Chaque année, plusieurs milliers d’amphibiens meurent en traversant la route départementale 43, dans l'Aube. La route vers les sites de reproduction présentait tant de risques pour l’espèce protégée, que la décision d’installer un crapauduc, un passage protégé, a été prise.
Le Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient a été ouvert, en 1970. "Dès 1994" explique Thierry Tournebize, le directeur adjoint du Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient, chef du pôle patrimoine, "le site de la route des salamandres a fait l’objet de protection". En effet, le long de la départementale 43, chaque année, du mois de février au mois d’avril, on peut assister à la migration des amphibiens. Grenouilles, salamandres, tritons, crapauds quittent la forêt pour se rendre vers le lac, où se situent leurs sites de reproduction en milieux aquatiques.
Seulement, cette migration n’est pas sans présenter des risques. Sur la départementale, du côté de Mesnil-Saint-Père, les petits animaux sont fréquemment heurtés par des véhicules. Face à ce problème qui concerne une espèce protégée, il fallait réagir. Depuis 26 ans, dès que la période de la migration approche, des bénévoles et des élèves du lycée de Sainte-Maure interviennent pour installer des bâches, des seaux, où tombent les amphibiens. Ensuite, deux fois par jour, des agents du Parc font traverser les animaux dans les deux sens. La mobilisation est à la hauteur de l’hécatombe. Mais bientôt grâce au crapauduc, cela va changer.
Environ 60.000 animaux de neuf espèces recensés
Alizée Agard, est chargée de communication au Parc Naturel Régional de la Forêt d'Orient. "Ces amphibiens, sont très petits, très utiles aussi. Il faut les protéger", assure-t-elle. "On essaie de faire passer le message, à travers des animations". Et des animations, il y en a régulièrement. "Chaque année, ce sont 600 à 800 enfants qui viennent y participer, ils aident à faire traverser les grenouilles et autres amphibiens. C’est un outil pédagogique qui va continuer à instruire les enfants, mais les animations vont évoluer avec l’installation d’un crapauduc", précise Thierry Tournebize.
Cela fait plus de 20 ans que le directeur adjoint du Parc Naturel Régional de la Forêt d'Orient, travaillait à ce crapauduc. Il n’est pas simple de convaincre pour un projet aussi coûteux, puisqu’il va toucher à une route. Tous les aspects techniques d’une telle opération doivent être bien étudiés. "Cet enjeu emblématique dépasse le site lui-même, car certaines espèces menacées, comme celle du triton crêté, font l’objet d’une protection au niveau européen. Et puis, en 2015, lors du dernier recensement, nous avons comptabilisé 60.000 animaux de neuf espèces différentes, sur un site considéré comme un point noir sur le schéma régional de cohérence écologique de la Région Grand Est", poursuit Thierry Tournebize.
Un projet de plus de 600.000 euros
Fabrice Joachim, technicien environnemental au Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient, indique : "Les travaux vont commencer en septembre. C’est le département de l’Aube qui a la maîtrise d’ouvrage". Thierry Tournebize précise qu’ "une convention d’assistance en ingénierie avec le Parc Naturel Régional de la Forêt d'Orient a été signée". Il faut en effet prendre en compte l’aspect environnemental de l’opération. C’est sur ce point que le Parc Naturel Régional de la Forêt d’Orient et ses agents seront un appui technique.
Cette réalisation d’un coût de plus de 600.000 euros devrait être financée à 80% par l'Agence de l'Eau Seine-Normandie, dans le cadre du plan de relance. Les 20% restants seront à la charge du département de l’Aube. Ce crapauduc, ce passage protégé, consistera en un ouvrage hydraulique, un pont-cadre, pour permettre le passage du ru "La Fontaine Colette", et de la faune associée. Mais de chaque côté de la chaussée, il y aura également un caniveau collecteur équipé de neuf passages, pour permette aux amphibiens, guidés vers les buses de traverser la route.
En 2015, lors du dernier recensement, nous avons comptabilisé 60.000 animaux de neuf espèces différentes, sur un site considéré comme un point noir, sur le schéma régional de cohérence écologique de la Région Grand Est.
Une population globalement en hausse
Le crapauduc sera aménagé sur quelque 280 mètres de long. La circulation sera donc interrompue pendant quelques semaines, voire quelques mois, pendant les travaux qui pourront avoir lieu quand il n’y aura pas d’eau, dans le ru. Si la route est fermée, plusieurs déviations seront possibles. 60.000 amphibiens avaient été recensés en 2015. Leur population ne cesse d’augmenter depuis 1995.
Les opérations de déplacement d’un bord à l’autre de la route prenaient beaucoup de temps. En une journée, jusqu’à 6.000 amphibiens ont été transportés, mais, au printemps 2022, les animaux disposeront de leur passage protégé. La réception du chantier est prévue en janvier de cette année-là. Et c’en sera fini des interventions humaines sur la route des sites de reproduction. Les sorties nature, les animations, elles, vont se poursuivre. Surtout, n’oubliez pas que si vous découvrez un amphibien au bord d’une route, il ne faut pas le ramasser. Sinon, il vous en coûtera 1.500 euros d’amende. C’est, en quelque sorte, le prix à payer pour la protection de la biodiversité.