Confinement : grosse inquiétude dans les travaux publics, le manque de commandes publiques dénoncé

En Champagne-Ardenne, le secteur des travaux publics emploie 7.000 personnes, et au total, 30.000 dans le Grand Est. L’attentisme des collectivités locales lié au Covid-19 qui entraîne une baisse des commandes, préoccupe les chefs d’entreprise. 

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Le secteur des travaux publics tire la sonnette d'alarme en plein confinement. « Généralement, après des élections, cette année, les municipales, on enregistre une baisse de 10 % des commandes de collectivités locales. Mais cette fois, avec le confinement, 30 % s’y sont ajoutées », explique Hervé Noël. Il est président de la fédération des travaux publics pour la Champagne-Ardenne et le Grand-Est. « En septembre, on pensait qu’il y aurait une reprise, mais rien du tout. En plus, entre le moment où on répond à un appel d’offres et où on commence à travailler, il se passe six mois, et on ne pourra pas réduire les délais administratifs…Je sollicite les responsables de collectivités publiques".

Le professionnel s'inquiète car "les liquidités sont là, seulement, ils gèrent en bon père de famille. L’attentisme domine. Ils ont peur. C’est avant tout psychologique… On ne comprend pas pourquoi il y a un tel frein car il n’y a pas de problème flagrant de finances pour les collectivités. Actuellement, on prépare des plans d’activité partielle de longue durée. Pourquoi arrêter de construire, d’entretenir ? On redoute des dépôts de bilan. On a pourtant joué le jeu. On a pris des jeunes en contrat pro, en alternance. Au déconfinement, tous les chantiers ont repris. On a réduit les congés d’été pour rattraper le retard. Si les carnets de commandent s’effondrent, c’est catastrophique. On est angoissé pour le début de l’année prochaine. Dans le Grand Est, c’est pire qu’ailleurs ». Le secteur y représente trois milliards et demi de chiffre d’affaires dont un milliard en Champagne-Ardenne.
 

Dans les PME, l’emploi risque de ne plus être préservé

« Nos politiques nous demandent de travailler, mais on se rend compte au fil des jours qu’avec des grands donneurs d’ordre en télétravail, il est difficile de concrétiser, d’organiser un suivi » explique Stanislas Chodlewski, président du syndicat régional des travaux Publics, en Champagne-Ardenne. PDG de deux sociétés, à Sainte Maure, dans l’Aube : Champagne Canalisations et EFT Collard, il emploie vingt salariés. «  Notre activité est en forte régression. Je suis inquiet pour les Petites et Moyennes Entreprises".
 

Les soucis vont arriver au premier trimestre 2021, car les appels d’offres qui n’ont pas été instruits, ne le seront pas plus en début d’année prochaine.

Stanislas Chodlewski, Président du Syndicat Régional des Travaux Publics


"Ce qui me chagrine, c’est qu’on nous dit : l’Etat fait tout pour vous. Nous on vous demande d’être au travail. Mettez vos gens au travail ! Les grands groupes ont les mêmes problèmes. Depuis quelques mois, les appels d’offre sont réduits à néant, et du coup, ils prennent ce qui nous fait survivre. Dans les PME, il y a un risque pour l’emploi, et ce, alors que les fonds sont présents ».

Christophe Possémé est président-directeur général de l’entreprise Bâtiment Associé, installée à Muizon, dans la Marne. Il est présent dans les Travaux Publics et le Bâtiment. Président des maçons, au sein de la Fédération Française du Bâtiment, il est, lui aussi, plus que préoccupé. «  Nous n’avons pas de travail pour janvier, pas de volume de commandes. Le Grand Reims, notamment n’a pas été assez rapide pour lancer les appels d’offre. Je m’attends à un premier trimestre très compliqué, avec une baisse de trente pour cent pour les Travaux Publics. En ce qui concerne le Bâtiment, je serais plus nuancé, mais je m’attends à une baisse à la fin du premier semestre 2021".

"Actuellement, il y a beaucoup de monde sur les appels d’offre, et du coup les chiffres baissent. En plus, on va perdre 85% d’investissement dans l’agro-viticole. Sachant que le champagne représente 20% de l’économie marnaise, ce n’est pas négligeable. Si j’ajoute à cela que pour les logements neufs, l’Etat mise sur la transition énergétique, et qu’il va modifier la règlementation au 1er juin 2021, vous comprendrez mon inquiétude. On ne change pas les règles du jeu dans un marché en difficulté. C’est une mauvaise idée
 ». Christophe Possémé, comme d’autres entrepreneurs, a par ailleurs dû composer avec l’épidémie. Quand des cas de Covid sont apparus, cela a impacté les équipes et perturbé les chantiers.
 
 

Dans la Marne, le bâtiment enregistre une baisse de 35 % de son activité

«  On est entré dans la crise avec un carnet de commandes bien rempli », indique le secrétaire général de la Fédération Française du Bâtiment de la Marne, Louis-Xavier Forest. « Mais, aujourd’hui, ce carnet s’épuise. On a enregistré un frémissement à la sortie du confinement. Le marché des particuliers se tient bien, mais ce qui manque actuellement, ce sont les commandes publiques. Avec un trou dans notre activité de 30 à 35%, on craint le printemps 2021. La crise risque d’être violente. Dans notre secteur, de nombreuses structures sont hyper fragiles pour résister. Au problème des commandes publiques s’ajoute celui du milieu du champagne. C’est 20% de notre activité. Il faut que des projets sortent au printemps, sinon ce sera la catastrophe ». Louis-Xavier Forest souligne lui aussi la lenteur d’instruction des dossiers. Dans la Marne, le bâtiment comptabilise 1.300 entreprises et 2.500 artisans seuls, pour un total de 11.500 actifs.

Frank Leroy, maire divers-droite de la ville d’Epernay est aussi président de l’association des maires de la Marne. Pour lui : « Toutes les collectivités ne sont pas impactées de la même manière par la crise. Ainsi, les intercommunalités, dont les recettes proviennent largement de la taxe professionnelle, risquent de voir leurs finances chuter. Il faut que le gouvernement réponde à l’appel d’aide des collectivités. On ne pourra pas maintenir nos dépenses, si on ne parvient pas à un équilibre budgétaire. Les entreprises ont besoin de nous. Dès le mois de mai, j’ai écrit aux maires pour leur demander d’investir. On peut anticiper, investir d’avantage si on est garantie sur nos recettes fiscales. Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont des partenaires fidèles. Nous sommes solidaires. Il n’y a pas d’opposition entre nous. Il faut marcher main dans la main pour que l’économie ne soit pas ralentie ».

Relancer la machine, c’est la demande d’Hervé Noël, Président des Travaux Publics en Champagne-Ardenne et dans le Grand Est. C’est pour lui un acte citoyen des maires.






 
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