INSOLITE. Strasbourg : bonnes blagues et repassage, le pressing qui lave l'humour à la machine

"Un sex-shop avec écrans intégrés dans nos machines à laver" : c’est la dernière affiche choc de Thierry Strauss, propriétaire de quatre pressings sur Strasbourg. Portant le gag en bandoulière, il s’amuse et amuse ses clients. Du moins ceux qui ont le sens de l’humour.

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Sur la place de Strasbourg, il est connu comme le loup aussi blanc que sa lessive. Depuis des années, Thierry Strauss met son sens de la blague potache au service de ses quatre pressings strasbourgeois. Chez lui, c’est poisson d’avril plusieurs fois par an. Et plus d’un s’y sont faits prendre.

Des dents au sourire

Thierry Strauss a commencé sa carrière dans la prothèse dentaire avant de lâcher rapidement au profit du pressing. Le contact avec la clientèle lui manquait trop. Depuis, il s’est rattrapé : 38 ans de service au service des amateurs de cols amidonnés et des chemises bien repassées.

A son œil fripon, on devine qu’il est du genre farceur : " Ça vient sûrement de mon papa. Il était aussi très taquin. Il m’a toujours dit que si je devais reprendre un commerce, on devait en parler en bien ou en mal mais on devait en parler. Je trouvais que les vitrines de pressing étaient en général un peu tristounettes et qu’il fallait un peu animer la chose" .

Humour version pressing

Chaque jour, il s’emploie à scruter l’actualité, à chercher le bon jeu de mots ou la blague qui fera mouche. Une seule contrainte : trouver un lien avec le pressing. Si Alain Souchon passe l’amour à la machine, Thierry Strauss, lui, préfère y passer l’humour, avec ou sans détergent. Et ça décape.

En mars 2011, il se lance dans la rédaction d'une feuille de chou "Le journal de votre pressing": un édito, des conseils pratiques et quelques blagues du style "Le sandwich à la mayonnaise est sponsorisé par la chambre syndicale des pressings". Les lecteurs apprécient et en redemandent. "Pas riz réussi" : le numéro deux paraît 8 mois plus tard et cela continue toujours aujourd'hui.

Thierry Strauss fait appel aux talents de la région pour agrémenter ses écrits : Jean Risacher, illustrateur et peintre de Sélestat, Julien Kuntz, spécialiste du dessin satirique ou encore Jean Vermeil, critique de musique et emphythéote du Collège de pataphysique sont de la la bande.

En 2012, il cherche quelque chose en lien avec les présidentielles et trouve " Le pressing-en-ciel " et rajoute " Votez blanc " car, explique-t-il : "Je trouvais que pour une blanchisserie, c’était pas mal. J’en ai profité pour mettre en avant tout mon personnel : "Votez Eliane" , " Votez Béatrice" , et ça a bien marché" .

L’assistante de Laurent Ruquier voulait même le faire monter à Paris car elle pensait qu’il incitait ses clients à voter blanc. Que nenni, il voulait simplement les inciter à venir blanchir leur linge chez lui. Il n’est pas monté à la capitale mais il continue à filer la métaphore avec plus ou moins de réussite.

Son plus beau coup

Il y a trois ans, sur de ses camionnettes, il fait inscrire " Nous ne sommes pas au Panama mais nous blanchissons aussi ". Plainte du Panama qui demande à son ambassade à Paris de lui envoyer un courrier en recommandé pour qu’il enlève tout cela rapidement. " J’ai trainé la patte en disant à mon avocat d’attendre pour voir si la sauce prenait ou pas et ça l’a pris très rapidement. Il y a eu une très bonne couverture médiatique ; çà a fait le tour de France. L’ambassade du Panama a changé de stratégie : ils m’ont invité à Paris. Ils avaient bien compris que c’était de l’humour".

Il accepte de remplacer Panama par "les îles" . Congratulations générales  et Thierry Strauss repart avec une bouteille de rhum, pas peu fier de son coup d'éclat : "Le Panama a trois ans et on m’en parle encore !".

Son plus beau flop

Son grand raté était pourtant bien préparé : il avait mis une annonce dans les Dernières nouvelles d’Alsace le 1er avril annonçant qu’Hélène Ségarera (en pensant à Hélène Ségara !) passera au pressing rue de Zurich entre 14h et 14h30 pour retirer les affaires qu’elle avait fait nettoyer et en profitera pour signer quelques autographes.

A cette occasion, il avait loué une limousine pour une heure et demandé au chauffeur de tourner dans le quartier vers 14h. Personne n’a mordu à l’hameçon cette fois-là. Profitant de l’occasion, Thierry Strauss a offert à ses employés un petit tour dans la voiture des stars. "Et finalement, tout le monde était content", raconte-t-il dans un sourire.

Quelques grincements de dents

Une fois, il se rappelle avoir mis l’image d’une femme assez dénudée dans sa vitrine. Le slogan était : " Je vous ai froissée ? Rentrez chez nous pour un défroissage ". Là, Thierry Strauss se souvient avoir quelques soucis avec des clients qui trouvaient que cela ne se faisait pas.

Autre déconvenue, lorsqu’il met un cœur de mouton sanguinolant en guise d’affiche pour la St Valentin avec cette phrase : " Chez nous, c’est la St valentin tous les jours, on met le coeur à l’ouvrage ". Quelques parents s’en offusquent, invoquant une vision plutôt désagréable pour leurs enfants sur le chemin de l’école. Thierry Strauss, lui, ne voit pas le mal, expliquant que dans les manuels de sciences naturelles, il y a la même chose.

Le poisson d’avril 2021

Dernière en date, cette affiche aguicheuse qui a sans doute intrigué dans le quartier de l’Orangerie et de la Petite France : " Sex shop avec écrans intégrés dans nos machines à laver ". Le chef d'entreprise raconte : " J’ai fait croire que nous n’avions plus rien à blanchir et qu’on en profitait pour ouvrir un sex shop light uniquement réservé aux femmes avec des films un peu coquins, masques obligatoires et beaucoup de gens se sont fait avoir". Ils avaient simplement oublié de regarder le calendrier : 1er avril .

Mais pourquoi se faire mousser ?

Thierry Strauss est catégorique : " Le but est personnel, je me fais d’abord plaisir. Je suis fan de ce genre de gag. Ensuite, c’est évidemment de faire connaitre le pressing et de mon point de vue, c’est gagné".

A la question : est-ce que cela a permis d’attirer la clientèle ? La réponse est plus mitigée, surtout dans le contexte sanitaire actuel. " Avec la pandémie, tout est devenu beaucoup plus compliqué. Les gens qui télétravaillent n’ont plus besoin de faire repasser des chemises vu qu’ils sont en jogging chez eux. Il n’y a plus de réception, plus de mariage. Bref, on a beaucoup moins de travail".

Thierry Strauss n’ouvre plus que les matins, une partie de son personnel est en chômage partiel. Il continue de blanchir mais rit un peu plus jaune que d’ordinaire.

 

 

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