Le regard perçant, la fourrure tachetée, les oreilles ornées de pinceaux de poils : à l'Orangerie, les deux lynx sont connus comme le loup blanc... Mardi, ils ont rejoint l'Alternativer Wolf-und Bärenpark, en Allemagne. Une décision, dans le dossier sensible du zoo, qui fait l'unanimité.
Mardi, les habitués du boulevard de l'Orangerie ont trouvé l'enclos vide.
Les deux lynx du zoo strasbourgeois ont été transférés à une soixantaine de kilomètres de là, très tôt dans la matinée. Pour rejoindre un lieu de vie bien plus vaste et favorable à leur fin de vie.
500 m² de végétation
La fratrie, âgée de 12 ans, a rejoint le Bärenpark, en pleine Forêt-Noire près de Freudenstadt.
Rebaptisés Catrina et Charlie, ils disposent outre-Rhin d'une zone de repli, le temps d'apprivoiser leur nouveau milieu. 500 m² de végétation pour retrouver leur état naturel. Les deux félins évolueront ensuite au milieu de loups et d'ours dans un espace d'un hectare et demi.
Au Bärenpark, l'enclos a été construit l'année dernière spécialement pour accueillir des lynx. Un investissement de 30 000 euros. L'arrivée de Catrina et Charlie n'était pourtant pas garantie.
"Nous avons eu connaissance du projet de modernisation du zoo de de l'Orangerie il y a deux ans", explique Catherine Rutz, bénévole au Bärenpark. Une première prise de contact avec les associations de défense de la cause animale et la municipalité, propriétaire du zoo strasbourgeois, qui n'avait pas aboutie.
Alors en avril dernier, le Bärenpark a décidé de joindre directement les Amis du zoo de l'Orangerie, propriétaires des animaux. Le transfert s'est accéléré, n'attendant plus que le cites, document qui réglemente l'importation des espèces protégées.
Ce sont les infrastructures qui étaient inadaptées
"C'est la première fois qu'un zoo collabore activement avec une fondation allemande, se félicite la bénévole. Ils demandent des nouvelles des lynx. Maitenir le lien, c'est du jamais vu."
Car le Bärenpark insiste sur le rôle du zoo strasbourgeois dans cette affaire. "Les lynx sont en pleine forme, ils ont été très bien soignés (...) Notre vocation est d'accueillir des animaux qui ont eu des conditions de vie médiocre. Or là, ce sont les infrastructures qui étaient inadaptées."
Et Albert Bour, secrétaire général des Amis du zoo de l'Orangerie, d'insister : "C'est une belle expérience que nous tentons (...) Ils vont retrouver leur instinct naturel en étant obligés de chasser pour manger."
Le zoo, régulièrement montré du doigt par les associations de défense de la cause animale et la municipalité, affirme avoir "tout de suite répondu favorablement" à l'offre.
Si le déplacement des deux lynx emporte l'adhésion de l'ensemble des parties, le débat sur l'avenir du zoo strasbourgeois reste animé.
"C'est un symbole fort de l'avancée dans la concertation (...) Au départ, nous avions des positions très clivantes", explique Christel Kohler qui s'est également rendue en Allemagne. L'adjointe au maire de Strasbourg, en charge du groupe de travail dédié à la question, se félicite d'un transfert effectué "dans la quiétude".
Le zoo continue de se défendre sur les conditions de captivité de ses animaux. "Nous n'avons plus beaucoup d'espèces exotiques. Et avec le départ des lynx, nous allons pouvoir étendre les cages des macaques", détaille Albert Bour, insistant sur la volonté de moderniser et rendre conforme le site.
"C'est un beau premier pas, maintenant il y a encore beaucoup d'animaux au zoo de Strasbourg qui vivent dans des conditions déplorables", répond Anne-Sophie Ring, bénévole de Code animal. L'association avait déposé plainte en 2013 pour mauvais traitements sur les félins. Avant de s'engager dans un bras de fer pour leur transfert en Allemagne.
Si ses bénévoles se félicitent de la coopération de l'ensemble des parties, ils n'en démordent pas : le zoo doit fermer.
4 ans après plainte de #code_animal Le #zoo de #Strasbourg mue, les lynx vont être transféré dans un sanctuaire https://t.co/OLfSVhhh4Z pic.twitter.com/MazKCobX4O
— Code Animal (@code_animal) 25 mai 2017
Car l'avenir des lieux reste en suspens.
"Une concertation sera lancée en septembre pour trouver un projet plus adapté", conclut Christel Kohler. En mars, le groupe des écologistes du conseil municipal a voté contre l'attribution de la subvention annuelle de 270 000 euros allouée au zoo de l'Orangerie.