Dès 2017, le projet d’installation d’un "poulailler géant" avait suscité une levée de bouclier dans un hameau de Saint-Morel. Aujourd’hui, le maire du village et l’éleveur piscicole à la tête du mouvement d’opposition, se réjouissent du jugement du tribunal.
L’affaire aura rythmé la vie du village de Saint-Morel, dans les Ardennes, pendant quatre ans. Le 22 juillet dernier, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rendu un jugement qui permettra, peut-être, à ses habitants de tourner la page : les 30 000 poules pondeuses de Sylvain Gouble doivent être évacuées du hameau de Corbon d’ici la fin du mois d'août 2021.
Pour Julien Saint-Sevin, le pisciculteur dont l’exploitation est située à 100 mètres du poulailler géant, c’est un soulagement. Opposant principal du projet, il n’a eu de cesse, depuis 2017, de tirer la sonnette d’alarme, affirmant que l’azote présent dans les fientes des volailles, élevées en plein air, polluaient l’eau de forage qu’il utilise pour renouveler ses circuits. "Deux mois après l’installation du poulailler [en novembre 2020, ndlr], les taux d’azote se sont envolés et les taux de nitrate ont commencé à augmenter de manière importante : ça pose réellement problème pour mon activité", nous expliquait l’éleveur de sandres le lendemain de la décision du tribunal.
Un ping-pong judiciaire de 4 ans
En août 2017, le maire du village, Thierry Deglaire (SE), refuse de délivrer le permis de construire à Sylvain Gouble, agriculteur de Mont-Saint-Martin (Meurthe-et-Moselle). Dans la foulée, une association contre le projet est créée par des habitants. En cause : les risques de pollution, mais aussi la fragilité du chemin rural, qui ne permettrait pas les passages répétés de camions estime l'édile, et les nuisances sonores et olfactives. Cette décision sera annulée un an plus tard par le tribunal, saisi par le préfet des Ardennes… avant d’être finalement confirmée, en juillet 2019.
Aujourd’hui, Thierry Deglaire est satisfait, mais amer : "Quand on voit où on en est, on se dit que c’est une question de bon sens, et surtout de savoir vivre ensemble. Parce qu’il y avait d’autres possibilités dans la commune, et ça, je n’en démords pas !" D’autres terrains, proposés par la commune, auraient été refusés par l’aviculteur.
Sommé d’évacuer les poules avant le 22 août, Sylvain Gouble projette de les abattre. "C’est trop court, nous serons en plein mois d’août : il nous faut trouver un abattoir", affirmait son avocat Christophe Charles dans le quotidien l'Ardennais, à la suite de cette décision de justice. Celui-ci a annoncé vouloir faire appel devant la cour administrative de Nancy et souhaite demander une nouvelle étude d’impact environnemental.