Le Premier ministre l’a annoncé ce vendredi 22 mai, le second tour des élections municipales se tiendra le 28 juin, sauf contre-ordre du Conseil scientifique. Les maires sortants saluent une décision de bon sens, les listes concurrentes se disent flouées.
« Nous étions confinés chez nous, alors que le maire-candidat pouvait sortir distribuer masques et plateaux repas aux habitants. Il fallait le faire et il a eu raison de le faire, mais c’est juste dommage que cela soit tombé en plein entre-deux-tours ! C’est une question d’équité, le Conseil d’Etat devrait se pencher là-dessus », dixit Alan Pierrejean candidat centriste en lice pour la mairie de Châlons-en-Champagne. Quelques heures après l'annonce du Premier Ministre de reporter le second tour des municipales au 28 juin prochain. « Les jeux sont tronqués, quelle que soit la ville. Tous les candidats doivent être traités de la même manière, ce n’est pas cela que j’attends de la démocratie », regrette de son côté son concurrent socialiste à Châlons-en-Champagne, Rudy Namur.« Il ne s’agit pas d’une campagne loyale. La municipalité était heureusement présente durant la crise, mais elle s’est aussi mise en scène ! », dénonce Linda Munster, candidate sur une liste de rassemblement opposée à Jean-Pierre Bouquet à Vitry-le-François.
Partout, de droite comme de gauche, les candidats qui se heurtent à un maire sortant souhaitaient de nouvelles élections en janvier 2021. Et tous accueillent avec amertume la décision du Premier Ministre annoncée ce vendredi 22 mai. Le second tour se tiendra le 28 juin 2020, sauf avis contraire du conseil scientifique qui s’exprimera 15 jours avant le scrutin. L’épilogue d’une séquence où les maires sortants ont été en première ligne pour répondre à la crise. Et leurs concurrents totalement absents.
Une sage décision
- Didier Herbillon, maire sortant de Sedan
« De fait, la crise a servi les maires en place, je ne peux pas vous dire le contraire », reconnaît Didier Herbillon, maire sortant et candidat divers gauche à Sedan dans les Ardennes. Mais il voit surtout, au delà des enjeux électoraux, « une sage décision » dans l’annonce du gouvernement, « les collectivités investissent de façon majeure, retarder les élections aurait reporter les décisions ». A Sedan par exemple, un million et demi d’euros doit être investi dans la voirie. Pas question de valider une telle décision sans élection, ou de la faire assumer à d’éventuels successeurs.
Une tribune dans la presse nationale
Même discours du côté de Jean-Pierre Bouquet à Vitry-le-François, qui se dit « satisfait » de la décision du gouvernement. L'élu socialiste avait d’ailleurs publié une tribune avec d’autres, dans la presse nationale, pour réclamer un second tour en juin, « à Vitry-le-François, les principaux chantiers ont pu reprendre, mais ce n’est pas le cas dans toutes les communes. Dans celles où il y aura une alternance franche, il faudra deux ou trois ans pour relancer la machine et mettre en place de nouveaux projets. Il faut avancer ». L’élu pointe aussi du doigt le danger pour les intercommunalités, « où l’on ne peut pas faire coexister nouveaux élus et équipes non réélues. Il faut sortir de cet entre-deux. La démocratie ne peut pas être confinée ».La démocratie ne peut pas être confinée
-Jean-Pierre Bouquet, maire sortant de Vitry-le-François
C'est "du flan"
Quant aux accusations d’élections biaisées par la crise, pour lui, c’est « du flan », « les maires ont fait ce qu’ils avaient à faire. D’ailleurs la campagne de mes concurrents ne s’est pas arrêtée durant le confinement, je l’ai vu sur les réseaux sociaux. Les électeurs se sont exprimés de manière claire au 1er tour, ils ont les clés pour le second.»On peut rouvrir les écoles, mais on ne pourrait pas aller voter ?
- Benoist Apparu, maire sortant de Châlons-en-Champagne
Pas d’états d’âme non plus pour Benoist Apparu, « on peut rouvrir les écoles, mais on ne pourrait pas aller voter ? ». Le maire divers droite de Châlons-en-Champagne, proche d’Edouard Philippe, se dit dans une logique « militaire », « le gouvernement me dit A je fais A ! ». Pour lui aussi, un scrutin rapide est nécessaire : « Nous n’étions pas juridiquement bloqués car on pouvait organiser un conseil municipal et prendre des décisions d’urgence comme celles sur des fonds de soutien. En revanche, c’est légitimement que c’est plus compliqué, notamment pour porter des projets de long terme ».
Masques obligatoires lors du vote
Alors, comment va se passer ce second tour ? Les masques seront obligatoires dans les bureaux de vote, le ministre de l’intérieur Christophe Castaner l’a rappelé ce vendredi 22 mai. Aux masques déjà distribués s’ajouteront d’autres à l’entrée des bureaux, assurent les édiles. Il faudra aussi trouver des assesseurs en nombre, « moi je n’enverrai personne de ma liste pour tenir les bureaux, d’autant que certains ont peur du virus. Aux autorités de gérer », tacle Alan PierreJean, candidat à Châlons-en-Champagne.Et la campagne ? Une drôle de campagne assurément, sans meeting ni tractage ou porte-à-porte. Peu de changement en réalité pour Didier Herbillon, « en temps normal le second tour se joue en une semaine, c’est très court. Ici c’est la même chose, la campagne a déjà eu lieu. Les choses sont jouées ». « C’est difficile, car il ne va rester que les réseaux sociaux. Il va aussi falloir que les candidats respectent les gestes barrières. On verra ceux qui portent des masques et les autres, c’est déjà un sujet en soi qui va compter », prédit Jean-Pierre Bouquet.
Du côté des challengers, déjà assommés, c’est le flou qui domine. « Je ne sais pas si nous aurons le droit d’utiliser nos affiches déjà imprimées en ajoutant un bandeau avec les nouvelles dates. Et serons nous remboursés si nous refaisons des affiches ? », s’interroge Alan Pierrejean. sans compter qu'avec les règles en vigueur, impossible de réunir plus de dix personnes, « je vais devoir rassembler mes colistiers en quatre fois».
Ma crainte est que l’abstention soit forte comme au premier tour
- Pascal Erre, candidat à Vitry-le-François
« On va se promener, dire bonjour, on fera avec », confie le candidat du RN à Vitry-le-François, Pascal Erre. Lui aussi s’estime « privé d’élection » avec le covid. « On va se battre pour mobiliser, mais ma crainte est que l’abstention soit forte comme au 1 er tour, nous avons fait seulement 12 % des voix car nos électeurs ne sont pas allés voter par peur du virus. Ce sera la même chose au second ».