Après avoir ouvert son restaurant gastronomique en pleine crise du Covid-19, en septembre 2020, Jean-Paul Braga se retrouve aujourd'hui au bord du gouffre. Comme toutes les entreprises créées pendant la pandémie, il est privé de subvention. Une députée de l'Aube tente de faire changer les choses.
Jean-Paul Braga est passé entre les mailles du filet de la stratégie du “quoi qu’il en coûte”. Après avoir ouvert son restaurant gastronomique, Le Quai de Champagne, en pleine crise sanitaire, en septembre 2020, ce chef cuisinier de 52 ans se retrouve dans une situation économique désastreuse. Sans chiffre d’affaires, l’entrepreneur est privé de subvention de la part de l’Etat.
Six mois sans aide de l'Etat
“On n’entre pas dans les cases, se désole Jean-Paul Braga. On est mis de côté.” Ce “on” se rapporte à toutes les entreprises créées durant la pandémie et qui ne peuvent justifier d’un exercice comptable sur l’année 2019. Sans cela, elles ne peuvent prétendre aux aides de l’Etat. Même si les cas sont rares, “certaines situations sont catastrophiques”, alarme la députée LR de l'Aube, Valérie Bazin-Malgras.
Paëlla à emporter les amis !
Publiée par Le Quai de Champagne sur Samedi 10 avril 2021
Le Quai de Champagne, restaurant situé en bord de Seine, en plein cœur de Troyes, c’est le projet d’une vie pour Jean-Paul Braga. Deux ans de travaux et un investissement colossal d’1,7 millions d’euros. Mais la nouvelle aventure de cet ancien patron de L'Atelier Savoir et Saveur, à Saint-Parres-aux-Tertres, n’a pas pris la tournure souhaitée.
"J'ai vendu ma voiture, ma maison"
“Financièrement, je ne vous cache pas que ça ne va pas très bien, ma trésorerie en a pris un coût, livre le quinquagénaire, après 36 ans d’activité dans le milieu. Pour maintenir son affaire à flot, Jean-Paul Braga a fait d’immenses sacrifices : “J’ai vendu ma maison, j’ai vendu ma voiture... mon restaurant c’est tout ce qu’il me reste.”
Depuis six mois, il continue pourtant de proposer des plats à emporter à sa clientèle. “Tout juste de quoi me sortir un salaire et couvrir mes charges fixes”, explique-t-il. Et loin de faire vivre une équipe d’une quinzaine d’employés qu’il espérait embaucher.
Une députée interpelle le gouvernement
Face à ces difficultés, Jean-Paul Braga a décidé d’alerter les pouvoirs publics. François Baroin, maire LR de Troyes, et la députée LR de l'Aube, Valérie Bazin-Malgras, lui ont rendu visite le 23 avril dernier.
Alertée par cette situation, la députée a interpellé le gouvernement au sein de l’Assemblée nationale. Cette dernière a évoqué un “trou dans la raquette” du dispositif d’aides aux entreprises en temps de Covid-19.
Par la suite, Valérie Bazin-Malgras a obtenu un entretien en visioconférence avec un représentant du ministère d’Alain Griset - ministre délégué auprès du ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance chargé des Petites et Moyennes Entreprise - à l’issue duquel une promesse de décret a été énoncée.
Bientôt un décret pour régler le problème ?
Ce décret devrait ouvrir le fonds de solidarité instauré par l’Etat à ces entreprises pour couvrir 90% de leurs frais fixes (électricité, loyer…). Il sera rétroactif à partir de janvier 2021. “J’ai demandé la rétroactivité depuis le mois d’octobre 2020, mais ils n’ont pas voulu”, précise la députée de l’Aube. Et d’ajouter : “je pense que le décret sortira cette semaine (du lundi 10 mai), mais je reste très vigilante.”
Le gouvernement avait tout simplement oublié ces entreprises créées pendant la crise du Covid-19 et privées du fonds de solidarité.
Le cuisinier Jean-Paul Braga n’est pas le seul dans cette situation. “Il y a également un spa qui a ouvert à Saint-Julien-les-Villas en pleine crise du Covid-19, avec un investissement d’1 million d’euros, fait savoir Valérie Bazin-Malgras. Le gouvernement avait tout simplement oublié ces entreprises."
La réouverture prochaine, un soulagement ?
La réouverture progressive et partielle des cafés et restaurants à partir du 19 mai (ouverture des terrasses avec jauges, couvre-feu à 21 heures) rassure à moitié Jean-Paul Braga. “Nous serons tributaires de la météo, et Troyes, ce n’est pas la Côte d’Azur," rappelle ce dernier. Il faudra attendre le 9 juin pour que les salles puissent rouvrir avec un couvre-feu élargi à 23 heures.
"La crise nous a fait perdre beaucoup de personnes dans le métier. Il y a eu de nombreuses reconversions professionnelles. On ne trouve personne à recruter en salle."
Le restaurateur s’interroge également sur sa capacité à recruter son personnel. “Pour le service en salle, on va partir avec une équipe réduite, car on ne trouve personne, dit-il. La crise nous a fait perdre beaucoup de personnes dans le métier. Il y a eu de nombreuses reconversions professionnelles.”
Dans l’attente des aides financières de l’Etat, et malgré la fatigue, ce fervent défenseur de la cuisine locale et traditionnelle tente de “tenir le choc”. “Si demain j’arrête, je repars à zéro”, lâche-t-il. Mais l’homme n’est, dit-il, “pas du genre à baisser les bras”.