Alors que les écoles et les crèches sont fermées, une note du ministère de la Solidarité et de la santé précise que "l’accueil des enfants chez les assistants maternels n’est pas suspendu". Mais les gestes barrières préconisés sont difficilement applicables avec des enfants.
Les assistantes maternelles travaillent, et depuis la crise du covid19, elles sont même appelées à travailler plus. Désormais, elles peuvent accueillir jusqu'à six enfants à leur domicile sans aucune dérogation. Mais comment faire respecter les règles de distanciation? Comment empêcher ces enfants de jouer ensemble ou de se toucher? Mission quasi-impossible.
"J'ai inventé un nouveau jeu. On se fait des calins de loin", explique Mireille, assistante maternelle près de Strasbourg. "On croise les bras et on se berce. Je fais tout pour qu'ils restent à distance les uns des autres, mais cela se ressent sur l'ambiance. C'est beaucoup plus triste". Heureusement, il reste le jardin, avec un trampoline. Mais jamais à plusieurs.
Comment donner un biberon à un enfant sans le toucher? Comment soigner une égratignure? Evidemment, le quotidien serait beaucoup plus simple si les assistantes maternelles étaient dotées de masques, de gants, et de gel hydroalcoolique. Mais elles ne sont pas prioritaires. "Nous sommes toujours oubliées.... Nous sommes quand même un maillon de la chaîne", soupire Nathalie Dioré, secrétaire confédérale de la Confédération des Syndicats d'Assistants Familiaux et Assistants Maternels (CASAFAM).
"On nous met en danger, nous et nos familles"
Annabelle Deck est assistante maternelle à Griesheim-prés-Molsheim dans le Bas-Rhin. L'une des petites filles qu'elle gardait a présenté les symptômes du covid19. Elle s'est donc confinée durant deux semaines, et devrait théoriquement reprendre le travail lundi 30 mars. Mais elle ne le fera pas, afin de préserver son mari âgé de 64 ans. " Les risques sont trop grands", dit-elle, car les enfants peuvent être les vecteurs du virus, mais leurs parents également. Hors, il franchissent chaque jour la porte de son domicile pour récupérer leurs enfants.
"Ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on arrête de travailler, bien au contraire. Assistante maternelle, c'est un métier passion. Les enfants nous manquent" regrette-t-elle. Après 21 ans passés à excercer ce métier, elle n'aurait jamais imaginé devoir faire face à une telle situation : travailler, c'est faire prendre des risques à tous ceux qui vivent sous son toit. Elle a donc décidé de suspendre son activité, quitte à se retrouver sans salaire, car les assistantes sociales sont exclues du dispositif de chômage partiel.
La sécurité ou le salaire, il faudrait choisir?
Les assistantes maternelles sont soumises à un systeme d'indemnisation chômage très complexe qui les exclut du dispositif de chômage partiel. Alors beaucoup ont eu l'impression de ne pas avoir le choix : vouloir se mettre à l'abri impliquait ne plus percevoir aucun revenu. Ce vendredi, des mesures sont finalement annoncées : "un dispositif d'indemnités exceptionnelles"sera mis en place dès la semaine prochaine pour les assistantes maternelles dont l'activité est fortement réduite par la crise du coronavirus.
80% de leur rémunération sera versée par l'Etat. Mais là encore, Nathalie Dioré et la CSFAM estiment que les assistantes maternelles ne sont pas tout à fait traitées comme les autres, et notamment les salariés au Smic assurés de conserver la même rémunération. "On a vraiment un manque de considération" conclut-elle. Pour exiger de ne pas devoir choisir entre travail et sécurité, une pétition en ligne a recueilli plus de 12 000 signataires dans toute la France.
Le Conseil Départemental 67 veut répondre aux inquiétudes
9 000 assistantes sociales dans le Bas-Rhin : on croule sous les questions. "C'est vrai qu'il y a eu des injonctions paradoxales lors de l'annonce du confinement. Il y avait donc énormément d'angoisse à désamorcer "explique le docteur Marie Emmanuelle Schumpp, médecin départemental de PMI dans le Bas-Rhin. " Voilà pourquoi nous avons mis en place un numéro dédié ainsi qu'une page internet spécifique et régulierement réactualisée", dit-elle. Reconnaissant également le décalage entre certaines consignes de précaution et la réalité de l'activité, elle précise que le département vient de concevoir un protocole des bonnes pratiques qui sera mis en ligne dans les jours qui viennent.