La reprise s’est amorcée depuis une semaine au tribunal judiciaire de Troyes. Alors qu’un effectif réduit de personnel a assuré la permanence pendant le confinement, la quasi-totalité des 37 magistrats et 80% des 90 agents du greffe sont revenus. Mais il y a un peu d’engorgement.
C’est l’un des signes que le tribunal de Troyes s’est remis en route. Depuis le début du déconfinement il y a une semaine, l’établissement n’a pas hésité à organiser une session d’assises. Des dossiers en appel venus de Reims et vieux de 2 ans ne pouvaient plus attendre… «Il faut à tout prix éviter l’encombrement», précise le président du tribunal Raoul Carbonaro.
Les audiences en correctionnelle sont également de nouveau menées classiquement. Limitées aux priorités pendant le confinement, elles se devaient d’être assurées avec une diminution maximale du nombre d’individus au Palais. D’où la décision concertée de la présidence et du bâtonnier Maître Caroline Lemeland de nommer trois avocats évidemment volontaires pour représenter les autres. « Ils étaient deux pour la défense des prévenus, un pour celle des victimes. Ils s’entretenaient avec les avocats qui avaient suivi les dossiers puis intervenaient dans les audiences. Ils ont été mis à rude épreuve mais cela a permis d’éviter un grand nombre de renvois dans notre juridiction. Peu de juridictions ont fait comme nous. Mais aujourd’hui la permanence repart comme avant » explique le bâtonnier.
Un retard raisonnable au pénal, plus important au civil
Survenu au moment où le tribunal se remettait tout juste de la grève des avocats contre la réforme des retraites, le confinement aura évidemment un impact sur les délais de convocation. Pour le président du tribunal de Troyes, en matière pénale, le retard est raisonnable. « Les collègues ont eu le temps de repartir avec leurs dossiers pour les étudier à la maison. Dans un rythme normal, il se passe 4 mois entre la sortie de la gendarmerie et l’audience. Il y en aura 6 désormais mais nous allons dédoubler les horaires de convocation et on espère avoir résorbé cela d’ici janvier ».En matière civile en revanche, notamment pour ce qui concerne les affaires familiales comme les divorces, la situation est plus tendue de l’aveu même du président. « Il y aura 6 ou 7 mois d’attente car presque toutes les procédures prévues pendant le confinement dans ce domaine ont été reportées sans date, » explique-t-il.
Conjoints violents évincés mais diminution du nombre de détenus
Pendant cette période, certaines requêtes ont tout de même fait l’objet d’un suivi régulier : celles en vue d’obtenir une ordonnance de protection d’enfants en danger. Les juges aux affaires familiales ont également rendu avec constance les décisions permettant l’éviction d’un conjoint violent.Quant aux juges d’application des peines, ils ont eux aussi été fortement mobilisés pendant cette période pour faciliter les réductions de peines et les libérations avec assignations à domicile, en vue de diminuer le nombre de détenus.
Le taux d’occupation de la maison d’arrêt de Troyes est passé de 110% à 80%, les autres établissements n’étant pas concernés car ils accueillent de plus longues peines.
- Raoul Carbonaro, président du tribunal de Troyes
Nouvelles règles
Depuis lundi dernier la presse est désormais autorisée à suivre les audiences mais seul le public directement concerné par les affaires est accepté dans les salles pour respecter les 4m2 obligatoires par personnes. Le port du masque n’est pas forcé mais il est fortement conseillé à toute personne qui entre au Tribunal. « Pour nos fonctionnaires et magistrats, ils seront distribués car nous venons d’être livrés de 6.000 pièces données par la préfecture » commente Raoul Carbonaro. « Avec les 500 masques tissus que nous a donnés le Ministère de la Justice, nous avons 8 semaines d’activité assurée… Nous attendons aussi des barrières en plexiglas pour les plus petites salles… Les audiences dans les bureaux, en tout cas, c’est terminé. »« Nous conservons également le droit de réaliser les audiences en visioconférences avec les détenus. Ces derniers ne peuvent s’y opposer dans cette période particulière et ce jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire le 10 juillet prochain » conclut le président du tribunal.