Le château du Hohlandsbourg avait été loué pour une soi-disante soirée d'anciens étudiants allemands et autrichiens prévue le 9 novembre. Alertée par un courriel d'un groupe antifasciste de Freiburg qu'il s'agissait d'une fédération d'extrême-droite, la direction du château a annulé la réservation.
Perché à 620 mètres d'altitude sur un belvédère naturel, le château du Hohlandsbourg est un lieu prisé pour des événements festifs : séminaires, soirées privées, accueils de groupes. La direction n'a donc pas été surprise lorsqu'elle a reçu une demande de réservation pour une soirée amicale d'anciens étudiants allemands le 9 novembre. Les services du traiteur ont également été sollicités pour un repas sur place prévu pour une centaine de convives.
Or jeudi 7 novembre au matin, Elisabeth Cor, la directrice du syndicat mixte d'aménagement du château, a reçu un mail dont elle se souviendra longtemps. Il était signé par l'Autonome Antifa de Freiburg, un groupe antifasciste, l'informant de l'identité réelle des futurs visiteurs: il s'agissait en fait de la Deutsche Burschenschaft, une fédération d'extrême-droite de corporations étudiantes nationalistes allemandes et autrichiennes.
La direction du château a alors immédiatement annulé cette réservation et prévenu les gendarmes de Wintzenheim, qui eux ont alerté leurs supérieurs de Colmar. En début d'après-midi, ces derniers ont eu confirmation de la part de la police allemande qu'il s'agissait bien d'un groupe d'extrême-droite d'outre-Rhin.
Ce groupe d'une centaine de personnes devait arriver dans la soirée de ce vendredi 8 novembre et dîner chez un viticulteur de Husseren-Les-Châteaux, avec au menu vin blanc et tartes flambées. Averti par la gendarmerie, le viticulteur a annulé à son tour. La Deutsche Burschenschaft a alors tenté de louer une salle dans la commune d'Obermorschwihr, mais là encore, sans succès.
Une ruse habituelle
Des tentatives comme celle-ci de tenir congrès ou soirée de ce côté de la frontière n'est de loin pas un cas isolé. Du nord au sud de l'Alsace, des maires ont vu leur salle communale louée pour un anniversaire, un mariage, un baptême ou des fiançailles, et à la place de la mariée, les riverains ont vu débarquer des crânes rasés... Des soirées durant lesquelles était célébrée la nostalgie du IIIème Reich avec tout le decorum à la clé.Citons quelques cas :
- En avril 2014, dans la salle d'Oltingue dans le Sundgau, 200 néonazis s'étaient rassemblés pour fêter les 125 ans de la naissance d'Hitler.
- Le 27 décembre 2008, un concert s'était tenu dans la salle de Schleithal, près de Wissembourg. 700 skinheads avaient fait le déplacement pour entendre des chansons dont les textes sont interdits en Allemagne.
- Le 17 février 2004, c'est à Wangen près de Wasselone que 250 skinheads avaient investi la salle des fêtes, là encore le prétexte au moment de la location avait été une fête d'anniversaire.
La proximité de la frontière est certes attrayante et permet aux skinheads belges et luxembourgeois de rejoindre ces lieux en peu de temps. Mais surtout, côté français, la législation est bien moins drastique qu'en Allemagne. Outre Rhin, ces groupes néo-nazis sont sous étroite surveillance et de la police et des associations anti-fascistes.
En Allemagne, le salut hitlérien est un délit. Si dans un concert, il y a une référence au nazisme, le concert est alors immédiatement interrompu. En France, la législation est plus floue, ce qui est dénoncé par les élus qui sont bien démunis, lorsqu'ils apprennent, après coup, la teneur de ces soirées.