La mairie de Schiltigheim, dans le Bas-Rhin, a annoncé avoir suspendu la procédure de reconversion du site de Heineken, dont la fermeture est prévue pour 2026. L'appel d'offres ne reprendra pas tant que le tracé définitif du tram Nord de Strasbourg n'est pas fixé.
Le choc de l'avis défavorable de la commission d'enquête sur le projet de tram nord à Strasbourg, en décembre 2024, continue de produire ses effets. Ce mercredi 29 janvier, l'Eurométropole a annoncé dans un communiqué que l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour la reconversion du site historique d'Heineken, à Schiltigheim, était clôturé "sans désigner de lauréat". "L'avenir de ce site ne peut pas être décidé sans savoir ce que sera précisément le tracé du futur tram", a justifié ce jeudi devant la presse la maire de Schiltigheim, Danielle Dambach.
Selon l'édile, dans la mesure où il est encore "possible" que le tracé décidé "passe sur le site", il n'est pas possible de "promettre des choses aux entreprises puis de revenir dessus quelque temps plus tard". Ce projet de tram, qui devait donc densifier le réseau de transport du secteur nord de Strasbourg, était le dossier majeur du mandat de la municipalité actuelle. Le tracé avait été choisi et fixé, les travaux devaient même être lancés ces prochains mois. Mais l'avis défavorable de la commission d'enquête a tout remis en cause.
Si la Ville de Strasbourg n'a pas encore communiqué sur l'avenir du projet, les quartiers et les communes traversées par le tracé initial sont aujourd'hui dans le flou. "C'est l'avenir de Schiltigheim qui est en jeu là, note Danielle Dembach. On poursuivra le travail une fois que le projet de tram sera clairement défini."
Un argument de poids dans l'élaboration du futur tracé du tram
L'usine d'Heineken, ouverte depuis 1862 et emblématique du passé industriel de la ville, avait annoncé la fermeture prochaine de son site fin 2022. Si l'avenir des 220 salariés a, semble-t-il, été réglé par un accord interne après des semaines de grève, celui du site, en revanche, restait en suspens. Des logements ? Une nouvelle brasserie ? D'autres secteurs industriels ? Plusieurs collectivités s'étaient mobilisées aux côtés du propriétaire, Heineken, pour assurer la reconversion du site via cet AMI. Un cahier des charges précis avait été défini. Environ une trentaine de candidatures avaient été reçues, dix d'entre elles avaient été auditionnées. "Il ne nous restait finalement que deux entreprises sur notre short-list, révèle ce jeudi Danielle Dambach. Deux propositions très riches et intéressantes."
Mais les deux candidats devront prendre leur mal en patience. Danielle Dambach en est "persuadée", ils ne perdront pas leur intérêt pour le site malgré ces nouveaux délais. "Et même si l'une d'entre elles abandonne, il y aura sûrement d'autres candidats à l'époque où nous reprendrons le travail", assure l'édile. Trois, quatre, cinq ans, voire plus : conditionner le projet de reconversion d'Heineken aux échéances aléatoires et souvent très longues d'un dossier d'aménagement du territoire, c'est un pari indéniablement risqué. "Mais il est aussi impératif de donner la parole aux habitants", insiste Danielle Dambach.
Maintenant que l'on sait que le site sera disponible à partir de 2026, peut-être que les habitants souhaiteront que le tram passe à ce niveau ?
Danielle Dambach, maire de Schiltigheim
L'élue rappelle que la population locale avait certes pu donner son avis lors de la concertation sur le tracé du tram la première fois, mais c'était en 2021, "à un moment où Heineken n'avait pas encore annoncé la fermeture". "Maintenant que l'on sait que le site sera disponible à partir de 2026, peut-être les habitants souhaiteront-ils que le tram passe à ce niveau ?"
Que l'avenir d'un site symbolique et potentiellement riche en emplois dépende du futur tracé du tram : voilà un argument de poids pour Schiltigheim en vue des prochaines discussions. S'agit-il là d'un coup politique, à quelques mois des prochaines municipales ? "La parole est aux habitants", martèle Danielle Dambach, en précisant que la décision de suspendre la reconversion a été prise "de manière unanime" entre les collectivités publiques et le propriétaire des lieux, Heineken.