Avec la crise du coronavirus, de nombreuses entreprises connaissent des difficultés de trésorerie qui menacent leur existence. L'Etat, les collectivités, annoncent des mesures pour les aider. Cela suffira-t-il ?
 

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Du jour au lendemain, des entreprises ont dû fermer. Progressivement, les frontières ont été bouclées, les transports limités. Une activité presque à l'arrêt : du jamais-vu. "J'ai demandé à cinquante salariés sur soixante-dix de rester chez eux. De toute ma carrière, je n'avais jamais utilisé le chômage partiel. La dernière fois que l'entreprise a fermé, c'était pendant la guerre de 1945", souffle Géraud Spire, chef d'une entreprise de matériaux de construction dans les Ardennes et président de la Chambre de commerce et d'industrie.

Et il n'est pas le seul à subir les effets du ralentissement de l'économie, à cause de la crise sanitaire. "Je fais beaucoup de réunions avec les chefs d'entreprises. Ca va être difficile. Les carnets de commande des entreprises sont en baisse, les frontières sont fermées, il n'y a plus d'approvisionnement en matériaux, les entreprises, surtout les plus petites, les plus récentes, les moins solides, vont avoir de grosses difficultés de trésorerie."
 

Des aides de l'Etat difficiles à obtenir

Il a fallu payer les salaires de mars. Le gouvernement a promis de prendre en charge le chômage partiel, mais les entreprises n'ont pas encore été remboursées. Pour les plus petites d'entre-elles, cela se traduit immédiatement par des problèmes de trésorerie."Nous avons 280 adhérents, des hôtels, cafés, restaurants et discothèques. Les 15 premiers jours, ça a été, les patrons ont payé leurs salariés, mais mainenant ils s'inquiètent pour le mois d'avril, car il n'ont pas encore été remboursés par l'Etat du chômage partiel", note François Béguin, le président de l'Union des Métiers de l'Industrie hôtellière.

Dans les Ardennes, sur 14.000 entreprises, 90% comptent moins de 10 salariés. Ce sont souvent des artisans, des auto-entrepreneurs qui travaillent dans les services, coiffeurs, esthéticiens, commerces etc, leur taille les rend vulnérables. C'est pour eux que les dispositifs d'aides ont été annoncés.

Célia Arnould est masseuse-kinésithérapeute. Elle a ouvert un cabinet dans les Ardennes, à Charleville-Mézières, il y a à peine un an. Avec la crise du covid19, elle ne travaille plus. Depuis la mi-mars, son cabinet est fermé. Elle pensait pourvoir bénéficier de l'aide de 1.500 euros annoncée par l'Etat mais elle ne remplit pas les conditions. "En mars, j'ai fermé à cause du virus. J'ai encaissé tous les actes d'un coup car je ne savais pas ce qui allait se passer. Beaucoup de mes collègues ont fait comme moi. Cela a augmenté mon chiffre d'affaires et je n'ai pas pu faire reconnaître la baisse d'activité liée à la crise. Je n'ai pas eu droit aux 1.500 euros.

Pour le moment, je vis sur mes réserves, j'économise sur tout, mais je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir tenir.
- Célia Arnould, masseuse-kinésithérapeute à Charleville-Mézières

 


François Béguin, lui, est gérant du café-brasserie "Le vert d'eau", dans le centre-ville de Charleville-Mézières. "En un mois, j'ai perdu un chiffre d'affaire de 20.000 euros. Mes deux salariés ont accepté de prendre des congés mais ils sont en chômage partiel depuis le 1er avril. Moi ça va parce que c'est une entreprise familiale mais ce n'est pas pareil pour tous. J'ai un directeur d'établissement qui m'a appelé. Il a 35 salariés. Il m'a dit: "François, je ne vais pas y arriver. J'ai décidé de faire un emprunt de 150.000 euros pour assurer ma trésorerie.""
 

Les experts-comptables demandent une simplification des procédures

Pour Alain Fontanesi, vice-président de l'ordre des experts-comptables de Champagne Ardenne, il y a eu beaucoup trop de flottement dans les annonces du gouvernement. "Notamment les mesures de chômage partiel prévues pour les entreprises qui avaient obligation de fermer, puis pour des entreprises qui ne pouvaient plus travailler. Nous avons monté des dossiers et fait les demandes pour les entreprises mais le site du gouvernement a vite été saturé. Et les Direcctes qui devaient traiter les dossiers, n'ont pas toutes interprété les mesures de la même façon. Or, sans le chômage partiel, les entreprises vont s'écrouler."
 


Même flou sur les aides de 1.500 euros promises aux entreprises. "Beaucoup de chefs d'entreprises ont contacté leur comptable pour en bénéficier. Au final, il y avait des mesures restrictives en fonction du chiffre d'affaires et du salaire du chef d'entreprise. Beaucoup n'y avaient pas droit." Les experts-compables se sont adressés au ministre de l'économie Bruno Le Maire. Ils lui demandent de clarifier les dispositions et de simplifier les procédures.
 

La Région et les collectivités débloquent 44  millions d'euros

Dans l'urgence, pour éviter les défaillances d'entreprises, la région Grand-Est et la banque du territoire ont décidé de mettre en place des aides spécifiques. Le fond, baptisé "Résistance", est destiné aux entreprises de moins de dix salariés et s'élève à 44 millions d'euros. Les collectivités ont soutenu le projet. "Le département des Ardennes et Ardennes Métropole ont voulu contribuer à ce fond en débloquant eux aussi de l'argent, indique Patrick Fostier, vice-président d'Ardennes métropole. La première commission d'attribution se réunira la semaine prochaine. Les prêts à taux zéro pourront aller jusqu'à 20.000 euros. Cela doit aider les entreprises dans une période très difficile." Un fond d'aide qui s'ajoutera aux autres aides de l'Etat.

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