Haut-Rhin : un vendredi sur deux, les retraités du Fritig Club se retrouvent, car faire des choses ensemble rend la vie plus belle

Rund Um. Ils se donnent rendez-vous un vendredi sur deux, pour des sorties culturelles, sportives ou gastronomiques. Le Fritig Club (Club du vendredi) réunit une quinzaine de retraités qui veulent ainsi démontrer que faire des choses avec d'autres, c'est le sel de la vie.

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Le Fritig Club est né il y a une quinzaine d'années. Au départ, avec quatre ou cinq copains qui se retrouvaient régulièrement pour aller se baigner en Forêt-Noire, faire une visite culturelle et casser la croûte.  

Par le bouche à oreilles, le groupe s'est étoffé. Chacun a ramené d'autres amis, et aujourd'hui, ils sont une bonne quinzaine. Des retraités de tous bords et tous milieux professionnels, "des maires, des directeurs, des agriculteurs, de tout…" principalement Haut-Rhinois.  

Ce qui les réunit ? Pour certains, l'envie de se retrouver entre hommes, sans leurs épouses. Pour d'autres, le besoin de rompre la solitude. Mais pas seulement. Car au fil du temps, de profonds liens d'amitié se sont tissés entre ces hommes qui, pour la plupart, ne se seraient jamais rencontrés par ailleurs.  

Et le Fritig Club est devenu un moment privilégié, attendu par tous. Un temps joyeusement régressif, qui permet aussi le partage et les confidences.  

Une visite et un repas

Avant la crise sanitaire, les membres du Fritig club se voyaient chaque vendredi. Depuis, "on se rencontre chaque premier et troisième vendredi du mois" explique Jean-Jacques Wicky, coordinateur des sorties. "L'hiver, on va se baigner à Bad Bellingen, en Forêt-Noire. Et l'été, on fait des randonnées ou des visites culturelles."  

Ce troisième vendredi de mai, ils se sont donné rendez-vous à Galfingue, dans la région mulhousienne, pour découvrir l'impressionnante collection de machines agricoles réunies par un ancien agriculteur, Maurice Fischesser.  

Déambuler ainsi entre d'anciens John Deere, d'antédiluviennes batteuses sans moteur et des meuleuses a fait briller les yeux des participants. Et tout particulièrement ceux issus du monde agricole, dont Bernard Walbert de Reiningue : "Génial, ce musée" s'exclame-t-il. "Je connais toutes ces marques de tracteurs (…) Ici, c'est la nostalgie qui s'installe. Ces machines auraient abouti à la déchèterie, et c'est super de voir qu'un collectionneur s'y intéresse autant."  

Chaque vendredi, leur programme change. "Il y a peu, on a visité une ferme à Balschwiller, c'était très intéressant" raconte Jean-Jacques Wicky. "On était déjà à l'Oehlenberg, pour passer toute une journée avec les moines. Et on a aussi visité des caves vinicoles."  

D'autres sorties sont plus sportives, avec une randonnée et un pique-nique. Dans les prochains temps, ils prévoient de visiter le château du Landskron, à Leymen, avec un petit détour par la Suisse, pour découvrir l'abbaye bénédictine de Mariastein (près de Bâle). Ou encore de monter sur le Vieil Armand, ancien champ de bataille de la Première guerre mondiale, avant de prendre un repas dans une ferme auberge.  

Si nous faisons tant de kilomètres pour nous voir, c'est bien la preuve qu'il y a quelque chose qui nous réunit.

Jean-Jacques Wicky

Les participants n'hésitent pas à parcourir d'assez longues distances pour se retrouver. "Paul est de Hésingue, Gérard de Blotzheim, Jean-Paul de Hausgauen, Pierre de Berrwiller, et Bernard de Labaroche" liste Jean-Jacques Wicky. "C'est une grande famille. Et si nous faisons tant de kilomètres pour nous voir, c'est bien la preuve qu'il y a quelque chose qui nous réunit."

Un temps de partage

Ce jour-là à Galfingue, après les tracteurs, les batteuses et les meuleuses, le propriétaire des lieux entraîne la petite troupe dans sa cave où il entrepose d'anciens jeux, dont un baby foot et un billard.  

Là, le côté agréablement régressif du Fritig Club peut s'exprimer librement. Sans transition, ses membres se lancent dans des parties endiablées, avec cris, rires et gros applaudissement pour les vainqueurs.  

"Au Fritig Club, on est entre hommes" résume Gérard Bixel de Blotzheim. "C'est pour ça qu'on se retrouve." Leurs épouses ne sont tolérées que durant un week-end par an, qu'ils passent tous ensemble dans un chalet, à l'automne. Et parfois, pour une fête de Noël.  

C'est tellement joyeux. Attendre quinze jours paraît parfois très long.

Jean-Paul Tschangel

"On s'amuse énormément" ajoute Jean-Paul Tschangel de Hausgauen. "Tous ensemble, c'est tellement joyeux. Attendre quinze jours paraît parfois très long. On attend tous impatiemment le prochain vendredi de sortie. Tous se préparent à ça."  

"On ne fait pas de politique" précise Henri Haebig de Balschwiller. "On se retrouve pour se vider la tête, pour rire, faire des blagues." Mais, soudain plus grave, il ajoute : "L'essentiel est d'échanger, de parler de nos problèmes, de la vie. C'est tellement chouette de pouvoir confier ses soucis, de vider son cœur, ça soulage."  

Le Fritig Club est aussi le théâtre de belles histoires, et d'émouvantes retrouvailles. Depuis quelques mois, le demi-frère de Bernard Walbert, Reinhard, qui vit à Emmendingen (Bade-Wurtemberg), y est également convié.  

Il explique : "On se connaît seulement depuis six mois. On est demi-frères, on savait très peu l'un de l'autre. Mais depuis l'automne dernier, on se retrouve. Et il m'invite dans ce groupe."    

Un polo comme signe d'intégration

Durant l'apéritif, pris à l'ombre d'une ancienne grange, Bernard Walbert distribue des polos bleu marine, portant l'inscription Fritig Club, aux trois derniers arrivés.  

Le moment est entrecoupé de blagues de potaches sur les tailles des vêtements, et le "régime dès lundi" qui attend leurs destinataires. Mais sa solennité n'échappe pas aux trois intéressés : "Henri, Reinhard et Charles sont maintenant officiellement membres du Fritg Club."  

L'essentiel est d'échanger, de parler de nos problèmes, de la vie.  

Henri Haebig

"Pourvu que ça dure, lo ammel, on l'espère. C'est une telle joie" s'exclame Charles Walbert, qui vient d'enfiler son nouveau polo. "Ils ne donnent pas le tee shirt aux premiers venus" ajoute son comparse, Henri Haebig. "Ils ont dû un peu nous tester pour voir comment on réagissait. Mais en nous, ils ont trouvé les bonnes recrues."  

Ce jour-là, le repas est pris sur place : paëlla commandée à un traiteur local, et tarte à la rhubarbe apportée par l'un des participants. "Souvent, le repas est tiré du sac" tient à préciser Jean-Jacques Wicky. "Il ne s'agit pas de dépenser beaucoup d'argent."  

En effet, pour lui comme pour les autres, l'essentiel est ailleurs : montrer que, sans grandes dépenses, on peut vivre de beaux moments. Et donner envie à d'autres, "des personnes seules chez elles", de créer des groupes semblables au leur. Pour permettre de développer le trésor de l'amitié, plus précieux que jamais.

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