Depuis des mois, les fourmis invasives "tapinoma magnum" sont responsables de beaucoup de désagréments à Kehl, ville allemande frontalière proche de Strasbourg. Pour essayer d'endiguer la propagation, la ville a investi dans du matériel visant à détruire les nids.
Une lance sous pression envoie de l'eau bouillante dans les fourmilières. Cette méthode très radicale est devenue le seul recours pour essayer de stopper l'invasion de tapinoma magnum à Kehl. Dans le village de Marlen, rattaché à Kehl (Allemagne), ces petites fourmis invasives sont présentes sur deux à trois hectares.
Pour les habitants, c'est un cauchemar. Sensibles aux vibrations qu'elles prennent pour des agressions, elles mordent les pieds et les mollets, et détruisent aussi beaucoup de plantes ou d'arbres fruitiers, un désastre dans les jardins. Et elles s'introduisent aussi dans les compteurs électriques, provoquant dégâts, coupures de courant ou de réseau internet.
Une habitante raconte : “c’est terrible, les fourmis sont partout, dans les maisons, dans les garages, partout. Je suis parfois dehors pour tenter de les brûler. Je suis contente que la ville fasse quelque chose et essaie de nous aider, mais je n’y crois pas trop.”
La municipalité a investi 50 000 euros dans l'équipement qui permet de détruire les fourmilières installées en profondeur dans le sol. Premier essai mi-septembre sur l'aire de jeux de Marlen, à l'abandon depuis plusieurs mois à cause des insectes. Mais pour Gregor Koschate, chargé de l'environnement, il n'y a pas de solution miraculeuse à attendre.
Avec cette méthode, on n’a pas l’espoir d’éradiquer les super colonies, on essaye juste de les limiter.
Gregor Koschate, chargé de l'environnement, mairie de Kehl
“Ce sont seulement des mesures pour essayer de limiter la propagation", explique-t-il. "Avec cette méthode, on n’a pas l’espoir d’éradiquer les super colonies, on essaye juste de les limiter. On compte surtout sur la recherche scientifique pour trouver des solutions vraiment efficaces."
/regions/2021/06/29/60db35a333c94_img-0439-1-5378372.jpg)
Les villes mettent souvent du temps à se rendre compte du problème. Ces fourmis originaires du sud de l'Italie ou de Libye ressemblent beaucoup à l'œil nu à nos fourmis endémiques.
Autre problème, la tapinoma magnum peut regrouper plusieurs centaines de reines dans une méga colonie. Les fourmilières sont enterrées à un mètre de profondeur, le réseau de galeries peut s'étendre sur des centaines de milliers de km². Alors que les fourmis classiques ont une seule reine par fourmilière.
La ville de Kehl commence à recenser d'autres dégâts plus graves. "Ces fourmis s'introduisent partout", explique Annette Lipowsky, responsable de la communication pour la mairie de Kehl. "Entre les pierres d'un mur, sous les trottoirs. On a des dégâts importants dans les trottoirs, les enfants ne peuvent plus jouer dans les aires de jeux. Certains habitants veulent même vendre leur maison et partir, mais qui va acheter une maison dont le jardin est infesté de fourmis ? C'est un problème complexe pour la ville de Kehl."
Toutes les solutions qui fonctionnent pour éloigner les fourmis endémiques, comme les plants de lavande ou même certains répulsifs chimiques, n'ont aucun effet contre la tapinoma magnum. Ça aggrave même le problème puisque les autres insectes s'en vont, laissant la fourmi invasive seule sans concurrence.
C'est une fourmi noire, qui court partout et qui a une odeur de beurre rance quand on l'écrase.
Christophe Brua, président de la société alsacienne d'entomologie
Pour combattre ce petit insecte très envahissant, deux choses peuvent aider : préserver la biodiversité dans votre jardin, sans utiliser d'anti-fourmis. Et essayer de savoir rapidement qu'il s'agit de la tapinoma magnum : "c'est une fourmi noire, qui court partout et qui a une odeur de beurre rance quand on l'écrase", précisait Christophe Brua, président de la société alsacienne d'entomologie à France 3 Alsace dans un article publié en juin 2024.
La fourmi invasive a aussi été détectée, nous vous en parlions en septembre 2023, dans des jardins familiaux à Cronenbourg, un quartier de Strasbourg. Les deux villes devraient ainsi pouvoir se coordonner pour combattre ce petit insecte dévastateur.
