38 listes inscrites aux élections européennes prévues ce week-end, mais des panneaux électoraux remplis à moitié, voire par une seule affiche. Un vide constaté dans de nombreuses communes de Champagne-Ardenne, petites ou grandes, et qui interroge.
Les Français sont appelés à voter pour les élections européennes ce dimanche 9 juin sur le territoire métropolitain. Pourtant, à quelques jours du scrutin, nombreux sont les panneaux électoraux à rester vides. Comment expliquer cette absence d’affiches malgré 38 listes inscrites ?
Il faut d’abord comprendre que le collage des affiches, dans chaque lieu de vote des 34 935 communes de France, incombe aux partis politiques. Les plus petits, dont le budget est limité, n’ont pas toujours les moyens financiers et humains de les faire imprimer puis apposer. D’autant que seules les listes obtenant au moins 3% des suffrages exprimés peuvent bénéficier d’un remboursement des frais de campagne. Certains emplacements resteront donc vierges, au moins 20, selon France Affichage Plus.
Panneau cherche son affiche
Parmi les partis au budget plus important, certains ont décidé d’organiser la mise en place de l’affichage de manière autonome, d’autres ont fait appel, dès décembre, à un prestataire. Il s’agit de France Affichage Plus, créé en 2015 et missionné par 15 partis : Alliance rurale, Ecologie au centre, Europe territoires écologie, La France Insoumise, Les Écologistes - EELV, Les Patriotes, Les Républicains, Lutte ouvrière, Parti animaliste, Place publique - Parti socialiste, Rassemblement national, Reconquête!, Renaissance.
La communication de cette société indique que sur un total de 2 millions d’affiches à coller, 82% l’étaient lundi 3 juin et 90% mardi 4 juin. Depuis l’ouverture de la campagne officielle le 27 mai, ce sont 700 “afficheurs” qui suivent un “agenda établi” pour coller “progressivement” les affiches. France Affichage Plus assure que toutes seront apposées d'ici à la date limite, vendredi 7 juin à minuit. Soit deux jours avant la date du vote en France métropolitaine.
Un délai qui pose question dans un contexte d’abstention et de sentiment d’oubli ressenti par les plus petites listes, comme c’est le cas pour le Parti animaliste, qui a fait appel à ce service pour 132 000 euros.
C’est sûr que c’est décevant. On aurait préféré que toutes les affiches soient collées bien avant car on table beaucoup dessus pour être le plus visible possible, surtout au vu de l’abstention. Mais nous sommes conscients des difficultés.
Adèle de Fontenay, chargée de campagne du parti.
"C’est inévitable, car il n’y a pas assez de personnes pour coller en une seule journée”, reconnaît l’entreprise France Affichage Plus, qui fait part d’autres raisons pouvant expliquer ce retard dans le collage : les conditions météorologiques de ces derniers jours, des panneaux aux mauvaises dimensions obligeant la pose "d'affichettes" et l’absence de panneaux.
Le casse-tête pour les communes
La tâche est tout aussi ardue du côté des municipalités, chargées de mettre à disposition le nombre de panneaux suffisants, aux dimensions réglementées, devant chaque lieu de vote. C’est-à-dire 38 emplacements multipliés par le nombre de bureaux de vote. En sachant qu’un seul panneau coûte entre 100 et 150 euros hors taxes, d’après un rapport du Sénat.
Certaines communes n’avaient pas mis les panneaux, donc c’était impossible de coller les affiches. Des passages ultérieurs sont prévus, y compris lorsque des partis ont été victimes d’actes de vandalisme.
Service communication de France Affichage Plus
Les mairies avaient dix jours, week-end de Pentecôte compris, pour la mise en place. “En réalité, le nombre exact a été connu 48 heures avant le début de la mise en place”, indique Murielle Fabre, secrétaire générale de l’Association des Maires de France (AMF). Dans une logique d’anticipation, le gouvernement avait quant à lui donné des instructions au mois de juin, rappelant le nombre conséquent de listes pour ces élections.
Une propagande électorale à moderniser ?
Manque de place dans l’espace public, pénurie de panneaux chez les fournisseurs, nécessité de bricoler avec les moyens du bord… “C’est un véritable casse-tête”, confirme la secrétaire générale de l’AMF depuis 2022, qui fait part de sa “frustration” lorsqu’elle observe deux affiches collées. “Il y a une obligation liée à l’équité de traitement donc c’est la loi, on la respecte”, avance Murielle Fabre.
Elle fait également part de ses questionnements sur l’éco-système du vote : “Est-ce que l’équité doit vraiment passer par ces affiches ? Est-ce que chaque électeur s’arrête pour faire son choix ?”, s’enquiert celle qui est aussi maire d’un village du Bas-Rhin.
En 2020, une proposition de loi avançait l’idée d’une simplification de la propagande électorale, notamment avec l’obligation pour les candidats de déclarer en amont leur besoin, ou non, de panneaux. Adoptée au Sénat, elle n’a jamais été discutée à l’Assemblée nationale. Quant à la dématérialisation de la propagande officielle, la commission des lois du Sénat s’est toujours opposée aux propositions de l’exécutif. Des considérations qui s’éloignent peu à peu pour les partis, désormais pris par l’envoi des programmes et du matériel électoral par courrier.