La 607e foire Saint-Jean aura lieu du 1er au 19 juillet 2020 à Strasbourg, mais à une nouvelle adresse, rue Fritz Kieffer, derrière l'hôtel Hilton, ce qui occasionne un coût d'un million d'euros supplémentaire. Robert Herrmann, en charge du dossier à la ville de Strasbourg s'y oppose.
Robert Herrmann, premier adjoint au maire de Strasbourg en charge des foires et marchés est en désaccord avec le maire Roland Ries sur l'installation, sur la plateforme Kieffer, de la foire Saint-Jean 2020. Il a donc décidé symboliquement de démissionner de sa mission "foires et marchés". Ultime épisode d'une polémique relancée chaque année, quelques semaines avant l'ouverture de cet événement populaire.
C'est un vrai serpent de mer. Un sujet de débat relancé chaque année : où peut s'installer la foire Saint-Jean de manière pérenne à Strasbourg ? Et elle a changé plusieurs fois de place. Traditionnellement située au Wacken, coincée entre la SIG et le parc des expositions, elle a été délocalisée au Jardin des Deux Rives de 2006 à 2010, avant de revenir au Wacken. L'an dernier, les caravanes des forains étaient situées rue Fritz Kieffer et la foire se tenait boulevard de Dresde.
Pour l'édition 2020, ce sera l'inverse. Les caravanes sont déjà arrivées boulevard de Dresde. Rue Fritz Kieffer, il a fallu réaliser des travaux pour accueillir les manèges. Ils sont en train de se terminer pour un démarrage de la foire St Jean le mercredi 1er juillet.
Colère et incompréhension
Ce qui ne passe pas, pour Robert Herrmann, c'est que le maire semble avoir décidé seul de cet emplacement, sans s'assurer de l'accord de l'Eurométropole, à laquelle appartient le terrain. Et sans valider en amont le coût nécessaire à l'installation des manèges sur la plateforme Kieffer avec l'adjoint chargé des foires. Un adjoint en colère. "Je viens d'avoir les éléments chiffrés des services techniques qui m'ont surpris par leurs coûts. Et cela est très onéreux pour quelque chose de provisoire", explique Robert Herrmann. "Et le fait de l'avoir découvert dans la presse, il y a quelque chose de méprisant et de vexant."
Il a donc écrit une lettre au maire de Strasbourg, pour lui expliquer les raisons de la démission de ses fonctions de responsable des foires et des marchés. "Cela m'amène à vous demander de ne plus exercer mes délégations municipales relatives aux foires et marchés dès la réception de la présente lettre", écrit-il dans son courrier en date du 20 juin 2020.
Sa décision d'abandonner sa mission "foires et marchés" est motivée aussi par une volonté de ne pas signer cette facture en tant qu'adjoint, sachant qu'elle dépasse d'un million d'euros les travaux prévus sur la plateforme Kieffer. "C'est une décision qui vise à me protéger sur le plan juridique. [...] Je n'ai pas envie d'assumer ces décisions qui sont malvenues."
Travaux coûteux
Un million d'euros pour des travaux. Ils sont obligatoires pour pouvoir accueillir la foire Saint-Jean à cet endroit. Il s'agit de l'électrification, du renforcement de la plateforme pour accueillir des manèges très lourds et de l'écoulement des eaux. Des travaux qui serviront aussi à la Foire européenne, mais ils auraient été moins coûteux s'il n'y avait pas eu la Foire St Jean, explique Robert Herrmann qui ajoute : "ce qui relève de la ville, doit être payé par la ville, ce qui relève de l'Eurométropole le sera également."
L'adjoint au maire et président de l'Eurométropole assure que le terrain sera bien sûr mis à la disposition de la ville, pour ne pas bloquer la foire et les forains. "Mais je refuse que l'Eurométropole soit l'Oncle Sam qu'on appelle quand on a besoin de sous. Là en l'occurrence, c'est une compétence de la ville". Robert Herrmann demande à la ville de prendre en compte ce surcoût. Et lui ne signera pas. "C'est l'imprévision qui génère ce coût."
Trouver un lieu définitif pour la foire Saint-Jean
Cette polémique remet sur le tapis tout le débat sur le lieu définitif d'installation de la foire Saint-Jean, que les forains appellent de leurs vœux. "Ca fait déjà quelque temps que je dis qu'il faut prévoir un foirail. Il n'y a pas de grande ville qui n'ait pas de grande place pour accueillir les cirques et les foires. [...] on a sans arrêt repoussé cette question, et on finit par vexer tout le monde et dépenser beaucoup d'argent", résume Robert Herrmann.
Pour les forains, les quatre années au jardin des Deux Rives ont été synonymes de perte de visibilité. "La colère persiste en nous parce qu'on n'arrive pas à trouver de site pérenne", explique Tony Coppier, porte-parole des forains.
Edition 2020 sous pression
Pour Tony Coppier, il a fallu faire des compromis pour que la foire Saint-Jean puisse se tenir. La date a été déplacée au 1er juillet, après les élections. "Normalement là on doit récupérer le terrain mardi après-midi [le 23 juin, ndlr], et ensuite il faut faire la redistribution des places aux forains, donc on est un peu inquiet. Mais on n'a pas le choix, et on veut travailler. Il faut que ça se passe."
Une situation difficile, comme nombre de commerçants et d'entreprises partout en France. "90% des forains n'ont pas travaillé depuis Noël. Normalement on recommence à travailler vers février. Cette foire c'est une des premières de France, Roland Ries montre l'exemple. Et nos amis belges citent en ce moment Strasbourg pour obtenir la tenue de leurs foires en Belgique", raconte Tony Coppier, présent à Strasbourg depuis 58 ans, chaque année, pour la Foire Saint-Jean.
Tony Coppier de son côté a trouvé le site idéal, sur le site de la SNCF à Cronenbourg, entre le cimetière et le dépôt de la CTS, comme il l'a dit à Rue89 Strasbourg. Il voudrait que la prochaine équipe municipale se penche sur la question. Pour l'instant, la priorité c'est l'ouverture de la foire Saint-Jean le 1er juillet.
Réaction de Roland Ries
Roland Ries a réagi dans un communiqué de presse samedi 20 juin dans l'après-midi, puis par un post sur sa page Facebook.
"Je ne comprends pas très bien ce qui a pu motiver la décision de mon adjoint, pas plus que je ne comprends les arguments utilisés, qui ne sont pas fondés sur la réalité des faits. Il ne m'a jamais proposé de solution alternative, ni ne m'a indiqué être contre la décision prise il y a plus de trois semaines", explique le maire de Strasbourg, qui va reprendre dès dimanche la compétence "foires et marchés" et organiser lundi 22 juin une réunion avec les riverains de la foire.