Manifestation des policiers municipaux du Grand-Est : "nous sommes les pauvres de service"

Ils étaient une centaine de policiers municipaux à manifester ce samedi 3 février à Strasbourg à l'appel des principales organisations syndicales. Principales revendications : une revalorisation des retraites, un changement de grille indiciaire et la reconnaissance de leur travail.

Devant l'opéra de Strasbourg, un concert peu commun. Sifflets et sirènes hurlantes. Eux habituellement assez discrets et en marge des manifestations, les voilà dans la place, le verbe haut. Les policiers municipaux.

Ils étaient une centaine ce samedi 3 février à manifester dans la capitale alsacienne. Certains sont venus de loin, des confins du Grand-Est "Moi j'ai fait 5h de train" me glisse l'un d'entre eux, chasuble jaune et barbe du week-end. 

Primo intervenants

S'ils sont venus d'aussi loin c'est parce qu'ils jugent la situation intenable. Angelo est policier municipal à Metz depuis 35 ans, dans une unité de nuit.  Engoncé dans sa doudoune, tempes grisonnantes et carreaux épais, en a gros sous le bonnet. "Du 22h-7h du mat en trois huit, éprouvant et particulièrement exposé : rixes, alcoolémie, drogue, tapage nocturne, violences..." Angelo a calculé sa retraite toute proche : 1400 euros. Il touche actuellement 2500 euros par mois, "salaire" amputé de moitié l'année prochaine quand ce sera la quille. "La faute aux primes qui ne rentrent pas en compte dans le calcul de l’indemnité de retraite."

Nous sommes des cibles privilégiées, tout comme la police nationale, pareil, et pourtant pour nous, rien, ce risque-là, il ne vaut rien.

Angelo, policier municipal

"Avec l'inflation, comment voulez-vous vieillir tranquillement avec cette somme ? Sans compter le manque de reconnaissance évident de toutes ces années passées au service du public. Nous sommes les primo intervenants, nous sommes souvent aux premières loges oui, des cibles privilégiées, tout comme la police nationale, pareil, et pourtant pour nous, rien, ce risque-là, il ne vaut rien."

Sébastien T, grand baraqué à la moustache rousse, genre Vicking vosgien ne dit pas autre chose."Nous les policiers municipaux, on est la 3e roue du carrosse" "Heu pardon, la 3e ou la 5e ?" "Non la 3e, on passe après la police nationale et les pompiers, alors que dans les faits, nous sommes en première ligne, les primo assistants. La colère monte parce que nous ne sommes jamais entendus. Nos missions sur le terrain se multiplient, les services sont rallongés, les risques plus fréquents mais nos salaires, eux, restent inchangés. Maintenant stop. On veut des progrès sociaux et une vie décente."

Retraite et changement d'indice 

Frédéric Biedak est président du syndicat national des policiers municipaux (SDPM) , "le premier syndicat national professionnel de la police municipale".

Sa liste de doléances est longue et unanimement partagée. "En moyenne, un policier municipal partira à la retraite avec 1200 euros, après 35 ans de service, vous trouvez ça normal ?" Frédéric Biedak réclame un passage en catégorie B avec changement de grille indiciaire pour les policiers municipaux afin que leurs primes soient intégrées dans leur salaire et, in fine, obtenir une meilleure retraite." C'est ce que les pompiers ont obtenu récemment. La police pénitentiaire, la police nationale, les pompiers, ils sont tous en catégorie B, nous, on reste en C, les derniers. Nous sommes pourtant de plus en plus exposés aux mêmes risques qu'eux, sans le volet "justice" mais le travail sur le terrain est quasi identique à celui de la police nationale. On est mobilisés sur Vigipirate, pour les JO, sur les attentats, les émeutes, le Covid, tout quoi... On ne comprend pas ce manque de reconnaissance." 

À la St Sylvestre, on s'est pris des tirs de mortier à bout portant, des refus d'obtempérer.

Candice, policière municipale

Candice confirme. À 38 ans, cette "PM" d'Illkirch (67), ancienne gendarme, souffre elle aussi de ce manque de reconnaissance. "Nous sommes loin de l'image des gardes champêtres que les gens peuvent avoir de nous. Nous avons de plus en plus de missions, de plus en plus de responsabilités. À la St Sylvestre, on s'est pris des tirs de mortier à bout portant, des refus d'obtempérer. Alors oui, nous sommes des fonctionnaires, des fonctionnaires territoriaux, mais il faut considérer la réalité de notre métier, la valoriser." 

Nous sommes la plus vieille police de France, nous sommes la 3e force de sécurité de France et les derniers en termes de reconnaissance

Frédéric Biédak, pdt SDPM

Et Frédéric Biédak de monter sur ses grands chevaux. Ceux de la police montée. "C'est vrai quoi nous sommes la plus vieille police de France, 1689, nous sommes la 3e force de sécurité de France et les derniers en termes de reconnaissance, les pauvres de service." La preuve selon lui : "Nous sommes 26.000 en France, il en faudrait 11.000 de plus mais les collectivités ont du mal à recruter, le niveau des salaires est trop bas..." 

Entamé en novembre dernier avec la grève des PV, le mouvement se poursuit. Une délégation devrait être reçue le 13 février au ministère de l’Intérieur pour la poursuite des négociations.

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