Le gouvernement annonce lundi 18 octobre 2021 son intention de se pourvoir en cassation après la décision de la Cour administrative d'appel de Nancy. Vendredi 15, cette dernière avait cassé l'arrêté préfectoral autorisant le stockage illimité des déchets dangereux enfouies à Stocamine, Haut-Rhin.
Enième coup de théâtre dans le dossier Stocamine. Après que la Cour administrative d'appel de Nancy a cassé, il y a quelques jours, l'arrêté préfectoral autorisant le stockage "illimité" des 42.000 tonnes de déchets dangereux enfouies à Stocamine, l’Etat contre-attaque ce lundi 18 octobre, en annonçant son intention de se pourvoir en cassation devant le Conseil d'Etat. Dans un communiqué, le ministère estime que la décision de la cour "retarde un confinement qui ne peut plus attendre", notamment à cause de la dégradation de l'état "des galeries souterraines qui les rend de plus en plus difficiles d'accès".
En janvier 2021, la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, avait décidé du confinement, sans déstockage supplémentaire, des déchets dangereux non radioactifs présents sur le site. Parmi eux, de l’amiante, de l’arsenic, ou encore du mercure, situés à 535 mètres de profondeur, sous la nappe phréatique d'Alsace.
Les avantages potentiels d'un déstockage complémentaire des déchets ne sont "pas démontrés, et celui-ci présenterait des risques significatifs pour les travailleurs", assure le ministère. A l'inverse, "la réalisation du confinement dans des conditions optimales est indispensable pour assurer la protection de la nappe d'Alsace", complète-t-il.
"L’Etat joue la montre"
Vendredi 15 octobre 2021, la Cour administrative d'appel de Nancy avait elle justifié sa décision par le fait que la société des Mines de potasse d'Alsace (MDPA), qui exploite Stocamine, ne justifie pas "de capacités financières la mettant à même de mener à bien l'exploitation illimitée" du site. Sa décision a entraîné l’arrêt des travaux qui devaient commencer début novembre dans l’ancienne mine de potasse. Les premières coulées de béton pour former des bouchons imperméables empêchant l'accès aux déchets, n'auront donc pas lieu.
A l’annonce de ce nouvel épisode judiciaire, les opposants au confinement des déchets, un temps victorieux, n’ont pas tardé à réagir. Dans un communiqué de presse, Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d’Alsace, regrette une décision qui devrait "rallonger les délais de déstockage alors que les risques de pollution de l’eau et de l’environnement sont avérés". "Une fois de plus les Alsaciens doivent subir une décision unilatérale du gouvernement dont les effets auront des impacts sur les générations futures. Au contraire l’Etat aurait dû se saisir de cette opportunité pour proposer un projet plus en phase avec les préoccupations des Alsaciens et de leurs voisins du Bade-Wurtemberg", écrit-il.
"Fallait s’y attendre. Depuis 2002 l’Etat joue la montre. Maintenant, il continue à bloquer. Ça va prendre des mois. On aurait pensé que le gouvernement écoute nos élus, mais au lieu de ça, il les ridiculise", estime de son côté Yann Flory, membre du collectif Destocamine.
Pour rappel, l’exploitation du site de Stocamine avait été autorisée en 1997 pour 30 ans, afin de reconvertir cette mine de potasse en fin de vie en décharge industrielle souterraine, et d'y stocker 320.000 tonnes de déchets dangereux non radioactifs. Mais en 2002, un incendie survenu dans un espace de stockage avait interrompu les opérations, alors que 44.000 tonnes avaient déjà été descendues. Puis un arrêté préfectoral avait autorisé en mars 2017 le confinement "illimité" des déchets encore sous terre.