la rue Rossat en plein centre de Charleville-Mézières. On distingue six personnes au total. Cinq jeunes sont autour de la victime des coups. Un des individus filme. Deux assistent sans intervenir. Les deux derniers frappent. Des coups à l'abdomen, puis au visage. Le jeune homme tente de s'enfuir en courant mais les bourreaux le poursuivent et le frappent à nouveau en proférant des insultes.
Les faits se sont déroulés en fin d’après-midi ce jeudi 2 janvier 2020 à Charleville-Mézières, aux alentours de 18 heures. Une plainte a été déposée au commissariat central de la police nationale de Charleville entre 21h et 21h 30, juste après les faits. Des interpellations ont eu lieu ce vendredi matin, confirme le procureur de Charleville-Mézières. Des auditions sont menées et des vérifications sont en cours alors que cette vidéo continue de susciter l’indignation sur les réseaux sociaux. Une vidéo de l'agression, toujours disponible en matinée ce vendredi 3 janvier, et même en tête des recherches sur Twitter jeudi 2 janvier vers 23h30. Elle a d'ailleurs déjà été visionnée plus de 980.000 fois. Certains internautes, choqués, diffusent également les adresses, identités et numéros de téléphone des auteurs présumés de cette agression.
Signalement Pharos
La police nationale appelle sur Twitter, à ne pas diffuser ou relayer cette vidéo. "Vous êtes nombreux à nous signaler cette vidéo de violences sur une personne handicapée. Une enquête est en cours. Merci à tous de ne pas relayer cette vidéo". Un signalement auprès de la Plateforme d'Harmonisation, d'Analyse, de Recoupement et d'Orientation des Signalements (PHAROS) a été effectué. Cette plateforme est intégrée à l'Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l'Information et de la Communication. Ce service appartient à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, composante de la Police nationale.[VOS SIGNALEMENTS] Vous êtes nombreux à nous signaler cette vidéo de violences sur une personne handicapée.
— Police nationale (@PoliceNationale) January 2, 2020
Une enquête est en cours.
⛔️ Merci à tous de ne pas relayer cette vidéo. pic.twitter.com/PVGKmKy4cg
Selon des sources policières, la scène a donc eu lieu vers 18 heures ce jeudi 2 janvier, rue Rossat, en plein coeur de la cité de Gonzague, à proximité immédiate de la place Winston Churchill. Cette ruelle, étroite, est située entre la gare de Charleville et la célèbre place Ducale. Elle borde le lycée Saint-Paul et les lycéens sont très nombreux à l'emprunter chaque jour.
Ce vendredi 3 janvier, les trois auteurs principaux ont été identifiés, interpellés et placés en garde à vue. Les deux autres, qui ont assisté à la scène et ne sont pas intervenus, ont été entendus librement. Tous sont des mineurs âgés de 13 à 16 ans, selon le procureur de la République dans les Ardennes, Laurent de Caigny, "et ne peuvent ainsi pas être incarcérés". Et d'ajouter : "Les trois mis en cause seront sans doute présentés à un juge à l'issue de leur garde à vue, qui peut encore être prolongée..." La victime, elle, a reçu deux jours d'ITT (Incapacité totale de travail). "Le jeune homme est surtout choqué mais ne présente pas de séquelle physique" ajoute le procureur.
La personne la plus connue des services de police est... la victime. "Connue pour être extrêmement violente", de source policière. Il s'est illustré notamment dans le cadre des manifestations des gilets jaunes en direction des forces de l'ordre. Légèrement déficient intellectuel, il est reconnu comme personne vulnérable et est placé sous tutelle. Apparemment, il s'agirait d'un rappeur local, connu sur les réseaux sociaux à Charleville. Le différend aurait d'ailleurs éclaté suite à une divergence de goût musical dans le domaine du hip-hop.
"Cette vidéo me glace le sang"
Parmi les réactions locales, celle de Patrick Fostier, proche du maire de Charleville et élu à la métropole ardennaise : "Ces petits salopards sans courage qui se mettent à plusieurs sur une personne fragile méritent une bonne fessée. Si j’en crois twitter ils sont en GAV (garde à vue). Que la justice passe. Sévèrement". Le footballeur ardennais, impliqué dans la lutte contre le harcèlement, Yoann Lemaire, a également dénoncé cette agression : "Cette vidéo me glace le sang, à Charleville-Mézières : un gamin qui se fait agressé minablement par des lâches ! J’espère de tout cœur qu’ils seront retrouvés ! Il faut se sentir en sécurité partout, il faut être intransigeant face aux violents et à ce genre de parasites !"Le fait de filmer une personne en train de se faire agresser et de diffuser ensuite la vidéo sur les réseaux sociaux est un phénomène qui tend à se multiplier en France. Il a été baptisé "happy slapping". La justice sanctionne ce comportement outre le fait de l'agression en elle-même. "Les personnes qui ont filmé se retrouvent complices. Elles risquent une amende de 750 euros, une peine qui peut atteindre 45.000 euros et trois ans d’emprisonnement en cas de blessures graves", évoquaient nos confrères de France 3 Nord, lors d'un cas similaire à Fourmies. Un article du Code pénal qualifie d'acte de complicité "le fait d'enregistrer sciemment (...) des images relatives à la commission de telles infractions".
Mises en examen
Ce samedi 4 janvier, le juge d'instruction du Tribunal de Grande Instance de Charleville-Mézières a mis en examen trois mineurs. Une information confirmée par le procureur de la République Laurent De Caigny. Deux, pour violence en réunion sur personne vulnérable ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à 8 jours. Le troisième pour avoir filmé et diffusé les images d'une scène de violence.Les trois jeunes âgés de 13 à 16 ans ont été placés sous contrôle judiciaire à la sortie de leur garde à vue.
L'instruction judiciaire ouverte tentera aussi de déterminer le rôle de trois autres personnes vues sur les images de la vidéo. Elle déterminera s'il y a lieu ou non de les poursuivre pour non assistance à personne en danger.
L'enquête se poursuit également pour comprendre les raisons d'un tel acte.