Géothermie à Strasbourg: les élus pointent les erreurs commises et demandent à être consultés

C’est un débat qui fait fureur depuis des mois : que va devenir la géothermie profonde après les essais désastreux réalisés au nord de l’agglomération strasbourgeoise ? Le conseil de l’Eurométropole de Strasbourg examinait ce matin le rapport de la MIE, la mission d’information et d’évaluation.

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« Actuellement, et au vu des conclusions de la MIE, les conditions technologiques, de connaissances scientifiques, d’accompagnement démocratique, d’acceptabilité, ne sont plus remplies, a déclaré ce matin Marc Hoffsess, président de la MIE et adjoint en charge de la transformation écologique du territoire. Donc, évidemment, il faut arrêter les projets, les suspendre, les revoir. Mais on ne peut pas définitivement se couper de cette ressource. Et là nous pensons à nos successeurs. » Voilà qui est clair. En gros : le MIE a décidé de laisser la porte ouverte à la géothermie, mais avec de grosses réserves. Pour l’instant, les projets sont à l’arrêt.

La Mission propose d'instaurer un protocole : donner la priorité à la production de chaleur avec des forages de moyenne profondeur, exiger une bonne connaissance de la ressource, privilégier le consensus avec les territoires et la coopération avec les citoyens. Et enfin, demander le contrôle d'experts indépendants. La mission déplore également le retard de l'indemnisation des victimes. A La Wantzenau par exemple, 600 dossiers ont été déposés. Michèle Kannengieser, maire de La Wantzenau, regrette « la solitude des maires dans cette affaire, la solitude des administrés également, et les experts incompétents en la matière »

Un rapport de l'Etat en mars 2022

Des experts mandatés par l’Etat rendront, eux, leur rapport en mars 2022. Un rapport très attendu. Car la décision concernant la reprise ou non des projets de géothermie profonde relève de la seule compétence de l’Etat. 19 séismes induits par la centrale géothermique de Vendenheim depuis novembre 2019, un nombre qui a été cité à de multiples reprises ce matin lors de conseil de l’Eurométropole. La plus forte secousse avait été ressentie dans la nuit du 25 au 26 juin, à 5 heures du matin : une magnitude de 3,9 sur l’échelle de Richter. Pourtant, la préfecture avait ordonné l’arrêt définitif des travaux de géothermie menés par la société Fonroche le 7 décembre 2020. Mais les secousses se sont poursuivies. 

La MIE, constituée en réponse à de nombreuses interrogations bien légitimes, n’est pas une commission d’enquête et n’a pas vocation à se substituer aux services de l’Etat. Jean-Philippe Vetter (LR) estime que, avec cette mission, « on a fait le maximum pour obtenir le minimum. Dès le début, il y a eu un entêtement à défendre la géothermie profonde à tout prix. Il y a eu trop de naïveté sur cette technologie. » La MIE fonde ses conclusions sur les auditions qu’elle a menées pendant de longs mois. Son objectif : éclairer le conseil de l’Eurométropole de Strasbourg sur la géothermie profonde et ses conséquences. La géothermie profonde s’inscrit ainsi au cœur de la stratégie de transition énergétique de l’Eurométropole. Selon les projections du schéma directeur des énergies, cette filière devait assurer d’ici 2050 jusqu’à 20% de l’approvisionnement énergétique local métropolitain, et 40% de la chaleur injectée sur les réseaux.

De multiples interrogations

Les épisodes sismiques survenus fin 2019 au nord de Strasbourg ont suscité de multiples interrogations, quant à leur origine induite, en lien avec le forage géothermique profond réalisé par l’entreprise Fonroche Géothermie à Vendenheim (GéoVen). La MIE, représentative de l’ensemble des groupes politiques existant au sein du conseil métropolitain, s’est fixée quatre buts : examiner les conditions de développement du projet de Vendenheim et les causes ayant abouti à une telle situation, plus largement examiner également l’ingénierie technique et financière en jeu dans la géothermie profonde, ainsi que l’intérêt ou non de son développement sur le territoire, s’exprimer sur les orientations à donner pour mettre en œuvre la transition énergétique du territoire, en tenant compte bien évidemment des potentiels avérés, des conséquences économiques et environnementales, et restituer le tout.

13 réunions ont été organisées entre février et août 2021. Selon la MIE, le contexte plutôt consensuel au sein des autorités publiques et du monde scientifique a rendu difficilement audible les craintes et les alertes exprimées à l’époque. De plus, le cadre réglementaire (code minier), faisant de l’activité d’extraction une prérogative de l’Etat, n’associe pas suffisamment (et c’est le moins que l’on puisse dire) les collectivités et les citoyens. Il est même souligné que les modalités des PER (permis exclusifs de recherche) sont marquées par « une certaine opacité ».

Il est jugé particulièrement regrettable que les enquêtes publiques, organisées à l’occasion de l’instruction des demandes d’ouverture de travaux miniers, ne se soient déroulées que dans les communes d’implantation des sites de forage et non dans les communes périphériques, pourtant pleinement impactées par les séismes. Pour Claude Froehly (PS) « il faut acter le plus vite possible une solidarité totale avec les maires et les citoyens. » En effet, La Wantzenau, où les dommages les plus importants ont été enregistrés, n’a même pas été incluse dans les périmètres d’enquête publique !

Une communication insuffisante

« Les services ministériels n’ont pas pris en compte les alertes et les inquiétudes exprimées par l’Eurométropole, concernant notamment les effets pervers de la PPE. Le contexte d’une filière à forte intensité capitalistique – 60 à 100 millions d’euros par projet- assorti d’un risque financier initial très élevé, a pu contribuer à une culture du secret ou favoriser des prises de risques. » Selon la MIE, la communication entourant ce projet s’est avérée insuffisante.

Les séismes successifs et intenses ont provoqué un profond traumatisme au sein de la population et une défiance évidente à l’endroit de la géothermie profonde. Pour Philippe Pfrimmer, maire de Vendenheim « il ne faut pas tout mélanger : ce rapport n’a pas pour vocation à dire ce qui va se passer dans le futur, mais à éclaircir ce qui s’est passé. Il est regrettable que l’Etat ne soit pas venu à la table de la mission d’information. » Quant à Alain Fontanel (LREM), il a fustigé « une entreprise (Fonroche) plus arrogante qu’expérimentée, des cow-boys de la géothermie profonde ». Et il a rendu hommage à tous les lanceurs d’alerte.  

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