Assassinés en une nuit dans ce camp de concentration, 146 résistants ont été honorés 80 ans après

Le centre européen du résistant déporté commémore samedi 31 août sur le site du Struthof l'assassinat par les nazis de 146 résistants dans la nuit du 1ᵉʳ au 2 septembre 1944. Un travail a été fait pour retrouver les photos de la plupart de ces femmes et hommes courageux, membres du réseau Alliance et du Groupe mobile d’Alsace-Vosges.

"On commémore aujourd'hui l'assassinat des membres du groupe Alliance et GMA Vosges", explique Sabine Bierry, directrice du mémorial Alsace-Moselle à Schirmeck (Bas-Rhin). Une commémoration a été organisée, samedi 31 août 2024, conjointement par le mémorial de Schirmeck et le centre européen du résistant déporté du Struthof. Les deux sites alsaciens sont liés par cet événement tragique qui a eu lieu dans la nuit du 1ᵉʳ au 2 septembre 1944, il y a 80 ans.

De mars à juin 1944, les autorités nazies envoient les résistants arrêtés dans toute la France par convois au camp de sûreté (Sischerungslager) de Vorbruck-Schirmeck, leur présence y est tenue secrète : 106 membres du réseau Alliance, un réseau de renseignement de la Résistance sont détenus. 

En août 1944, les nazis organisent de nombreuses rafles dans le massif des Vosges, notamment à Moussey (Moselle). 35 hommes du Groupe mobile d'Alsace-Vosges sont maintenus en détention au camp de Schirmeck.

Assassinat de 146 résistants en une nuit

"Tous subirent des interrogatoires brutaux des policiers de la Sipo-SD de Strasbourg", précise les organisateurs de la commémoration. Les troupes alliées avançant vite en France, les nazis décident d'évacuer le camp de concentration de Natzweiler-Struthof, au début du mois de septembre 1944.

L'assassinat des 146 résistants eut lieu dans ce contexte. Ils furent tous transférés du camp de Schirmeck à celui du Struthof dans la nuit du 1ᵉʳ au 2 septembre, puis exécutés d'une balle dans la tête. Leurs cendres furent dispersées par les nazis pour effacer toute trace. Une plaque a été posée, bien des décennies après, pour que leurs noms restent gravés dans la mémoire du Struthof.

Des recherches ont été faites pour tenter de mettre un visage sur chaque nom de résistant. Des collégiens de La Broque (Bas-Rhin) ont posé une rose devant chacun des 146. Un chœur d'hommes a entonné le chant des marais et la chanson de Jean Ferrat, Nuit et Brouillard. Plus de 600 personnes, dont plus de 300 proches des résistants, ont assisté à cet hommage.

Jacques Stosskopf, un résistant au cœur de l'arsenal de Lorient

Parmi les résistants honorés au Struthof, il y a Jacques Stosskopf. Né et marié en Alsace, il travaille de 1939 à 1944 à l'arsenal de Lorient. Ingénieur, il occupe le poste de chef des constructions neuves. Il a renseigné la Résistance pendant toute cette période, et son nom a été choisi pour nommer un nouveau navire de la Marine nationale qui sera inauguré bientôt.

Son commandant, le capitaine de frégate Sébastien Fajon est venu au Struthof pour la commémoration, il explique pourquoi le nouveau bâtiment ravitailleur de force porte son nom : "Jacque Stosskopf était alsacien et parlait allemand, donc ça lui a permis de récupérer, en tant que chef des constructions neuves de l'arsenal, des informations auprès des Allemands et de les redonner au réseau Alliance. Il a pu collecter des informations importantes sur la construction des U-Boot [sous-marins allemands, NDLR], sur leurs emplacements et leurs sorties." 

"Chaque jour, il mettait en danger sa vie en distillant ces informations", continue le capitaine de frégate. "Il gardait tout en mémoire pour éviter d'avoir des traces écrites. Et il avait une double vie, un double rôle puisqu'il voulait protéger sa famille et son entourage. Ses actes de résistance ont duré quatre ans." 

"Il incarne de belles valeurs, celles du dévouement, du courage, du don de soi, qui sont des valeurs très importantes aujourd'hui pour nous", conclut-il.

Jacques Stosskop a eu deux enfants, François et Elisabeth. L'aîné de ses petits-enfants porte le nom de son grand-père, et il était présent à la cérémonie d'hommage.

"Cette histoire, mon père en a extrêmement souffert, il n'en parlait quasiment pas, voire pas du tout. Il a renoué avec sa mémoire en 1998, au 100ᵉ anniversaire de la naissance de son père, et il s'est fait un devoir de se replonger dans toute cette histoire. Avec sa sœur Elisabeth, ma tante, il a écrit un livre qui retrace l'histoire de mon grand-père."

"Je pense à lui aujourd'hui, il est décédé il y a 10 jours. Il espérait pouvoir venir à cette cérémonie". Le petit-fils est aussi très heureux qu'un navire porte le nom de Jacques Stosskopf : "c'est pour nous une fierté et une reconnaissance."

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