Strasbourg: extension de l'Ecole européenne, deux poids, deux mesures?

Construite en 2015, l'Ecole européenne de Strasbourg devrait faire l'objet d'une extension. Une "école réservée à une caste" dénonce le blog de la Robertsau, alors que d'autres établissements scolaires du quartier réclament des moyens supplémentaires. 

"Toujours plus de moyens pour une école réservée à une caste." L'animateur et rédacteur du blog de la Robertsau, Emmanuel Jacob, n'y va pas par quatre chemins. Pour cet habitant de la Robertsau, la construction de l'Ecole européenne en 2015, rue Peter Schwarber est une aberration. Son extension prochaine d'autant plus. "C'est un établissement public, financé par les impôts de nos concitoyens. Mais les conditions d'admission sont très strictes et sélectives. C'est une école pour les enfants de fonctionnaires européens." Du côté de la Ville et de l'école, on dément toute volonté de faire de cette école un établissement de "l'entre-soi". 

L'adjointe du quartier de la Robertsau, Nicole Dreyer, refuse cette idée de favoritisme. "L'Ecole européenne n'a pas plus de moyens que les autres établissements, et je peux le prouver au centime près." A cette différence près: le Parlement européen verse 6.500 euros pour chaque enfant scolarisé par l’un de ses employés dans le primaire, 9.500 dans le secondaire.
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"Un entre-soi contraire aux valeurs européennes"

"Cet entre-soi est en contradiction avec les valeurs européennes d'ouverture aux autres et aux cultures différentes, déplore Emmanuel Jacob. Et d'ajouter : "Les Robertsauviens passent devant cette école flambant neuve tous les jours, mais leurs enfants n'ont pas la possibilité de l'intégrer. Il y a de quoi s'insurger. Rappelons que les collectivités locales (région, département et ville) ont déboursé plus de 34 millions pour la construction de l'Ecole européenne de Strasbourg."


Un établissement élitiste

Certains enseignants de l'école primaire de la Robertsau, rue Adler, partagent cette avis. A leur niveau, ils constatent que l'Ecole européenne, dont la vocation première est d'accueillir les enfants d'origine européenne, "ne remplit pas pleinement son rôle". En effet, beaucoup d'enfants de parlementaires sont accueillis à l'école Adler. Des enfants allophones, dont certains ne parlent pas (ou très mal) le français et qui, en toute logique, devraient être pris en charge par l'Ecole européenne. Mais "pour y entrer, il faut un niveau scolaire très élevé."

Une enseignante d'Adler évoque un enfant qui parle trois langues, excepté le français, et qui a été refusé par l'Ecole européenne. Or, la prise en charge de ce type d'élèves pose problème à l'école Adler, car aucune classe spécifique n'est prévue pour enfants allophones, et les enseignants n'ont pas eu de formation particulière pour leur assurer un enseignement adapté. 
 

Des moyens en moins pour les autres écoles?

Alors l'extension de l'Ecole européenne annoncée lundi 25 mars par le maire de Strasbourg Roland Ries en conseil municipal fait forcément grincer des dents. Et suscite l'incompréhension. "C'est des moyens en moins pour les écoles du quartier qui en auraient bien besoin. Depuis des mois, des années, on tente d'alerter les services de la ville. Les conditions d'enseignement se sont dégradées." A l'école de la Niederau, la cour de récréation se transforme en piscine dès qu'il pleut. 

 "Les moyens mis en œuvre ne sont pas les mêmes partout."

A l'intérieur des bâtiments aussi, certaines salles auraient besoin d'un solide rafraîchissement. Une autre enseignante de la Niederau déplore des "locaux vétustes" et des "fenêtres bloquées qui ne s'ouvrent plus depuis des mois." De son côté, une enseignante de l'école élémentaire Schwilgué, à la Cité de l'Ill, évoque la peinture qui "s'écaille de partout", "les morceaux de mur qui tombent", au point qu'à certains endroits, "l'on voit l'armature métallique de la structure". Elle n'a pas d'autres moyens que de dissimuler tant bien que mal la vétusté des murs avec des dessins ou des grandes feuilles de papier.
 

Sans parler du manque de moyens dans le domaine de l'informatique, dont souffrent plusieurs établissements du quartier. Il y a un an, une enseignante de l'école élémentaire Schwilgué nous expliquait son quotidien: "Notre salle info est équipée d'une vingtaine de postes qui ne fonctionnent pas tous, et quand tous les postes sont connectés, le réseau ne fonctionne plus." 

Aujourd'hui, la situation a un peu évolué, les ordinateurs ont été répartis, "mais il y en a seulement un par classe." A la Niederau, il n'y a "ni connexion Internet, ni ordinateur" selon une autre enseignante qui regrette que "les moyens mis en oeuvre ne sont pas les mêmes partout." Seuls les enseignants de l'école Adler semblent satisfaits de l'état de leur école, rénovée récemment, et "bien équipée, avec un vidéoprojecteur par classe".  Même si l'accueil du périscolaire se fait encore dans des préfabriqués.
 

Autre questionnement d'une mère de famille : pourquoi le gymnase flambant neuf de l'Ecole européenne n'est-il pas accessible aux collégiens du collège Jules Hoffmann, doté d'un gymnase trop petit ? En effet, pour leurs cours de sport, ces derniers doivent se rendre dans les écoles élémentaires Adler ou Niederau, voire prendre le bus jusqu'aux locaux du club omnisport ASL.
 

Une extension pour accueillir davantage d'élèves du quartier

Du côté de l'établissement européen, la direction tente de rassurer: "Le dossier de l'extension vient à peine d'être ouvert dans le cadre du plan triennal 2018/2021 ; et l'opportunité ou la faisabilité est en discussion" explique Oliver Tedde, le directeur de l'école. "Cette extension, nous le souhaitons, permettrait d'accueillir un autre public. Des enfants strasbourgeois intéressés par des études européennes." 
 
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