Ouvert depuis fin juillet au centre-ville de Troyes (Aube), la taverne des Compagnons de la table ronde propose une immersion totale dans le Moyen-Âge du XII au XVe siècle. Une période sujette aux idées reçues, que le propriétaire veut faire découvrir à travers des breuvages fidèles aux recettes d'antan. Le passionné d'origine troyenne s'appuie pour cela sur les connaissances accumulées lors de ses études d'histoire.
Ypocras, ratafia ou encore hydromel… Ces noms de boissons vous évoquent peut-être une période fort fort lointaine. Si c’est le cas, vous avez vu juste puisqu’il s’agit d’élixirs hauts de gamme du Moyen-Âge, dont la particularité est d’être à base de vin et composé de huit à dix épices.
“Les gens pensent souvent que les épices étaient ajoutées pour cacher le goût, mais c’est complètement faux. Au poids, elles coûtaient plus cher que l’or et le vin était très bon”, raconte le propriétaire des Compagnons de la table ronde, bar médiéval ouvert fin juillet à Troyes (Aube).
Situé au cœur d’un bâtiment datant du XVIe siècle, ce lieu met à l’honneur des breuvages d’antan dans l’univers des tavernes comme il en existait à partir du XIIIe siècle. Avec la volonté, pour Jean-Matthieu Braux, d’être “proche de la réalité et authentique en allant au bout de l’idée”. Voilà pourquoi même la carte sur le site internet, tirée des archives de la Ville, est d'un style moyenâgeux.
Une plongée immersive
Il faut dire que le Troyen, fort de son bagage d’études en histoire du droit et en droit fiscal, s’est principalement appuyé sur des testaments de taverniers pour créer la décoration. D’où le mobilier fait sur-mesure, les produits achetés localement ou les verres exposés, inspirés de la fin du Moyen Âge.
Prochainement, le premier puis le deuxième étage ouvriront également leurs portes pour compléter l'actuelle pièce de 45m2 qui fait salle comble tous les soirs d’ouverture, pour le plus grand bonheur de Jean-Matthieu Braux. “Ça me permet de maintenir des prix corrects”, se réjouit-il.
On a retrouvé dans des textes du XII, XIII et IVe siècles les recettes de l’époque, avec les vins, les épices et le temps de macération.
Jean-Matthieu Braux, propriétaire de la taverne des Compagnons de la table ronde
Passionné depuis son plus jeune âge par cette longue période allant du Ve siècle jusqu’à la fin du XVe siècle, mais spécialiste du XII au XVe siècle, le commerçant explique que les recettes des breuvages sont le fruit de recherches d’une amie historienne. “On a retrouvé dans des textes du XII, XIII et IVe siècles les recettes de l’époque, avec les vins, les épices et le temps de macération”, raconte l’homme de 30 ans.
Des boissons qui font voyager
À l’époque, les boissons avaient toutes pour but de prévenir les maladies, chacune avec une spécificité. Par exemple, l’élixir de roses était connu pour sa vertu apaisante, détaille celui qui est à l’origine d’une thèse sur l’ivresse au Moyen Âge. Une ivresse d’ailleurs plutôt modérée chez les clients des tavernes, “contrairement aux idées reçues”, soutient le propriétaire.
C’est justement pour “casser le stéréotype du Moyen-Âge sombre et plein de maladies” que Jean-Matthieu Braux a souhaité concrétiser cette idée de taverne. Le pari ? “Montrer que le Moyen-Âge était coloré et joyeux, que les gens vivaient vieux”. Pour ce faire, il a acheté un bien foncier à son retour dans l’Aube après des études à Paris et à Toulouse.
Puis, il a fallu s’entourer. Il a alors pensé à Alexandre Boisaubert, une connaissance qui avait l’habitude de servir de l’ypocras maison en soirée et qui a été partant pour l’aventure. L’ancien commercial est ainsi devenu gérant et “tavernier” des Compagnons de la table ronde, situé rue Urbain IV à Troyes.
Sortir des clichés
Un nom tout trouvé puisqu’il se base sur diverses références historiques : les vécus de Chrestien de Troyes et du Pape Urbain IV, et leur passage marquant dans une auberge parisienne du même nom. Ainsi que celui de Jean de la Fontaine qui a débuté sa carrière de poète dans ce lieu qu’il fréquentait avec ses amis, au lieu d’aller à ses cours de rattrapage en théologie.
De la même manière, Jean-Matthieu veut faire de ce lieu un endroit marquant par son ambiance chaleureuse et festive : “Je cherche à m’amuser avec quelque chose qui me fasse plaisir à moi et aux gens”, avance celui qui, chaque soir, fait profiter les clients de ses connaissances historiques. Certains d'entre eux sont des passionnés de la période ravis de vivre une expérience immersive, tandis d’autres sont simplement curieux de l’ambiance et se prêtent au jeu. “On a même des gens qui viennent costumés !”, s’exclame le propriétaire.