Une œuvre, exposée à l'abbatiale Saint-Arbogast à Surbourg (Bas-Rhin), disparue au début du mois de septembre, a été retrouvée un mois plus tard sur les mêmes lieux. Elle était au cœur d'une polémique auprès de certains qui la jugeaient "pornographique". L'artiste Eric Bal, après avoir été atterré, si dit aujourd'hui soulagé bien que dépité.
Une réapparition miraculeuse. Le "Cantique des cantiques" s'est pour ainsi dire réincarné. L'artiste alsacien Eric Ball a retrouvé son tableau, volatilisé, quasiment à la même place. L'œuvre, exposée à l'abbatiale de Saint-Arbogast à Surbourg (Bas-Rhin), avait disparu à la mi-septembre.
Un mois après, le 15 octobre, en décrochant ses œuvres, quelle ne fut sa surprise. "J'ai découvert le cantique des cantiques posé contre le mur de l'église, à ma vue, pour bien montrer que le tableau était là. Je n'ai pas d'explication, mais je soupçonne quelqu'un de l'église".
Parmi les douze œuvres présentées par Eric Ball, dans le cadre du 25ᵉ Chemin d’art sacré, avec l'appui du diocèse de Strasbourg, la gravure "Le Cantique des cantiques" faisait l'objet de vives critiques de la part de certains visiteurs. La gravure de l'artiste représente deux corps nus s'enlaçant. "L'œuvre parle d'amour et de tendresse bien plus sagement que les textes du cantique des cantiques qui vont plus loin dans le détail du charnel". Mais pour certains, c'est déjà trop.
Cachez ce tableau qu'on ne saurait voir
Le tableau, jugé pornographique et blasphématoire, avait d'abord été décroché puis fait l'objet de dégradations. Sur le livre d'or de l'exposition, des visiteurs avaient menacé et insulté son auteur. Celui-ci a porté plainte deux fois, pour dégradations et pour vol.
"Je suis content d'avoir retrouvé l'œuvre, mais sur le fond, je me dis que quelqu'un l'a cachée pour ne pas qu'on la voie. On l'a salie alors qu'il n'y avait pas de quoi polémiquer. C'est comme si on me disait 'voilà, vous pouvez reprendre votre tableau, on a bien réussi à le cacher le temps de l'exposition'. C'est inadmissible."
C'est une atteinte à la liberté d'expression, on n'a pas le droit de censurer un travail sous prétexte qu'il dérange.
Eric Ball
Eric Ball n'a pas retiré sa plainte. Même s'il a retrouvé son œuvre, l'auteur du méfait court toujours et la plaie n'est pas refermée. "Il y a une espèce de lâcheté, d'hypocrisie de la part de cette personne. On se sent impuissant. C'est une atteinte à la liberté d'expression, on n'a pas le droit de censurer un travail sous prétexte qu'il dérange".
Si l'œuvre avait été vraiment volée, Eric Ball se sentirait mieux. "Cela m'aurait fait plaisir à la limite qu'on me la vole. Qu'elle plaise pour être accrochée chez quelqu'un, là j'aurais pardonné au voleur".
Aujourd'hui, le Cantique des cantiques repose dans l'atelier de l'artiste. "Il est fait pour être exposé, mais quand je vois les réactions, ce ne sera peut-être pas pour demain". Ni dans un lieu religieux, souligne Eric Ball.