Ce devait être la nouvelle attraction touristique du nord de l’Alsace, le "chemin des cimes" devait ouvrir cet été sur les hauteurs de Drachenbronn. Il n’en sera rien. Au-delà, c’est même toute la saison touristique locale qui est menacée.
"Tout est prêt mais les camions sont bloqués en Autriche et en Slovénie". Le constat fait par le président de la communauté de communes du pays de Wissembourg (Bas-Rhin), Serge Strapazzon, est on ne peut plus clair. Les camions qui transportent la structure en bois du futur "chemin des cimes" ainsi que les ouvriers chargés du montage, sont bloqués dans leur pays d’origine à cause de l’épidémie de coronavirus.
L’élu ajoute : "nous sommes en lien avec l’entreprise allemande en charge de la construction. On attend. Pour le moment le chantier est suspendu. On n’y arrivera certainement plus cet été. On ne sait pas quand nous pourrons ouvrir. Ça n’aurait aucun sens de le faire cet hiver. Peut-être le printemps prochain !".
Alors que sur les hauteurs de Drachenbronn, les chantiers à la charge de la communauté de communes, eau, électricité, voierie, terrassement, se terminent ces jours-ci, la pièce maîtresse du futur parc de loisir manque. Le "chemin des cimes" devait être le premier maillon d’un redéploiement de l’offre touristique dans ce secteur très touché par la fermeture de la base aérienne BA901.
A cause de la pandémie, la saison touristique va certainement tomber à l’eau. Les principales attractions touristiques comme le fort de Schoenenbourg, vestige de la ligne Maginot, est fermé et ne sait si et quand il pourra ouvrir. Le village de Hunspach, classé plus beau village de France est désert du fait du confinement. La route des vins d’Alsace qui commence sur ces contreforts septentrionaux des Vosges, ne voit passer que quelques habitués qui viennent prendre livraison de leur commande de vin dans le drive aménagé par la cave viticole de Cleebourg.
En face de la cave justement, l’hôtel "Le Cleebourg" est ouvert et offre une vue magnifique sur le vignoble. Mais son restaurant est fermé depuis le 15 mars. Charlotte Heintz, directrice de l'établissement précise : "nous ne pouvons pas offrir de petit déjeuner mais nous pouvons proposer du room service. En semaine, j’avais habituellement une clientèle d’affaire. J’ai repris contact avec les entreprises avec lesquelles j’ai l’habitude de travailler à Wissembourg et Soultz-sous Forêt pour leur dire qu’ils pouvaient nous envoyer leurs commerciaux. Pour le moment, je n’ai pas de demande mais ça va arriver je pense".
Les Allemands représentent 50% de la clientèle
En ce qui concerne les mois à venir, Charlotte Heintz est très pessimiste : "le tourisme ne fonctionnera pas cet été. Les Allemands représentent au moins 50% de notre clientèle, ils ne pourront certainement pas venir. Et si nous ne pouvons pas ouvrir le restaurant…De toute façon, les gens auront trop peur d’être contaminés par d’autres personnes". Charlotte Heintz exploite cet hôtel restauré de fond en comble, depuis six ans maintenant. "Nous étions en progression constante. Cette année, mon objectif est surtout de passer le cap le mieux possible et de conserver tout le monde". 14 personnes travaillent dans l’établissement, 12 sont au chômage partiel, deux autres ont été "prêtés" à une société voisine. Charlotte Heintz passe néanmoins tous ses après-midis dans la maison. Elle y accueille gracieusement depuis le début de l’épidémie des personnels soignants venus d’Ottrott, de Strasbourg ou même de Sarrebourg, pour prêter main forte à l’hôpital de Wissembourg. "Nous leur avons installé une machine à café et un micro-onde pour qu’ils puissent un peu s’organiser".Une campagne marketing adaptée
Comment dans ce contexte envisager une saison touristique ? Pour Barbara Packi, directrice de la nouvelle entité de l’Office de tourisme intercommunautaire de l’Alsace verte, arrivée à ce poste en janvier dernier, la saison ne commencera peut-être que début août. Les villes de Wissembourg et Niederbronn-les-Bains ont annulé leurs manifestations festives jusque-là.
" Nous attendons les consignes", dit-elle. Quand reprendra le chantier du "chemin des cimes"? Quelle sera la taille des groupes que nous pourrons accueillir dans les offices de tourisme? Les restaurants pourront-ils ouvrir ? Notre énergie passe surtout aujourd’hui à garder le lien avec les professionnels de la branche, à aider le plus grand nombre d’entreprises".
Après, et cette professionnelle du tourisme y réfléchit déjà avec ses collègues alsaciens, il faudra communiquer ensemble pour redorer l’image de la région. "Il est difficile de mesurer l’impact de cette épidémie sur l’image de l’Alsace. Nier est inutile. Mais il faudra positiver notre communication. Il faudra qu’elle soit astucieuse, audacieuse et qu’elle donne de l’espoir. Nous cherchons les professionnels de marketing qui sachent faire ça".
Et comme son office de tourisme s’appelle "Alsace verte", elle espère faire venir cet été une clientèle de proximité venue du Grand Est, attirée par la nature et des espaces suffisamment vastes pour répondre aux exigences de la distanciation. Toute la saison n’est peut-être pas perdue.