C’est à coup sûr l’accessoire de mode tendance du moment. Longtemps réservé aux personnels soignants, le masque s’affiche désormais sur la plupart de nos visages de déconfinés. Masqués, mais branchés : petit tour d’horizon de ce qui se fait et se vend en Alsace.
Dans la rue, en ville ou dans les transports en commun, où il est même obligatoire, le masque est en passe de devenir un accessoire incontournable. Pour dédramatiser cet objet anxiogène, certains rivalisent d’inventivité : motifs, couleurs, avec ou sans message, l’idée est d’apporter un peu de gaieté et de rendre le masque plus attractif, presque "fashion". D’autant que personne ne sait combien de temps, tout cela durera.
Alsace forever
La Maison Bossert bien connue des amoureux du costume traditionnel a mis en vente des masques en kelsch. Ce tissu typiquement alsacien est fait de métis, un mélange de lin et de coton. Il est orné de motifs à carreaux formés par le croisement de fils de couleur bleu, rouge, vert et écru.Anne Wolff de la Maison Bossert explique qu'un couple de créateurs de Flaxlanden dans le Haut-Rhin avec lequel elle travaille depuis longtemps lui a fait spontanément quelques propositions de masques en kelsch. Les masques bleus sont faits d’un mélange lin/coton, les autres sont fait 100% en coton.
Sur les réseaux sociaux, la réaction est immédiate : « magnifique », « le tissu alsacien revient en force : excellente idée », « trop chou ». Au prix de 15 euros pièce, 4 modèles sont proposés à la vente : un modèle homme, un modèle femme et ados, un modèle 7-12 ans et enfin un modèle 3-6 ans. Tous sont lavables en machine à 60°C.
Question technique : à ceux qui s’inquiètent de la couture médiane déconseillée, la Maison Bossert précise : « sur notre modèle le tissu extérieur "décoratif" au tissage serré a une couture médiane rabattue des deux côtés. La doublure possède elle une couture médiane rabattue sur un seul côté pour combler tout éventuel interstice dû au passage d'une piqûre machine. Extérieur et doublure sont dé-solidaires. Le tissu de la doublure et l'intissé toilé à l'intérieur sont tous deux homologués ». En clair, l'extérieur est décoratif, l'intérieur est réalisé en respectant les normes de sécurité.
Aucune inquiétude à avoir donc. Sauf celle de ne pas pouvoir honorer toutes les commandes. Une première livraison de 73 masques a été faite il y a deux jours : « j’en ai déjà vendu la moitié », précise Anne Wolff, qui reconnait que « les gens veulent avoir du choix et porter quelque chose de joli ». D’autres arrivages sont prévus dans les prochains jours.
Poudlard ? Vous avez dit Poudlard ?
Coup de baguette magique du côté de la boutique Mon Univers à Mulhouse. Cette enseigne dédié aux fans d’Harry Potter se met aussi au goût du jour. A compter du 19 mai 2020, elle met en vente des masques aux couleurs des quatre maisons de Poudlard : Gryffondor, Poufsouffle, Serdaigle et Serpentard. Chaque sorcier aura le choix entre 5 tailles de masques et 7 tissus officiels différents. A chacun ses goûts et sa morphologie.
Ces masques confectionnés en Alsace dans l’atelier de LY-Rose créations respectent évidemment les normes AFNOR et résistent au lavage. Ils sont disponibles en pré-commande au prix de 10 euros. Tom Stocker, le gérant de la boutique, précise que "l’intégralité des bénéfices sera reversée à la Fondation de France". Objectif : soutenir les soignants, les chercheurs et les plus vulnérables.
En deux jours, Tom Stocker a déjà engrangé des commandes pour 118 masques : "un démarrage sur les chapeaux de roues", s'exclame-t-il, "on ne pensait pas que cela démarrerait aussi fort!".
Humour et solidarité pour « Made in Alsace »
Fondée en 2004, « Made in Alsace » est une marque qui, depuis le début, met en avant les initiatives locales en matière de tourisme et de gastronomie. En marge de cette activité, Fabien Kunzmann, son gérant et co-fondateur, a développé une gamme de tee-shirts humoristiques.Il n’a pas attendu la fin du confinement pour se lancer dans la fabrication de masques. Dès le début de la pandémie, agacé de voir des gens faire leurs courses avec des masques chirurgicaux alors que partout en France les personnels soignants en manquait, Fabien Kunzmann lance deux types de masques : l’un validé AFNOR, l’autre, imprimable et non-homologué. Ce dernier, appelé masque anti-postillon, est imprimé à la commande. Les clients peuvent choisir entre 14 modèles différents. Tous les masques sont faits en coton 100% bio, lavable à 60°C.
Très vite, les commandes affluent : 5.000 masques à 14,95 euros sont vendus. Sur le prix élevé, Fabien Kunzmann se justifie : « la moitié des bénéfices est reversée à des œuvres : les Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, deux Ehpad, l’Hôpital de Colmar, l’Institut de Cancérologie Strasbourg Europe ». Au total, 5.000 euros ont été collectés.
Made in Alsace, dont le cœur de métier n’est pas de vendre des masques mais d’œuvrer au plus près des acteurs du tourisme, est confronté, comme ses partenaires touristiques, à une crise économique. Cette opération lui permet de sauver sa trésorerie mais pas sa rémunération.
Faits avec les mains et le coeur
Josiane Goergler, alias Bruane, créée des vêtements pour enfants depuis 12 ans. Elle est installée dans une boutique de Ribeauvillé depuis 2015. Au moment du confinement, une de ses amies, secrétaire médicale lui raconte le manque de masque dans son cabinet. C’est pour elle que Bruane fera son premier masque. En cadeau, bien sûr.
Très vite, elle s’aperçoit du manque cruel de masque autour d’elle : centre pour enfants handicapés, aide à la personne, etc. Avec 4 ou 5 amies, elles se mettent à couper, à coudre et à piquer à longueur de journée. 1.500 masques confectionnés avec leurs propres tissus et sur la base du patron recommandé par AFNOR. Sa marque de fabrique : pas d’élastique, mais des petits des cordons très faciles à attacher. Elle a dû très rapidement s’adapter et trouver des solutions pour contourner la pénurie d’élastique. Là aussi, tous les masques seront offerts.
Avec la levée du confinement, les boutiques ont rouvert, les commerces ont commencé à proposer des masques à la vente. Elle a fini par se mettre à les vendre aussi dans sa boutique mais à un tarif très raisonnable : 5 euros pièce dont un euro reversé à la Protection civile.
Habituée à créer pour les enfants, elle n’a que des tissus chatoyants : « L’uni, je ne connais pas ! J’adore les motifs et les couleurs ». Ses masques, confectionnés en deux épaisseurs de coton Ecotex, sont souvent très fleuris. Elle a même imaginé des masques à colorier pour les enfants sur différents thèmes : princesse, châteaux ou petits monstres. Et le coloriage, ça ne part pas en machine ? « Si vous utilisez des feutres textiles, non mais si vous utilisez des feutres lavables bien sûr que oui. Et ça n’est pas grave ! On peut recommencer après ».
Des masques pour s’amuser ou pour faire joli, sans oublier l’essentiel : ils sont là pour nous protéger et protéger les autres tant que durera cette crise sanitaire. Espérons que comme tout accessoire de mode, il finisse un jour par se démoder.