Lutte contre les séparatismes : l’instruction en famille menacée d'interdiction, les familles dénoncent "un amalgame"

Après l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine, l'exécutif pourrait bien muscler son projet de loi sur le séparatisme. Déjà annoncée, l‘interdiction de l’instruction en famille, dès 2021, suscite la colère des familles. Plusieurs milliers d’enfants sont concernés en Alsace.
 

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C’est l’une des mesures phares du projet de loi contre les séparatismes présenté par Emmanuel Macron, en visite aux Mureaux (Yvelines), le 2 octobre dernier. L’interdiction de l’instruction à domicile, sauf pour raison de santé, dès la rentrée 2021, a fait l’effet d’une bombe auprès des familles qui y ont recours.

"Nous avons vu des dérives, nous voyons des contournements, nous avons un combat à mener", avait déclaré le chef de l’Etat, ajoutant "chaque semaine, des recteurs, des rectrices, découvrent des cas d’enfants totalement hors système. Chaque mois des préfets ferment des écoles, qui ne sont pas déclarées comme telle, illégales".
 

Instruction en famille et radicalisation n’ont rien à voir 

Alix Fourest, coprésidente de l'association Laia



Une description de faits dans laquelle ne se reconnaît pas la famille Mombled de Betschdorf (Bas-Rhin). "Nous sommes un dommage collatéral. C’est un amalgame. Nous ne sommes pas antirépublicains. Cet évènement tragique concerne un professeur, dans le cadre d’un enseignement, les gens qu’il avait face à lui étaient des enfants scolarisés à l’école publique. Je vois encore moins ce que nous on a à voir là-dedans. Aujourd’hui le débat n’est pas de savoir si l’instruction à domicile c’est bien ou pas, si c’est efficace ou pas. C’est de savoir s’il peut y avoir des dérives. Ça peut être une crainte que ce soit un foyer de radicalisation, mais franchement, il n’y a aucune preuve, ou en tout cas, on ne nous les a pas fourni", explique Audrey, maman de Romuald, 12 ans, d’Honorine, 6 ans et de Marcelin, 9 ans.

Tous les trois font partie des 50.000 enfants scolarisés à domicile recensés en France. Un chiffre en constante augmentation, depuis plusieurs années. Une tendance qui n’échappe pas à l’Alsace reconnaît-on du bout des lèvres au rectorat, sans pour autant communiquer de chiffres précis, instruction du ministère oblige. Pratiquée sous différentes formes, du "formel", suivant une pédagogie davantage cadrée et structurée, au "unschooling", très éloigné des méthodes scolaires, l’instruction en famille gagne du terrain.

"Il y a beaucoup de souffrances à l’école, mais aussi de plus en plus de ressources en ligne, ce qui permet aux parents de se sentir capables d’assurer l’instruction de leurs enfants.  Beaucoup de familles ont également sauté le pas de la déscolarisation à la suite du confinement et de la situation sanitaire, par peur de la contamination", explique Alix Fourest, coprésidente de l'association Laia"Ça fait longtemps que l’instruction en famille pose problème à un certain nombre de politiques. Il y a 20 ans, on nous accusait déjà de sectarisme. La crainte alors, c’était l’embrigadement sectaire. Aujourd’hui, c’est la radicalisation", dénonce-t-elle.

"C’est un tir de bazooka sur une fourmi"

"On a l’impression d’un tir de bazooka sur une fourmi", avance de son côté Claudia Renau, membre de l’association Les enfants d’abord. Selon elle, "l’école fait du mal à un certain nombre d’enfants. L’instruction en famille, ça leur permet de reprendre confiance en eux, reprendre confiance dans leur capacité d’apprentissage, à être en relation avec les autres. Là, c’est comme si c’était complétement nié par une décision arbitraire."

Reprendre pied, après une expérience en maternelle mal vécue, un impératif pour Rose, 11 ans. Au-delà de pratiquer la danse de manière intensive, cette jeune Strasbourgeoise, atteinte de phobies, étudie en moyenne 4 heures par jour à la table du salon ou devant l’ordinateur, entourée de ses parents. Aucun d’eux n’imagine un retour à l’école l’année prochaine.

"Tous les ans y a un inspecteur qui vient, tous les deux ans il y a une assistante sociale qui vient aussi pour constater que notre fille évolue dans de bonnes conditions, qu’elle a accès aux livres et à des ressources. Donc nous comparer à des gens qui disparaissent du système, c’est chaud. C’est incompréhensible", argumente Emeline, sa maman. "On est déclarés, tracés, c’est donc qu’on ne peut pas faire n’importe quoi", insiste-t-elle.

"Il y a des attendus, les contrôles sont extrêmement détaillés, alors certes il y a des familles qui tentent d’éviter ces contrôles et qui ne respectent pas la loi, mais dans ce cas il y a un arsenal juridique qui est mis en place, des injonctions de scolarisation peuvent être prononcées", reprend Alix Fourest.

Le projet de loi sur les séparatismes sera présenté le 9 décembre prochain en Conseil des ministres. D’ici là, les associations devraient passer à l’action et engager plusieurs recours juridiques pour faire valoir la liberté pédagogique. "Un grand nombre de familles envisagent de quitter la France si jamais on leur imposait l’école", préviennent-elles.
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