Des classes uniquement en alsacien et en allemand : la rectrice de Strasbourg dit (finalement) oui

Suite à une inspection, la rectrice de Strasbourg menaçait de rompre le contrat d'association avec trois écoles ABCM (Association pour le billinguisme dès la classe maternelle) qui n'enseignent qu'en allemand et en alsacien. Face à la polémique, la rectrice a fait marche arrière.

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L'histoire avait mal débuté. Le 24 novembre dernier, Sophie Béjean, rectrice de l'académie de Strasbourg, adresse une lettre -ou plutôt un rappel à l'ordre- à la présidente de l'école associative ABCM Zweisprachigkeit (Association pour le bilinguisme en classe dès la maternelle). Selon la rectrice, l'école est hors-la-loi car elle "ne respecte pas l'enseignement en langue française dans les classes sous contrat d'association avec l'Etat".

En cause, la décision d'ABCM de proposer un apprentissage en immersif total (les cours sont pour moitié en allemand et pour moitié en alsacien) dans ses classes maternelles de Haguenau, Ingersheim et Mulhouse, à la rentrée 2017. Et donc, de ne plus enseigner le français. Pour ce manquement à la règle, la rectrice indique que l'école risque une rupture de son contrat d'association avec l'Education Nationale, ainsi que la mutation des personnels "affectés ces classes" en immersif total. 


L'immersion pour sauver l'alsacien?


Tout commence le 9 octobre lorsqu'une inspection a lieu dans une classe maternelle d'ABCM à Haguenau. L'inspecteur constate que le français n'est pas enseigné aux élèves, contrairement à ce que prévoit l'arrêté de 2003 relatif à l'enseignement bilingue à parité dans les écoles qui précise que "l'enseignement bilingue à parité horaire est dispensé pour moitié en langue régionale et pour moitié en langue française".

Pour Pascale Lux, vice-présidente d'ABCM, "même si l'immersion a débuté il y a peu de temps, ce n'est pas une expérimentation pour autant. Nous avons pris cette décision, sans demander l'autorisation à l'Education Nationale, car notre statut ne nous oblige pas à le faire puisque nous sommes une école associative."

Cet immersif total a été justifié par le fait que "les enfants ne parlent que le français à la maison, et que l'alsacien se perd". Un constat partagé par le Fonds international pour la langue alsacienne: "Moins de 3% des enfants parlent encore l’alsacien et si rien est fait, notre langue aura disparu dans 30 ans. Or, nous savons aujourd’hui que n’importe quelle langue minoritaire peut être sauvée à condition de disposer d’une immersion complète avant l’âge de 5 ans."

Le feu aux poudres
 

En Alsace, la langue régionale et le bilinguisme sont des sujets très sensibles. La lettre de la rectrice a donc mis le feu aux poudres : associations de défense de la langue alsacienne et parents d'élèves sont montés au créneau. Pour Jean-Marie Woehrling, président du centre culturel d’Alsace, "c'est une attitude discriminatoire envers l’Alsace ! Cela fait des années que l'Etat a admis ces immersions dans des écoles publiques et privées en Bretagne et au Pays Basque notamment. Mais ici, il y a une sorte d'hostilité dès qu'on essaye de mettre en place quelque chose qui va dans le sens du bilinguisme." 

L'ABCM a pu compter sur le soutien de l'ensemble des associations de défense de l'alsacien, mais aussi sur celui du Conseil culturel de Bretagne. Le 5 décembre, jour où la polémique a pris de l'ampleur dans les médias, Jean Rottner, président du Grand-Est, a interpellé la rectrice sur les réseaux sociaux.  


Suite à cette levée de boucliers, la rectrice a fait marche arrière sur le dossier. Lors d'une réunion sur "Les cultures et langues régionales", ce 5 décembre après-midi, elle a affirmé son respect "pour le maintien de l'apprentissages des langues, des cultures et des identités régionales". Sur Twitter, elle indique qu'elle recevra prochainement ABCM pour régulariser leur situation.
 


 


 

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