Attendue avec impatience, appréhension, et excitation, la réouverture des magasins non-alimentaires est un soulagement pour beaucoup de commerçants strasbourgeois. Ce lundi 11 mai, premier jour du déconfinement, nous les avons rencontrés... Paroles de commerçants déconfinés.
Après 55 jours de confinement et des semaines de préparation, les commerces ont pu rouvrir ce lundi 11 mai 2020. A Strasbourg, les commerçants sont unanimes. Il était urgent, vital même, de retrouver un semblant de vie normale. Un semblant, car rien n'est plus comme avant dans les magasins de la capitale alsacienne.
"Je suis ravie, heureuse". Ravie de retrouver pour la première fois depuis deux mois, le chemin du travail. Julie Waydelich, gérante du salon de coiffure strasbourgeois Natural Concept, a ouvert ce lundi 11 mai à 9h00. Son salon est resté fermé durant 55 jours comme les nombreux commerces impactés par le confinement. Du jamais vu en 17 ans d'existence. Alors ce matin, c'est l'excitation des premiers jours. "J'avais hâte de retrouver mon équipe, mes clients" explique la coiffeuse. Excitation mais aussi appréhension. Car il fallut tout repenser dans le salon. Le sens de circulation, l'espace pour chaque coiffeur, pour chaque client. "Nous avons installé des plexiglass entre les bacs à shampoing et au niveau de la caisse aussi. Le port du masque est obligatoire dans le salon. Pour les coiffeurs comme pour les clients.
Voilà trois semaines que Julie Waydelich prépare la reprise. Trois semaines pour trouver le matériel indispensable. Le parcours du combattant pour se faire livrer masques, gels hydroalcooliques, produits désinfectants, en temps et en heure."Je devais ouvrir le salon pour reprendre l'activité. C'était urgent, vital." Pour la première fois, Julie Waydelich a eu peur pour son entreprise. Malgré les aides de l'Etat, la trésorerie a fondu comme neige au soleil. "Seule la reprise peut nous permettre de sortir la tête de l'eau. Et heureusement, les clients sont là". La gérante a dû aménager les horaires. "Aujourd'hui nous ne pouvons accueillir que 3 clients en simultané contre 6 auparavant. Nous avons décidé d'allonger nos plages horaires de travail pour pouvoir accueillir un maximum de monde." Le salon croule sous les demandes de rendez-vous. Plus aucun créneau disponible avant le mois de juin.
Le salon a gardé le contact durant le confinement avec ses fidèles clients sur les réseaux sociaux notamment.
"On compte sur les clients pour respecter les mesures de sécurité"
De l'autre côté de la Grande-Ile, dans ce magasin dédié aux objets de décoration pour enfant et bébé, on a levé le rideau à 12h00 ce lundi. Mais en coulisses, la responsable du Petit Souk travaille depuis le début de la matinée. "Il faut mettre en place un sens de circulation. Pour que les 4 clients maximum autorisés ne se croisent jamais. Et dans un magasin comme le nôtre, très petit, c'est un casse-tête pour faire respecter le 1m de sécurité" explique Claire Hoarau. La responsable qui ne veut prendre aucun risque. Ni pour ses clients, ni pour ses collaborateurs. "Nous avons mis en place tout un protocole de sécurité, on compte sur nos clients pour le respecter. C'est important pour eux, mais aussi pour nous qui sommes exposés".
38.000m2 à désinfecter tous les jours
Même casse-tête, mais à une autre échelle. Le centre commercial Rivetoile. Ce lundi, un peu près d'un tiers des 75 boutiques ont rouvert leurs portes. 38.000m2 à sécuriser. A désinfecter. "Nous avons renforcé nos équipes de nettoyage. Tous les espaces sont désinfectés tous les matins. Les sanitaires plusieurs fois par jour" précise la directrice du centre Stéphanie Beck. Ici, le port du masques ou du moins la protection faciale avec visière ou écharpe est obligatoire. Les clients sans protection sont invités à acheter des masques en pharmacie ou dans la grande surface. "On se rend compte en ce premier jour de déconfinement que les clients jouent le jeu. La très grande majorité se couvre le visage."
Et l'affluence est satisfaisante. A 16h00, le nombre de passages dans le centre dépassait celui de lundi dernier (en confinement). "On ne s'attendait pas à une affluence conséquente. De toute façon, nous avons des seuils à ne pas dépasser pour des questions de sécurité. L'essentiel pour nous, c'est de revoir nos clients et s'assurer de leur sécurité et de celles des 750 personnes qui travaillent avec nous". Ce lundi 11 mai, le centre commercial a fait 50% de son trafic normal avant le virus.
La peur du virus encore présente
Premier jour de déconfinement et dans les commerces strasbourgeois, ce n'est effectivement pas la foule des grands jours. Il faut dire que la météo est exécrable. Digne d'un mois de novembre. Pour Pierre Bardet, le directeur général des Vitrines de Strasbourg, l'association qui regroupe plus de 700 commerces de la capitale alsacienne, "les acheteurs sont prudents. Ils vont sans doute mettre quelques jours, quelques semaines avant de sortir". Des acheteurs qui ont besoin d'être rassurés sur les conditions d'accès dans les magasins. Et pourtant l'économie locale n'a jamais eu autant besoin des Strasbourgeois. Sans touristes, les locaux sont les seuls à pouvoir sauver les commerces. "Mais la peur du virus est encore bien présente et c'est normal" ajoute Pierre Bardet. Les boutiques n'ont pas pu toutes ouvrir ce lundi. Certaines ouvriront mardi, mercredi, la semaine prochaine. "Les ouvertures vont s'échelonner sur plusieurs jours, le temps pour chacun de s'organiser, de mettre en place un protocole de sécurité".La réouverture des commerces est un soulagement pour ceux qui en vivent. Pour autant, c'est une période faite d'incertitudes qui s'ouvre également. Personne n'est, à l'heure actuelle, en mesure de prédire à quelle allure l'activité va reprendre et si le confinement n'aura pas des répercussions durables sur le moral des consommateurs.