Coronavirus : le retour en grâce du bon vieux hygiaphone, produit en Alsace, pour éviter les contaminations

Avec la crise sanitaire du Covid-19, l’hygiaphone, système vitré antivirus, inventé après une épidémie de grippe en 1946, fait son grand retour. Les ateliers de l’entreprise Fichet de Baldenheim, (Bas-Rhin), propriétaire de la marque, tournent à plein régime.
 

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On le croyait avoir disparu depuis une bonne vingtaine d’année et pourtant. En plein bouleversements technologiques induits par la crise sanitaire actuelle, il convient nécessairement d’évoquer le retour en grâce d’un produit qui s’apprête à envahir de nouveau notre quotidien : l’hygiaphone. L’hygia…quoi ? Mais si… cette vitre dotée d'une membrane acoustique, qui permet la communication entre deux personnes à un comptoir de gare, de poste, de banque tout en évitant la projection de microbes et les agressions de toute nature.

Un produit devenu le symbole des guichets d’antan, popularisé en 1977 par Téléphone et son tube "Hygiaphone"… alors ça vous revient maintenant ?
 
"Comme ça à s'regarder chacun de chaque côté, on a l'air de mérous coincés dans l'aquarium. Mais faudra qu'entre nous je casse la plexiglas. (…) Parlez, parlez dans l'hygiaphone", chantait Jean-Louis Aubert sur le tout premier album du groupe.

Aujourd'hui, Hygiaphone est une marque déposée, détenue par le groupe Bas-rhinois Fichet, 128 millions d'euros de chiffre d'affaires. Un groupe bien décidé à lui donner une nouvelle notoriété, surfant sur un rebond exponentiel des commandes et sur une histoire qui ne date pas d'hier. 
 

L'hygiaphone ne connaît pas la crise


Vous l'aurez compris, l’hygiaphone n’est pas tout jeune. Il a même plus de 70 ans au compteur. En 1946, une grippe H1N1 venue de Chine se répand et fait de nombreuses victimes en France, notamment au sein de la SNCF, où les agents de ventes présents derrière les guichets furent particulièrement touchés, entrainant une forte baisse de productivité pour l’entreprise. Face à cette situation, l’ingénieur André Bourlier inventa le concept "passe-son Duetto" qui protège les guichetiers et enraye l’absentéisme.  
 

Le voyageur pourra être beaucoup plus agressif parce qu'il s'adresse à une vitre, à un distributeur
- Un employé SNCF, dans les années 90 -


L’Hygiaphone, qui devient une marque déposée, est né. Dès lors, s’ensuit un incroyable succès. Le produit évolue au fils des années, trouve d’autres utilités. En 1968 notamment, une gamme résistant aux attaques à main armée, davantage destinée aux milieux bancaires et postaux se développe. Mais, à la fin des années 1990, le système a du plomb dans l’aile. Les entreprises cherchent à décloisonner leurs espaces d’accueil, faciliter le contact client. Elles ont de moins en moins recours aux protections vitrées qui deviennent désuètes, voire handicapantes.

Dans ces années-là, au cours d’une interview diffusée dans l’émission "Grand Angle", relayée depuis par France Culture, un employé de la gare d'Austerlitz témoigne :

"Quand il n'y a pas d'amplificateur c'est très gênant aussi parce qu'il faut toujours forcer la voix, parler fort… c'est fatiguant, notamment en fin de journée. Au guichet c'est une position très inconfortable pour tout le monde. Le voyageur pourra être beaucoup plus agressif parce qu'il s'adresse à une vitre, à un distributeur… "Qu'il se dépêche" !"

"Tu n'entendais pas la moitié de ce que les gens disaient derrière le comptoir. C'était comme des bunkers en face des clients"
, ajoute aujourd'hui un ancien employé de La Poste.

Pour autant, tout n’est pas terminé pour la protection vitrée. À la même époque, l’Hygiaphone continue de se développer pour équiper les grands espaces et les secteurs à haut risque : ministères, ambassades, consulats, banques, grands magasins, stations-services, parking publics, stades et parcs des expositions.
 

L'open space qui est venu dans les anénes 90 a fait sauter les barrières physiques, et aujourd'hui, on les remet
Philippe Schlatter, directeur du site -
 

Dans la crise sanitaire actuelle, le produit retrouve son rôle premier, empêcher la transmission de germes pathogènes et des microbes et s’offre une deuxième jeunesse. L’usine de Baldenheim tourne à plein régime.

"Les appels d’offres en consultation ont augmenté de 40% depuis mi-mars. De nouveaux clients arrivent, les bureaux de poste et les mairies notamment, veulent se protéger parce que ce sont des lieux ouverts au public. On a une modulation, de flexibilité qui nous permet de répondre à la demande", confirme Philippe Schlatter, directeur du site. Quid de l'après-virus? "La marque renaît au travers de la crise sanitaire. On se sait liés à un phénomène de panique. Dans 6 mois, un an, aura-t-on des récations différentes? On verra bien", avance-t-il encore.

En attendant, l'entreprise alsacienne entend se battre contre les "dérivés" de son produit emblématique, qui semble avoir influencé des équipements de protection contre le Covid-19, comme ces écrans en plexiglas fabriqués grâce à des imprimantes 3D par des industriels ou des particuliers, qui n'hésitent pas parfois à les baptiser "visières hygiaphone".
 
"Hygiaphone, comme c'est un nom connu de tous, beaucoup l'utilisent aujourd'hui à mauvais escient. Un morceau de plexiglas, ça protége du virus mais ne permet pas d'avoir un échange de son", prévient encore le directeur. N'est pas Hygiaphone, qui veut donc. 

 
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