INSOLITE. Une commune expose les déchets sauvages ramassés pour une prise de conscience citoyenne

"Une ville propre, oui, mais ensemble !" : c’est le nom de la nouvelle l’exposition proposée par la municipalité de Sainte-Savine (Aube). Visible sur cinq sites de la ville jusqu’au 4 avril, elle permettra, peut-être, d’interpeler et de sensibiliser la population. 30 tonnes de déchets sauvages sont ainsi ramassés chaque année.

"Bande de sauvages", "A nous la rue" peut-on lire en amorce d'une partie de l’exposition "Une ville propre, oui, mais ensemble !".

Cette initiative, pour le moins originale, de la ville de Sainte-Savine, est aussi un coup de gueule lancé à ces habitants peu scrupuleux. La commune auboise s’étend sur 7,5 km2 et les habitants circulent sur 50 kilomètres de routes communales. Une surface importante lorsqu’il s’agit d’aller récupérer une batterie de voiture jetée au hasard d’un bosquet, ou encore un matelas, du mobilier, des appareils électro-ménagers laissés à divers endroits de la commune. Sans compter les mégots, les déjections canines, les papiers, les cannettes retrouvés par terre. Chaque année, ces déchets sauvages polluent la vie des 10 500 habitants de Sainte-Savine et peuvent parfois être dangereux pour les citoyens et leur environnement.

2,5 tonnes ramassées en un mois

"Quand je pense que, ce matin, cela a été nettoyé et que c’est déjà tout sale", explique Jeannine Mofroy, perplexe. Jeannine habite un immeuble à proximité de containers où, désormais, les habitants viennent jeter leurs poubelles. Depuis leur mise en place, il y a quelques mois, elle constate une recrudescence de dépôts sauvages déposés à côtés de ces bacs. "J’en ai vraiment marre d’avoir cela sous les yeux. J’habite juste en face et j’aimerais bien que cela s’arrête. Tous les jours, on voit des matelas, des cuisinières, des frigos, des gazinières, il y a de tout et j’en ai marre".

Je trouve cela inadmissible que les gens se permettent de balancer sur la voie publique des déchets comme ça. Hier, il y avait encore un frigo ici…

Un habitant de Sainte-Savine

L’exposition "Une ville propre, oui, mais ensemble !" est en place jusqu’au 4 avril. Sur cinq lieux différents de la ville, dont le parvis du centre culturel l'Art Déco, 2,5 tonnes de déchets laissés sur un bout de trottoir ou dans une décharge sauvage, seront visibles. 2,5 tonnes ramassées en un mois. "Les encombrants, c’est à la déchetterie", peut-on lire sur les affiches accrochées au fil de l’exposition.

"J’étais un peu interloqué de voir des WC, des armoires, c’est pour cela que je me suis arrêté, explique un habitant du secteur. Je trouve que c’est une bonne idée. Cela montre aux gens ce que l’on peut trouver dans les rues, tous les objets encombrants". "Je trouve cela très bien, reprend une autre habitante. Comme vous pouvez le voir, en un mois, à Sainte-Savine, on a retrouvé tous ces déchets sauvages. Je trouve cela inadmissible que les gens se permettent de balancer sur la voie publique des déchets comme ça. Hier, il y avait encore un frigo ici… Je pense que, quand on veut, on peut, surtout que la déchetterie est juste au bout de la rue. C’est sûr que pour les gens non véhiculés c’est plus compliqué, mais il y a un service de ramassage qui passe régulièrement". Cette exposition "c’est bien pour sensibiliser et prendre conscience de ce que les gens déposent dans la rue où n’importe où. Il y a mieux comme voisinage qu’un frigo abandonné".    

250 000 euros de budget annuel  

30 tonnes, soit l’équivalent de 15 voitures, sont ainsi ramassées chaque année sur la commune. Et pour que cela soit possible, la ville de Sainte-Savine a mis en place un service dédié aux déchets sauvages. Cinq agents municipaux travaillent ainsi toute l’année à la propreté urbaine. La commune a dû aussi investir dans du matériel spécifique pour nettoyer la ville de fond en comble. Chaque année, elle dépense près de 250 000 euros pour débarrasser les recoins de la commune des saletés déposées. "Ce budget propreté pourrait être affecté à des projets plus utiles, précise Valérie Tiedrez, conseillère municipale déléguée à la transition énergétique de la ville. Malheureusement, chaque année, ce budget doit être augmenté.

Cela se retrouve aussi sur notre feuille d’impôt. 250 000 euros de budget annuel sont dédiés à la propreté urbaine. Si chacun y met du sien, le budget sera moindre où il servira à autre chose de beaucoup plus valorisant.

Catherine Decool, membre du Labo citoyen

 

Le Labo citoyen de la commune est aussi très investi dans la gestion des déchets. En analysant leur volume collecté en un mois, les membres se sont dit qu’ils pouvaient presque reconstituer toutes les pièces de la maison, voire même jusqu’au salon de jardin.  "Ici, c’est un salon, c’est une chambre place du marché, c’est plus une cuisine, place de l’église, raconte Catherine Decool, membre du labo citoyen, du groupe propreté et gestion des déchets. On a eu le choix des objets. C’est pour interpeller les gens. Pour qu’ils se disent : ça n’a rien à faire là. Indirectement cela se retrouve aussi sur notre feuille d’impôt. 250 000 euros de budget annuel dédié à la propreté urbaine, si chacun y met du sien, le budget sera moindre où il servira à autre chose de beaucoup plus valorisant. La propreté urbaine, c’est du ressort de la mairie, mais c’est aussi du ressort de tout le monde. On est tous citoyens".   


Secouer les consciences  

La municipalité tente, à travers cette exposition, le tout pour le tout. "Aujourd’hui, on a essayé d’embarquer les citoyens, reprend Valerie Tiedrez conseillère municipale déléguée à la transition énergétique de la ville. En mai, nous avons aussi la journée de nettoyage citoyenne où on essaye de montrer ce que représente le nettoyage d’une ville. Je pense qu’ils prennent bien conscience lors de cette journée que c’est compliqué. On aimerait aussi que les gens apprennent la seconde main. Il y a des choses qui sont à réutiliser une fois bien nettoyées. Emmaüs, le Secours Catholique récupèrent des choses, les réparent et les revendent".

L’exposition "Une ville propre, oui, mais ensemble !" suffira-t-elle à secouer la conscience de certains habitants de Sainte-Savine ? Avoir sous les yeux, sur la voie publique, leurs déchets pendant quelques jours, mais aussi des informations sur les solutions possibles : déchetterie, dons aux associations, ramassage des encombrants, permettra-t-il de réduire ces incivilités ? La municipalité et la plupart des habitants l’espèrent.

"Et puis, l’ultime recours sera la sanction pour les individus pris en flagrant délit, termine la conseillère municipale. On y arrivera, effectivement, si rien ne change". 

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