Témoignage. Après cinquante ans de souffrance, il retrouve enfin son vrai nom, "j'ai pleuré comme un gamin"

C'est une bataille longue de près de 50 ans qui s'achève. À son arrivée en France, en 1966, les services sociaux avaient forcé Mohammed Guerroumi à prendre le nom de "Jean-Pierre Guérin" à l'état civil. Aujourd'hui, il va enfin retrouver sa véritable identité.

Cinquante ans d'attente et la délivrance est arrivée en un coup de téléphone, en un seul mot même. Lorsqu'il décroche son portable ce vendredi 2 février au matin, et qu'il entend prononcer le nom Guerroumi, Mohammed sait qu'il a enfin obtenu justice. "J'ai pleuré comme un gamin", raconte-t-il. 

Une fonctionnaire du ministère de la Justice l'a appelé pour lui annoncer la bonne nouvelle : Mohammed Guerroumi va pouvoir récupérer son vrai nom. Il va enfin se débarrasser de celui qu'on lui a donné à son arrivée en France, Jean-Pierre Guérin. 

Aujourd'hui, c'est une belle journée.

Mohammed Guerroumi

à France 3 Alsace

"Pendant tant d'années, j'ai souffert avec un nom qui ne m'appartenait pas, c'est comme si j'avais un masque. Mais aujourd'hui, c'est une belle journée", témoigne le retraité. Il raconte avoir appris la nouvelle alors qu'il regardait le foyer situé en face de chez lui et dans lequel il a passé une partie de son adolescence. 

Un nom de souffrance

Lorsqu'il arrive d'Algérie, en 1966, Mohammed Guerroumi a 14 ans. Il est reconnu pupille de la nation et atterrit à Strasbourg, où il est placé sous tutelle au foyer Charles Frey dans le quartier du Neudorf. C'est à ce moment-là que son tuteur lui demandera de changer d'identité pour quelque chose de "plus français". C'est décidé, il s'appellera désormais Jean-Pierre Guérin.

Un nom qui le suivra toute sa vie. Pourtant, depuis l'âge adulte, Mohammed Guerroumi n'a eu de cesse de se démener pour récupérer sa véritable identité. Nous vous racontions son combat dans cet article

En janvier, le retraité a toutefois remporté une première bataille. Il a réussi à récupérer son prénom. Mais pour le nom de famille, c'était une autre paire de manche. Le Strasbourgeois a dû faire une requête auprès du ministère de la Justice, seule institution autorisée à acter un changement de nom de famille, par décret.  

À la fin "il y a quand même quelque chose de beau"

Armé de patience, il a finalement réussi à retrouver son nom. "La plus grande victoire, ça sera quand j'aurai la carte d'identité et le passeport, ça va être beau", se réjouit-il. Il s'interroge néanmoins sur tout ce temps passé à attendre.

"J'ai trop souffert. Quand les gens découvrent que vous avez un nom qui ne rassemble pas à votre physique, il y a des moqueries, se souvient-il. Ça a fait des dégâts, je n'étais pas moi-même, avec mes amis, dans le milieu associatif ou sportif." 

Entraîneur de handball dans différents clubs à Strasbourg, il assure avoir gardé espoir grâce à son mental de sportif. "À la fin, malgré toutes ces années de souffrance, il y a quand même quelque chose de beau", conclut-il. Enfin soulagé, il espère aujourd'hui tourner la page, "sans la déchirer pour autant"

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