En voulant faire cesser un affichage sauvage sur du mobilier urbain, le maire LR d'Illkirch-Graffenstaden (Bas-Rhin) s'est fait agresser verbalement jeudi 4 juillet. Cinq individus l'ont traité de "collabo" et l'ont menacé de revenir pour "le tondre".
La campagne des législatives prend des allures inquiétantes en Alsace. Violences verbales et écrites se multiplient. Le maire (LR) de la commune bas-rhinoise d'Illkirch-Graffenstaden en a fait les frais dans la soirée du jeudi 4 juillet.
"En sortant d'une réunion publique, je me rends compte que l'ensemble des arrêts de bus, des panneaux publicitaires, des grands pots de fleurs, des candélabres sont couverts d'affiches et qu'il y en a vraiment partout dans la ville."
L'édile avance dans sa commune et devant de grands caissons électriques, il découvre des colleurs d'affiches. "Je vois cinq individus en train de coller ces affiches. Je me suis arrêté sur le parking, je suis allé me présenter à eux, leur disant que je suis le maire d'Illkirch-Graffenstaden et que ce sont des emplacements strictement interdits (pour l'affichage) comme les arrêts de bus et autres, et c'est là que j'ai commencé à me faire insulter très copieusement, comme quoi, j'étais du mauvais côté de l'histoire, qu'il y avait des gens comme moi dans les années trente, que j'étais un collabo, qu'ils étaient en train de préparer les tondeuses et qu'ils allaient me tondre. Ensuite, il y a eu des insultes et des noms d'oiseaux, puis ils sont remontés sur leurs vélos et sont partis."
Ils se sont séparés, le maire en a suivi un, tout en composant le 17. Deux équipes de la BAC (Brigade anticriminalité) sont intervenues rapidement et ont interpellé deux des contrevenants. "Ils ont été placés en garde à vue et moi, je suis allé déposer plainte cette nuit au poste de police du commissariat central de Strasbourg." Ce vendredi soir, au moins l'un des deux interpellés a été relâché.
Je ne trouvais pas ça normal de laisser passer des propos aussi graves
"On sent que certaines personnes n'ont plus de limites, elles s'expriment, mais sans être dans les règles et les codes de la démocratie", regrette Thibaud Phillips. "On peut ne pas être d'accord, on peut ne pas avoir les mêmes opinions, par contre, il y a un respect à avoir vis-à-vis d'une autre personne et là, on a l'impression qu'il y a une forme de violence débridée où on peut insulter, attaquer personnellement les personnes et se dire que c'est normal. C'est pour cela que j'ai appelé la police et fait le nécessaire, car je ne trouve pas normal de laisser passer des actes et des propos aussi graves."
On voit parfois qu'un conflit assez banal peut prendre des proportions assez inouïes, alors que par une discussion simple ça pourrait-être réglé
Thibaud Philipps, maire d'Illkirch-Graffenstaden
Des phénomènes qui traduisent, selon cet élu, "une violence sous-jacente dans notre société. C’est un peu la difficulté de cette campagne, les tensions ont été exacerbées avec des camps très marqués, et parfois l'impossibilité de se parler, ce qui est tout à fait dommageable. Parce que la démocratie, c'est quand même de se parler, d'essayer de se convaincre, mais pas de s'invectiver et de s'insulter."
Emmanuel Fernandes, candidat dans la deuxième circonscription du Bas-Rhin du Nouveau Front populaire pour Strasbourg-sud et Illkirch-Graffenstaden, dénonce cette agression verbale.
Je condamne fermement l'agression verbale du maire d'Illkirch-Graffenstaden Thibaud Philipps par des colleurs d'affiches (non électorales).
— Emmanuel Fernandes (@EmmanFernandes) July 5, 2024
Ces agissements graves sont étrangers à la campagne menée par le NFP.
Absolument rien ne justifie ni la violence ni les menaces.
Suite à ces menaces, l'élu d'Illkirch-Graffenstaden insiste. "La démocratie mérite mieux. Les dirigeants politiques ont pu décevoir. Il y a tout un travail à faire pour montrer que nous agissons au mieux pour améliorer la vie de nos concitoyens sur le terrain, au quotidien, que ça peut marcher et qu'un vrai espoir existe encore dans ce pays."
Maître Aras, l'avocate de l'un des interpellés, appelle à un apaisement général et invite les élus à appuyer sa demande. Concernant la version des faits dénoncée par le maire d'Illkirch-Graffenstaden, elle insiste : "laissons les enquêteurs écouter la deuxième version des faits, qui sera donnée par mon client, et la justice trancher, pour savoir ce qui est vrai de ce qui est faux. Évitons la récupération politique. L'enquête suivra son cours et la justice tranchera. Le procureur de la République décidera des suites de l'enquête."
Dans le Haut-Rhin aussi
Le sud de l'Alsace n'est malheureusement pas épargné. Des messages insultants sont adressés aux élus et à la maire de la ville de Mulhouse. Parmi eux, des tags et collages contenant des propos sexistes ainsi que des croix gammées.
Des messages d'insultes nominatives visant Michèle Lutz, la maire LR, ont été découverts devant la mairie. La candidate du Nouveau Front Populaire, Nadia El Hajjaji, qui s'est désistée au profit d'Oliver Becht (DVD), a également été insultée avec des collages sur ses affiches électorales.
Trois groupes d'élus du conseil municipal se sont insurgés "contre ces actes innommables et immondes, révélateurs de la situation dramatique dans laquelle se trouve notre pays". Ils affirment rester "plus que jamais déterminés à restaurer un climat de sain débat politique dans le respect des idées et de l’intégrité de chacun". Les élus envisagent de porter plainte.