Claudy Pierrat est une accro de la fève depuis toute petite. Elle est aujourd'hui à la tête d'une collection parmi les plus en vue dans le réseau des fabophiles. Mais plus que la quantité, pour cette Alsacienne de Pfastatt (Haut-Rhin), ce qui compte c'est la qualité. Portrait.
A 54 ans, Claudy Pierrat affiche un joli score. Elle avoue ne pas avoir compté mais elle estime, au bas mot, sa collection à plus de 10 000 pièces. Pour une fabophile, c’est plus qu’honorable. Ce n’est pas autant que sa voisine de Pfastatt, Jacqueline Goepfert, qui détient le record de France et que nous avions rencontrée, mais Claudy n’a pas à rougir de son butin.
Un trésor dûment acquis, enrichi et alimenté depuis plus de quatre décennies. Dès l’âge de 10 ans, la passion de la fève saisit Claudy sans jamais la lâcher. "Je collectionne toutes les fèves. Enfin non, se reprend-elle aussitôt, pas autant que Jacqueline Goepfert qui fait beaucoup de choses. Moi, par exemple, je n’aime pas trop les fèves Disney. Je préfère celles des pâtissiers, plus originales".
Une passion dévorante
Claudy fonctionne aux coups de cœur. Elle se laisse séduire par la belle fève, celle qui sort du lot. Alors les fèves Disney ou Astérix, celles qu’on met à toutes les sauces, les Mickey, les reines des neiges, très peu pour elles. "Cela ne m’intéresse pas". Tout simplement.
Sa passion dévorante la poursuit jusque dans les moindres recoins de sa vie. Elle se souvient que lorsqu’elle exerçait encore son métier de factrice, 32 ans durant quand même, ses clients avaient toujours une petite attention pour elle. "Pendant l’Epiphanie, parfois j’avais un petit mot, 'ouvre la boîte aux lettres, il y a quelque chose pour toi'. C’était un coffret de fèves que j’ouvrais aussitôt". Son mari ne manque pas de lui prendre, à l'occasion, les fèves qui vont bien dans la boulangerie du coin. Ses proches, ses parents, ses amis pensent à elle aussi quand il le faut.
La quête de la perle rare
Claudy traque la fève hors pair là où elle se niche. Dans les grandes maisons, où le travail artisanal est valorisé. En Alsace, il y a de quoi faire. "On a le pâtissier chocolatier Gaugler qui a plusieurs magasins dans le Haut-Rhin. Il travaille avec des peintres de renom. Les fèves portent sa signature, c’est une façon de personnaliser le produit. À Lutterbach [à côté de Mulhouse], la pâtisserie Emmanuel Gross fait aussi ce genre de choses, avec son nom, cela apporte de la valeur". Le petit détail a son importance.
Pour un fabophile, la France est un pays de cocagne. Il suffit de chercher un peu, de se connecter au réseau et de remonter les filons pour trouver les pépites. Les portes des plus grands maîtres s’ouvrent alors. Pour Claudy c’est un monde merveilleux. Il y a par exemple les émaux de Longwy, en Lorraine. Forte de plus de deux siècles de tradition et de savoir-faire dans la faïencerie, la manufacture édite une série de fèves tous les ans pour les pâtissiers lorrains. "Cette année la thématique décline toutes variétés de singes. Auparavant, ils ont fait des lions, des tortues, etc."
Il y a les fèves Colas Clamecy en Bourgogne. "Ils fabriquent de très jolies séries en verre". Un savoir-faire unique, là aussi, au service des boulangers-pâtissiers. Et des fabophiles.
Pour Claudy, Paris brille de quelques feux aux noms illustres, comme Lenôtre ou Michalak. Ils représentent l’excellence française de la pâtisserie, de la galette et des coffrets soignés qui mettent des étoiles dans les yeux et de jolies fèves dans les collections.
Jusqu'au bout du rêve
Et puis il y a les fèves dont on rêve. "Au Havre il y a un petit créateur qui a fait des fèves sur le thème du débarquement en Normandie, créées spécialement pour les madeleines Jeannette. C’est une série de six fèves représentant chacune une scène différente du débarquement. Elles sont très jolies. J’en ai déjà deux, je cherche les quatre autres". Une quête sans fin. Claudy rêve aussi de fèves plaquées or. De petits bijoux quoi.
Les fèves de cœur tiennent une place particulière. Celles qui évoquent un patrimoine local. "Chez nous il y a les fèves qui représentent les mines de potasse. Le boulanger en faisait tous les ans, c’est notre patrimoine". Et surtout, surtout, il y a celles de Nancy. "Je cherche des fèves de ma région d’origine comme la place Stanislas, j'y suis très attachée".
Chez elle, à Pfastatt, la place pour ranger toutes ces fèves commence à manquer. "Je suis en train de chercher un autre meuble." Tout est soigneusement conservé et classé dans des petits casiers par séries et par années. "Je les prends en photo mais j’évite de trop les manipuler parce qu’on les casse vite. C’est déjà arrivé en ouvrant une boîte." Alors les fèves ne sortent que pour les grandes occasions.
Lors des salons ou des bourses d'échange, notamment. Claudy Pierrat prépare la prochaine bourse qui aura lieu à Wittenheim, dans le Haut-Rhin, le 13 janvier. "Ce sont des rencontres avec d'autres fabophiles qui nous permettent de compléter nos collections ou d'acquérir des pièces qu'on n'a pas encore". Une quinzaine d'exposants venant de toute la France seront présents.